Soigner la névrose d’échec du non de gauche (Bernard Teper)

samedi 2 juin 2007.
 

Quand une ligne stratégique erronée du non de gauche alimente la défaite politique

Le 29 mai 2005, le non de gauche surpasse avec 31,3% le non de droite, le oui de gauche et le oui de droite. C’est alors lui qui créé l’actualité.

A partir de là, la droite fait sa mutation, la démocratie-chrétienne tient compte de la réalité matérielle, le oui de gauche commence sa rénovation. Seul le non de gauche s’enferre dans une névrose d’échec. Attention la névrose d’échec,si elle a des « bénéfices secondaires », elle empêche toute stratégie gagnante.

Sarkozy fait à droite ce que François Mitterrand a fait à gauche en 1981. Il reprend l’électorat d’extrême droite, relance le credo néolibéral (basé sur l’idée que l’offre de travail crée la demande) en faveur des entreprises et des plus riches, surfe sur les mots qu’aiment entendre le peuple (et les couches populaires qui exècrent le communautarisme) en vidant, bien sûr ces mots de leur contenu.

Bayrou tout en faisant mine de surfer sur les préoccupations des français, proclame le discours le plus néolibéral (remplacement des cotisations sociales par la TVA, interdiction constitutionnel du déficit de fonctionnement) supprimant par là toute possibilité de relance keynésienne même européenne.

Royal développe quant à elle un paradigme social-libéral. Plus encore que ces propositions dont certaines méritent attention, ce sont les silences sur les réponses aux questions posées par le peuple et principalement par les couches populaires qui scellent son caractère social-libéral.

De ce point de vue, elle ne s’est pas encore arrachée à l’idéologie social-libérale. Comment peut-on ne pas réagir sur l’axe de la campagne de Nicolas Sarkozy basé sur le travail avec son slogan « travailler plus pour gagner plus » ? Alors qu’un chef d’entreprise n’embauche ou propose des heures supplémentaires que si la demande est forte et pas parce qu’il ne paiera pas ou moins de cotisations sociales.

Donc la seule solution est de lier la croissance avec la diminution de la dette et l’augmentation des recettes (tout en modifiant la répartition des richesses, bien sûr). Ségolène Royal l’a admis. Mais comment ? Avec quelle politique budgétaire, monétaire, industrielle et surtout quelle politique d’innovation industrielle haut de gamme ? Et de définir comment infléchir la politique européenne pour y parvenir. Il ne suffit toujours pas de crier comme un cabri : « Europe, Europe, Europe ».

Quant aux candidats du non de gauche, outre le fait qu’il n’ont pas plus que la candidate socialiste proposé des politiques macroéconomiques pourtant centrales dans la période, ils n’ont comme outil culturel que la notion de partage et d’assistance de l’extrême gauche démocrate-chrétienne. Travaillant sur un segment idéologique et politique très tenu (voir les résultats électoraux des candidats du non de gauche et les reculs de beaucoup d’organisations altermondialistes), ils n’ont pas intégré l’appel des couches populaires à un Etat social républicain protecteur de la solidarité de la naissance à la mort. C’est pour cela qu’ils ne réagissent pas suffisamment à la nécessaire réflexion sur le modèle laïque de la république sociale de Jean Jaurès actualisé pour le 21 ème siècle.

L’incapacité du non de gauche,force qui a pourtant fait irruption le 29 mai 2005, à penser la défaite culturelle du 6 mai 2007,risque de nous coûter très cher et permettre à un discours très volontariste ,voire bonapartiste de la droite de continuer à faire illusion. Même si le niveau des luttes sociales augmentent à l’avenir, la refondation culturelle de l’ensemble de la gauche tant politique, qu’associative, syndicale ou mutualiste s’avère nécessaire pour sortir de la névrose d’échec.

bernard.teper@ufal.org


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