Monsieur le Président, comment la diaspora grecque, et en particulier la communauté grecque aux États-Unis, peuvent-elles aider la Grèce et comment comptez-vous répondre aux difficultés de la nouvelle période post-dictatoriale que vous annoncez, puisque vous formerez le prochain gouvernement ?
« La mobilisation de toutes les forces de l’hellénisme est d’une énorme importance nationale. Il devient plus impératif dans ces moments difficiles que traverse notre pays. Les Grecs vivant à l’étranger sont les meilleurs ambassadeurs des intérêts grecs dans les pays où ils résident. Nous ne voulons pas que les communautés grecques de l’étranger et la diaspora grecque soient de simples figurants, nous ne voulons pas simplement d’une relation intermittente avec elles. Nous voulons que la diaspora grecque participe aux progrès grecs, lutte avec nous pour apporter des solutions aux problèmes majeurs. Il y a de considérables possibilités d’une coopération effective avec les membres et organismes des communautés grecques de l’étranger, et nous allons les mettre en valeur afin de restaurer l’image internationale de la Grèce, renforcer le tourisme, promouvoir les exportations grecques et attirer des investisseurs ».
SYRIZA a par le passé été favorable au fait d’accorder le droit de vote par correspondance aux Grecs vivant à l’étranger. Cette question fera-t-elle partie des priorités de votre gouvernement ?
« Il est inconcevable que les citoyens grecs soient les seuls de toute l’Union européenne a être privés du droit inaliénable de voter. Nous avons là non seulement une négligence historique du gouvernement mais aussi une indifférence incompréhensible. SYRIZA depuis 2009 a pris clairement position au Parlement grec sur la question du droit de vote des Grecs de l’étranger. Nous avons déposé cinq propositions qui assureront toutes les garanties pour le vote des Grecs vivant à l’étranger. Et dans ces propositions -dans la plupart- il y avait identification avec le Conseil de la diaspora. Ceux qui ont gouverné le pays ces 40 dernières années n’ont pas voulu trouver de solutions. Et pire encore, ceux qui gouvernent aujourd’hui ne dissimulent pas leurs intentions. Non seulement ils n’ont pas l’intention de résoudre ce problème mais, de manière anti-démocratique, ils empêchent 100 000 jeunes âgés de 18 ans, de voter lors des prochaines élections. Peu leur importe la démocratie devant leurs petits intérêts partisans. »
On dit que la politique est l’art du possible. On suppose que vous êtes préparés aux grandes difficultés que vous rencontrerez dans les négociations avec les Européens. Mais jusqu’où peut aller le possible pour qu’il ne détruise pas vos priorités gouvernementales ?
a) De même, une position claire, Monsieur le Président : oui à l’euro à tout prix ?
b) Y a-t-il un plan B si les Européens refusent une réduction drastique de la dette ?
« Nous sommes préparés à tout. Tout à fait préparés. Et je précise, en Grèce et hors de Grèce, que notre programme, les déclarations de Thessalonique sur la crise humanitaire et sur le rétablissement de l’État de droit, seront mis en pratique indépendamment de la grande lutte de la négociation. Nous, nous n’avons pas de deuxième ou de troisième plan. Nous avons un programme clair et un discours clair. Nous n’avons pas un langage pour l’intérieur et un autre pour l’extérieur. Nous sommes depuis des décennies sur la scène politique, sans craindre le coût politique et en disant la vérité. La réduction de la dette a été notre proposition depuis 2010. Elle s’accompagne de nos analyses et d’un programme de retour d’une société qui protège le monde du travail, de reconstitution de l’économie, programme que nous travaillerons et réévaluerons en permanence. À l’époque tout le monde disait que nous étions irréalistes. Aujourd’hui, il n’y a pas d’espace politique, d’autorité institutionnelle, d’institut, d’analyste, qui ne soutient pas la solution de la réduction d’une dette non viable. D’ailleurs, la sortie de la crise avec une politique d’austérité est -tout simplement- impossible. Et ceci a été clairement démontré au cours de toutes ces années. Cette discussion a été entamée par SYRIZA, cette hypothèse ne peut vaincre que par SYRIZA. SYRIZA exigera la restructuration de la dette, avec l’effacement de la plus grande partie et une clause de croissance.
Au sujet de votre deuxième question, si vous posez cette question à l’un des membres du personnel politique qui a servi le protocole, vous dira-t-il à quoi s’arrête ce »à tout prix » ? À combien de suicides ? À combien d’hôpitaux et d’écoles fermées ? À des salaires de 150 euros et à des pensions de 100 euros ? À combien de millions de chômeurs et de pauvres ? Si vous nous posez la question à nous, nous vous répondrons clairement. L’ Euro dans la dignité, la justice, la solidarité. L’Euro sans d’autres sacrifices . »
Un problème que les Grecs de l’étranger mettent eux aussi en évidence c’est le manque de confiance en l’État, à cause de la corruption et de la bureaucratie. Une supposition, vous rencontrez des résistances en luttant contre. Quelles sont vos propositions pour un secteur public efficace, non corrompu et au service du citoyen ?
« Je comprends parfaitement ces sentiments. Commençons par admettre que cet État clientéliste, bureaucratique et inefficace est une création du PASOK et de Nouvelle Démocratie. C’est leur image et elle leur ressemble. Nous connaissons chacun des maux de l’administration publique. Nous considérons que ces cinq années de mémorandum ont fait de cet État clientéliste un État qui s’effondre. Dans le programme que nous avons présenté à Thessalonique, nous expliquons clairement que nous irons vers une reconstruction radicale de l’État. Nous allons changer la structure du gouvernement, supprimer les nombreux organes gouvernementaux qui, non seulement n’ont pas apporté de solutions, mais ont été fréquemment des foyers de corruption. Nous resserrerons et rendrons efficace le contact naturel entre l’administration et le citoyen, nous codifierons la législation, nous simplifierons le système fiscal, nous supprimerons la masse de justificatifs exigés pour les choses les plus simples, mais de plus nous renforcerons aussi les mécanismes de contrôle contre la fraude fiscale et la corruption. Mais dans le même temps nous investirons sur les personnels de l’administration publique, il n’est pas question qu’une réforme essentielle se fasse sans eux. Avec des licenciements, des mises en disponibilité et un droit disciplinaire qui fonctionne par intimidation, aucun secteur public ne peut faire partie de la reconstruction productive. Permettez-moi de vous dire que notre objectif principal est de percer enfin l’abcès du système des combines, que cessent les intérêts qui ont »pris comme client » le secteur public. Le triangle des combines entre partis, intérêts économiques et banques fera partie du passé. Enfin, nous avons besoin d’une économie saine et dynamique ».
Il y a eu des interprétations erronées sur la question des investissements privés. Quels sont les principes qui doivent les régir ?
« Il y a une interprétation erronée. Mais c’est une tentative du gouvernement d’appeler le pillage »investissements » . En Grèce aujourd’hui nous avons simplement un changement de titre de propriété. Ils prennent des biens publics et les livrent au secteur privé. Ils prennent des entreprises publiques et les privatisent en échange d’un »plat de lentilles ». Je vous demande d’examiner tous les »investissements » réalisés dans le pays. Il n’y en a pas un qui, en retour, ait bénéficié à la société et l’économie. Par contre, vous en trouverez de nombreux qui sentent la combine ».
National Herald, journal de la diaspora grecque. Traduction Frederique Bouvier.
Date | Nom | Message |