A gauche : quels projet, rassemblement et stratégie politiques ?

lundi 8 septembre 2014.
 

Après les rassemblements de La Rochelle et des Karellis, le débat est ouvert à gauche où, au delà du constat d’échec des politiques menées et à venir de l’exécutif, les idées ne manquent pas au PC, au PS, chez EELV et dans la société civile pour refonder un véritable mouvement populaire. Les points de vue d’Olivier Dartigolles, Jérôme Guedj, Julien Bayou et Philippe Corcuff en témoignent.

A) Olivier Dartigolles , porte parole du PCF

"Depuis Bruxelles, François Hollande a exigé du PS d’être « à l’unisson » de sa politique. (...) Il n’en sera rien car la réalité est déjà celle de discussions, d’échanges, de rencontres, de débats publics, comme ce dernier week-end aux Karellis, avec les représentants de forces politiques et sociales qui convergent, dès à présent, autour d’une volonté commune de ne pas attendre 2017 pour riposter, construire une perspective progressiste, des solutions, et retrouver de l’imaginaire. "

"Samedi, à La Rochelle, Pierre Laurent n’a pas fait le déplacement pour rien. Les conditions étaient réunies pour, les yeux dans les yeux, avec un discours de vérité sur les valeurs de gauche, s’adresser directement à ces femmes et ces hommes socialistes qui sont attachés à leur parti et se désolent de la tournure prise par les événements. Si l’intervention du secrétaire national du PCF a été si chaleureusement accueillie par la base militante, c’est à partir de l’actualité d’un combat et d’une ambition pour demain  : celle de redresser la France grâce au progrès social et démocratique. Dès maintenant, sans attendre, tout en poursuivant le débat, il y a des batailles immédiates à engager (emploi, logement, démocratie sociale avec les seuils sociaux dans les entreprises, investissement et services publics à opposer au coût du capital), non pas pour prendre date, mais pour obtenir des victoires et faire naître de l’espoir." (...)

"L’essentiel est d’engager la riposte, de ne pas laisser s’installer un paysage politique qui pourrait se traduire dans trois ans par Le Pen-la droite et l’orientation Hollande-Valls avec une marginalisation durable de la gauche de transformation. Il n’y a aucune fatalité à cela… ni de temps à perdre."

B) érôme Guedj, président PS du conseil général de l’Essonne, animateur de Maintenant la gauche

"Notre système politique est organisé de telle manière que, si la gauche ne se rassemble pas, elle périt. (...) Le risque de décomposition totale de la gauche est réel. Cette crise n’est pas gouvernementale, elle est générale. Pour rassembler la gauche, c’est plus habile et futé d’être au départ soi-même de gauche. (...) "L’abandon de l’encadrement des loyers dans la loi Alur, le signal pour le moins ambigu que constitue la nomination d’Emmanuel Macron à l’Économie, les ordonnances sur le travail du dimanche, les seuils sociaux… ne vont pas réenchanter le cœur des électeurs de gauche. L’obstination austéritaire ne risque pas de favoriser la reprise économique mais va bien au contraire aggraver la situation. Ce qui m’inquiète, c’est l’entêtement quasi dogmatique à poursuivre cette politique économique qui n’a strictement aucun effet vertueux" (...) "Pierre Laurent l’a dit avec force devant les socialistes à La Rochelle et j’ai pu mesurer par l’accueil qui lui a été réservé que nombre d’entre eux y étaient favorables."

C) Julien Bayou, conseiller régional EELV d’Ile de France

"Le constat est implacable  : socialement, économiquement, du point de vue démocratique ou de la prise en compte de l’urgence écologique, l’alternance n’a pas eu lieu."

"Avec Eva Joly, nous avons proposé il y a peu une primaire de l’espoir, pour faire naître une nouvelle dynamique à gauche. C’est peu dire que nous avons été heureux de l’accueil fait à cette proposition  : écologistes, frondeurs, membres du Front de gauche, de Nouvelle Donne et autres partis de gauche, mais aussi membres d’ONG, de syndicats et d’associations qui œuvrent au quotidien pour le progrès écologique et social et ne peuvent se résoudre à la tétanie ambiante ont manifesté leur intérêt pour cette démarche volontairement imprudente. Imprudente car, après tout, bien sûr nous avons des divergences. Mais du couple revenu maximal/revenu minimal universel au caractère primordial de la transition écologique, en passant par l’indépendance de la justice, la lutte contre les discriminations et pour l’égalité, la défense des droits des salariés comme le combat pour des droits nouveaux ou le diagnostic sur la nécessité d’une révolution fiscale, nous avons tant en commun. Sans compter le refus de la résignation, l’envie de remiser les recettes du XXe siècle au placard, de redonner la parole et le contrôle aux citoyens et l’ambition de défricher l’avenir… et de devenir majoritaires pour faire triompher nos idées."

D) Philippe Corcuff, sociologue, militant libertaire et altermondialiste

"Le brouillard idéologique et politique actuel a comme un arrière-goût nauséabond d’années 1930  ! C’est pourquoi des discordances temporelles rendent notre chemin difficile, car il s’agit de réagir dans l’urgence à la menace pressante de l’extrême droite, tout en refondant à moyen terme une gauche en ruine sur les plans de la pensée critique, des modes d’organisation, des pratiques politiques émancipatrices et du projet. Et il faudrait le faire en même temps, sans sacrifier le moyen terme à l’urgence ou l’urgence au moyen terme. Dans ce contexte, pourquoi ne pas prendre pour une fois vraiment au sérieux, et pas seulement dans des rhétoriques usagées pour estrades électoralistes, les intelligences populaires et citoyennes  ? Ne pourrait-on pas prioritairement mobiliser les forces militantes existantes pour stimuler l’expérimentation d’un autre chemin par le bas, à partir de la vie quotidienne, en mettant de côté les instrumentalisations partisanes et les hommes supposés « providentiels »  ? Est-ce que la grandeur humaniste d’une politique d’émancipation, ce n’est justement pas de se nourrir de la pluralité des expériences ordinaires afin de bâtir un cadre général partagé alternatif, et cela, dès le moment des résistances  ? Plutôt que d’imposer (pour les « chefs ») ou d’attendre (pour « la base ») des slogans, des programmes et des stratégies venant d’en haut. Un exemple de démarche possible  ? Travailler localement à l’émergence de marches de la dignité et de la diversité du peuple pour la justice sociale. Des marches susceptibles de converger sur le plan national et européen, avec des échos internationaux plus larges. Des expériences qui associeraient les aspirations individuelles à la dignité et le souci de justice sociale. "


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