Le 23 octobre, Claude-François de Malet, aristocrate et ancien militaire, réalise un coup d’état pour rétablir la République. Il a une carrière ralentie par ses positions ouvertement révolutionnaires. Hostile à Napoléon dès le consulat, il vote contre le consulat à vie et démissionne lorsque Bonaparte est proclamé empereur. Il est nommé gouverneur en Italie où il lasse le pouvoir par ses extravagances qui vont du petit trafic à la propagande républicaine.
En 1807 il est mis à la retraite. Il semble alors avoir participé à au moins deux conspirations. En 1808, il projette de coller 12 000 affiches dans Paris proclamant un gouvernement provisoire, en l’absence de Napoléon qui fait campagne en Espagne. Il est enfermé. A sa demande, prétextant des raisons médicales, il est transféré dans une maison de santé. Cela suffira à parachever son image de personnalité troublée. C’est là qu’il va échafauder son complot le plus abouti.
Le dispositif est minutieux. De fausses dépêches annoncent la mort de Napoléon devant Moscou. Pour toute une série d’acteurs qui doivent agir de bonne foi, un lot de faux sénatus-consulte (actes du sénat ayant valeur de loi) est rédigé pour chacun, détaillant la suite d’actes qu’il doit accomplir.
La troupe est mobilisée, l’hôtel de ville est réquisitionné, des complices de Malet sont délivrés, la Trésorerie et les barrières de Paris sont occupées, le gouvernement provisoire est sur le point d’être réuni ; tout se passe bien jusqu’à ce que le colonel Doucet, qui sait que l’empereur a échangé des missives après la date supposée de sa mort, fait arrêter Malet.
Le malheureux Malet est l’objet d’une lutte de pouvoir intestine que livrait à Paris Clarke, ministre de la guerre, contre Savary, ministre de la Police, et Cambacérès, archichancelier (sorte de 1er ministre), en l’absence du chef de l’Etat. L’exécution rapide des criminels, dès le 29 octobre, veut montrer la valeur du ministre fidèle. A son retour Napoléon jettera « C’est une fusillade, c’est du sang […] Pourquoi m’avez-vous privé du plus beau droit du souverain, celui de faire grâce ; vous êtes bien coupable ! »
Lorsque le président de la commission militaire chargée de le juger demande le nom de ses complices, Malet répond : « La France entière et vous-même, monsieur le président, si j’avais réussi ». C’est dire la fragilité du régime que sa tentative révèle au-delà de son échec. Folle ou déterminée, la geste de Malet montre que le couronnement de 1804 n’a pas étouffé la République.
Sylvère Cala
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