Aurélien Barrau sur l’effondrement de la biosphère.

lundi 16 mars 2020.
 

Au-delà du capitalisme vert.

Conférence d’Aurélien Barrau sur l’effondrement de la biosphère.

Le titre de l’article ne doit pas faire penser qu’Aurélien Barrau est un partisan de la Collapsologie où tout s’effondreraient définitivement.  ».

Aurélien Barrau a organisé une conférence sur le thème : « Comment habiter maintenant la Terre ?

On peut écouter cette conférence en cliquant sur le lien suivant

https://www.youtube.com/watch?v=v2V...

La première partie de la conférence est particulièrement intéressante par le bilan chiffré de des destructions dans différents domaines de la biosphère, notamment de la biodiversité.

Aurélien Barrau, astrophysicien cosmologiste est aussi titulaire d’un doctorat de philosophie (voir Wikipédia) est un humaniste partisan de l’écologie politique.

Il tente une approche pluridisciplinaire de l’écologie couvrant non seulement le champ scientifique mais aussi celui de l’histoire, de la sémiologie, de la poésie, etc.

Il dénonce l’idéologie de la croissance productiviste et le comportement suicidaire des responsables politiques sont néanmoins élues par une majorité de la population qui reste prisonnière de cette idéologie.

Il nous sépare de remarques que l’on entend rarement. Par exemple, défendre une réforme des retraites obligeant les gens à travailler plus longtemps augmente la production, pas forcément utile, provoquant un surcroît de pollution et de consommation de matières premières : c’est donc une mesure anti écologique.

On accuse souvent la Chine de polluer plus que des pays occidentaux, mais on oublie que ces mêmes pays ont délocalisé leur production en Chine et importent de nombreux produits chinois. D’une certaine manière, on exporte donc notre pollution.

Il doute fortement de la possibilité d’une régulation du capitalisme mais attire l’attention sur le fait qu’une simple critique du capitalisme ne suffit pas. On peut par exemple imaginer des usines communistes autogérées polluant fortement l’environnement.

Néanmoins son analyse économique reste superficielle. Selon lui, il n’existerait pas de « réalités économiques » mais simplement des conventions économiques qui ne dépendent que de la volonté des hommes. Ce point nécessiterait une réflexion plus avancée : l’exploitation de la force de travail des salariés n’est-elle pas une « réalité économique » ? On pourrait répondre à cette interrogation que l’exploitation de la force de travail résulte de l’établissement d’un certain type de rapport social, s’exprimant juridiquement par un contrat de travail, entre un individu nommé patron et un autre nommé salarié. Certes, mais si théoriquement le salarié est libre de disposer comme il veut de sa force de travail, dans la réalité, il est le plus souvent contraint de la vendre pouvoir subvenir à ses besoins.

En outre, ce type de rapport résulte de l’existence de deux classes sociales antagoniques : d’une propriétaire des moyens de production et d’échange achetant des forces de travail pour les exploiter et réaliser un profit et l’autre classe constituée de travailleurs uniquement propriétaires du moins pour l’essentiel, de leur force de travail. S’agit-il alors ici d’une réalité économique ou d’une simple convention économique ?

On constate ici les limites du conventionalisme pour appeler que ce courant de pensée a été promu par le mathématicien Henri Poincaré et le physicien Duhem

Il faudrait donc mieux définir ce que l’on appelle « réalité économique ». Une approche marxiste classique consiste à opposer infrastructure matérielle et superstructure dont l’idéologie juridique fait partie et notamment les conventions.

Mais ce n’est pas si simple : le philosophe marxiste Henri Lefebvre, dans son ouvrage sur le mode de production étatique, a fait remarquer que la notion de « propriété des moyens de production » censée se rapportait uniquement à la sphère matérielle fait pourtant appel à la notion de propriété qui est de nature juridique. On constate donc sur cet exemple, pour reprendre une terminologie de Maurice Godellier, qu’il existe une intrication entre le « matériel » et « l’idéel » dans le champ économique et social. Avec le développement de la biopolitique et des sciences sociales (notamment de la théorie psychologique des représentations et de l’anthropologie), les marxistes savent maintenant que l’idéologie, l’imaginaire et les représentations sociales constituent bien des forces matérielles au moins aussi importantes que les conditions matérielles d’existence.

Aurélien Barrau rejoint d’ailleurs cette idée en soulignant la force des symboles.

La vision d’Aurélien Bareau du PIB est trop globalisante et simpliste. Il est bien évident que toute activité technique dans le domaine industriel ou agricole, quelque soit sa nature, a un impact sur l’environnement.

Mais cet impact selon la technique utilisée, est très variable et surtout ce sont les choix de ces technologies pour faire vivre la société qui sont importants.

Il y a des choix destructeurs (fabrication d’armes par exemple), des choix générateur d’un gaspillage d’énergie et de matière considérable et des choix économes.

Mais ces choix sont déterminés globalement par le type de système économique considéré : ce système est-il au service du bien commun, dans l’intérêt général ? Ce système respecte-t-il les êtres vivants et plus généralement la biosphère ?

Et sur ce choix de système économique, Aurélien Barreau est silencieux. Il ne veut sans doute pas trop apparaître comme anti capitaliste par choix stratégique d’un auditoire assez large.

Mais pourtant une telle alternative existe : il suffit de lire le livre de Jacques Généreux « L’Autre société » (éditions du Seuil) ou plus modestement le programme « L’Avenir en commun » pour se rendre compte qu’une autre vision de la croissance intégrant en son cœur l’écologie est possible.

[ Remarquons que Jacques Généreux a mis en évidence la convergence de vues entre l’idéologie capitaliste prônant la croissance sans limite et l’idéologie de l’étatisme socialiste célébrant le développement des forces productives pour atteindre la société d’abondance des biens matériels permettant le bonheur des humains. cette vision productiviste de l’économie a été commune à des sociétés que l’on a présenté comme antagoniques, ce qui n’est que partiellement vrai.

Comme beaucoup d’intellectuels critiques, dont les analyses sont proches de celles de La FranceInsoumise, il reste en retrait de ce mouvement comme semblant ignorait son existence. Il y a évidemment plusieurs raisons possibles à une telle attitude mais ce n’est pas l’objet de cet article de les analyser.

En tout cas, il semble que LFI a encore du travail à faire pour être mieux connu et plus attractive pour un certain nombre d’intellectuels.

Voir aussi :

Interview d’Aurélien Barrau sur Thinke rviw https://www.youtube.com/watch?v=XO4...

Aurélien Barrau sur Wikipédia https://fr.wikipedia.org/wiki/Aur%C...

Hervé Debonrivage


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message