Polarité de classes sociales selon J Bidet : Deux "en-haut" et trois "en-bas".

mercredi 16 août 2017.
 

Polarité de classes sociales selon J Bidet : Deux "en-haut" et trois "en-bas".

Source : Le Grand soir https://www.legrandsoir.info/polari... Auteur : Christian DELARUE

Le marxisme "alter" de Jacques Bidet ne se réduit pas à cette simple note, qui saisit la problématique "par la fin", en laissant de côté les développements sur le méta-structurel et le structurel.

Sur la problématique spécifique de l’Etat-monde lire "Jacques Bidet : l’état-monde est déjà là "

1 - L’en-haut est subdivisé en deux fractions.

La bipolarité de la petite classe sociale supérieure se manifeste par une alliance parfois conflictuelle entre sa fraction dominante et sa fraction dirigeante. J Bidet explique (1) que "la classe dominante comporte deux pôles, celui du pouvoir marchand fondé sur des titres de propriétés, celui du pouvoir organisationnel-culturel fondé sur des titres d’autorité compétente". (p112). L’exploitation dit-il "suppose le propriétaire et le manager (à l’analyse de Marx il faut joindre celle de Weber)" et ce dans une relation à la fois de connivence et d’antagonisme.

Il poursuit : Ce pôle des dirigeants-et-compétents n’intervient pas seulement sous l’autorité du capitalisme dans les procès de production marchands, mais également sous l’autorité de l’État dans les fonctions administratives aux divers échelons, dans les services publics de santé, d’enseignements, de recherche, etc. de même, aussi, que dans les professions libérales.

Pour Jacques Bidet ce lien de connivence des dirigeants avec les dominants n’est cependant pas fatal. Ceux d’en-bas peuvent agir pour constituer un bloc de gauche avec eux. Cela mériterait plus tard une reprise de cette note avec de plus amples développements sur la dynamique d’ensemble pour l’alternative.

Pour moi cette bipolarité inégale de la classe dominante ouvre des perspectives de conquêtes ou se combinent les affrontements classiques "de classe" (la "rue") et les pressions "gramsciennes" dans les cercles dirigeants pour les "gagner" à la cause du peuple-classe, de la "classe fondamentale" dit JB. L’accent doit être mis plus sur la conflictualité de classe travail/capital que sur les tentatives de partenariat car la force d’intégration intra-systémique est souvent plus forte que des appels plus ou moins réussis à la "solidarité avec ceux d’en-bas".

2 - L’en-bas, en trois fractions.

L’en-bas ici est large et non pas les seules "couches populaires" (ouvriers et petits employés). Ce que je nomme "peuple-classe" est nommé par Jacques Bidet "classe fondamentale". L’une comme l’autre appellation ont suscité des critiques. En fait un large cercle de pensée, marxiste et anti-marxiste, s’obstine à empêcher de saisir ce qu’est cet "en-bas large" excluant précisément la classe dominante ici bipolaire. Cette exclusion s’opère soit par référence à un englobant plus large - qui est souvent la Nation mais aussi le peuple souverain - soit par le soulignement d’un "en-bas" plus restreint du type "couches populaires" ou "les prolétaires épuisant leur salaire en fin de mois".

Jacques Bidet a choisi le terme "classe fondamentale" pour mettre l’accent sur la positivité sur sa puissance potentielle (p128). J’avais préféré pour ma part le terme peuple-classe pour des raisons identiques avec le mot "classe" qui connote un rapport de classe potentiellement offensif et de libération mais aussi avec l’ajout du terme "peuple" soulignait aussi deux choses : son ampleur (95% de la population) et surtout sa diversité interne, son hétérogénéité. K Marx avec H Arrendt en somme.

L’enjeu réside dans l’alliance des classes et couches sociales internes en vue de l’alternative (extra-systèmique). Les deux pôles de la classe dominante se décomposent et recomposent dans le cadre de l’alternance (intra-systèmique). L’alliance de classe fait ici partie de la lutte des classes.

Pour Jacques Bidet, les trois grandes fractions de la "classe fondamentale" sont d’une part 1 - les travailleur salarié du capital qui est exploité à travers un rapport de marché ; d’autre part 2 - les salariés d’institutions publiques, centrales ou territoriales qui ne produisent pas de marchandises mais des richesses ; et enfin 3 - les travailleurs indépendants - agriculteurs, artisan, commerçant, professionnel libéral, etc. pris dans une contrainte marchande plus englobante-stimulante, mais toujours lui aussi impliqué dans un maquis organisationnel de compétences, de règlements, et relié à une production non marchande de richesses, relevant de l’organisation publique. Les différences de statut ne sont pas si grandes pour que ne puisse pas s’opérer l’unité de la classe. Car cette unité est bien à l’arrière-plan de ce tri-fractionnement. Et c’est le prolétariat industriel qui est chargé pour JB de cette tâche politique et historique.

Jacques Bidet ne manque pas d’évoquer les autres clivages internes à la "classe fondamentale" : les rapports hommes-femmes, nationaux-étrangers, précaires-"carrières", jeunes-vieux, de conception-d’exécution, etc...

Page 156, il écrit à propos des rapports hommes-femmes : "Parler de consubstantialité, c’est se démarquer tant des féminismes essentialistes, qui établissent entre les femmes et les hommes une différence anthropologique irréductible, que des féminismes culturalistes, qui rapportent la diversité des rapports de genre à la variété des cultures. C’est aussi rejeter l’extrinsécisme ordinaire qui voit dans la classe et le sexe deux questions essentiellement distinctes, s’interdisant par là de saisir les relations et les contradictions entre ces deux rapports sociaux, et donc aussi entre les luttes qui s’y rapportent.

Christian DELARUE

Notes :

http://amitie-entre-les-peuples.org...

(1) p 112 de l’Etat-monde. Libéralisme, socialisme et communisme à l’échelle globale - Refondation du marxisme par Jacques Bidet PUF nov 2011


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