Le vaisseau fantôme de François Hollande.

dimanche 24 avril 2022.
 

Les actes politiques qui ont entraîné la mort du PS comme porteur de l’idée socialiste sont nombreux.

Une succession de positions et d’actes politiques en rupture avec l’électorat de gauche.

En entérinant l’accord sur la flexibilité des salaires et d’emploi, en début d’année 2013, le gouvernement ouvre la porte de droite comme l’indiquait un article du journal l’Humanité du 15 janvier 2013 Mais la porte était déjà ouverte dès l’été 2012 avec une poursuite massive de l’expulsion des roms (voir ci-dessous)

Le discours de François Hollande sur France 2 le 28 mars 2013 ancre, sans ambiguïté, le cap d’une stratégie économique fondée sur l’austérité et une politique de l’offre, stratégie qui a pourtant été mise en échec à de multiples reprises dans différents pays depuis 30 ans.

Discours déconnecté des réalités sociales, comme l’explique alors Pierre-Laurent "Les mots de François Hollande sont restés totalement déconnectés des urgences sociales et des solutions nouvelles nécessaires. Rien de ce que nous avons entendu n’est de nature à rassurer les Françaises et les Français qui souffrent et ont plus que jamais besoin du changement pour lequel ils ont voté. Il a vanté l’accord sur l’emploi signé par le Medef et trois organisations syndicales minoritaires en continuant à masquer les graves reculs des droits sociaux qu’il contient. Alors que débute dans 4 jours à l’Assemblée nationale la discussion sur ce projet majeur, on attendait du Président qu’il s’explique ! Rien de cela. Résultat, on s’apprête à faciliter encore les licenciements alors que le niveau de chômage bat tous les records !

Puisque le Président de la République ne veut rien changer à sa politique, rien entendre de la colère qui monte, j’appelle, au nom du Parti Communiste Français et du Front de Gauche, les forces du changement à entrer massivement dans l’action pour exiger un changement de cap, pour dire stop aux politiques d’austérité, stop aux licenciements, stop à la casse du code du travail et des services publics."

Nombreux observateurs ont déduit de ce discours que Hollande était devenu centriste. Non, déjà après sa conférence de presse à l’Élysée du 13 novembre 2012, le journal de l’infra gauche, le Nouvel Observateur expliquait déjà : "Le jour où François Hollande est devenu centriste"

En fait, il ne s’agissait pas d’un brusque virage à droite mais de la continuité d’une trajectoire vers la droite, la ligne médiane étant alors franchie en mars 2013. C’est ainsi que Mediapart considère ce discours comme "un adieu à la gauche" terme aussi utilisé par la fédération des Alpes-Maritimes du PCF qui ajoutera aussi à cet adieu un "adieu au changement".

Presque d’une manière concomitante, un événement hautement significatif est survenu aussi le 28 mars : 150 salariés de PSA ont investi le hall du Medef, à Paris pacifiquement. Alors que les manifestants n’avaient fait aucune difficulté pour ressortir des locaux et n’avaient aucunement agressé les CRS, ceux-ci les obligèrent, après une longue attente, de pénétrer dans les cars pour obtenir leurs identités . Voir la vidéo de 8 minutes : En visionnant cette vidéo, n’importe quel lecteur comprendra alors qu’il est difficilement pensable de considérer que le pouvoir en place est un régime de gauche du fait qu’il n’y avait aucune nécessité à empêcher ces manifestants pacifistes et souvent âgés, de regagner tranquillement leur bus, aucune dégradation n’ayant été constatée, .

Mais ceci n’est qu’ un écho, certes plus faible, de l’action d’une brutalité injustifiable des forces de l’ordre lors de la manifestation des sidérurgistes Arcelor Metal du 6 février 2013 à Strasbourg où un manifestant a été grièvement blessé. Voir article dans la publication du PCOF (parti membre du front de gauche)

Prétextant de la manifestation contre le mariage pour tous qui dégénère à cause de groupuscules d’extrême droite, le gouvernement n’accepte pas l’amnistie sociale alors qu’il s’y était engagé. Jean-Luc Mélenchon a récemment expliqué dans l’émission de France 2 du 25 avril "des paroles et des actes" pourquoi cette décision du gouvernement était inadmissible (en début d’émission).

Remarquons que les violences de ces groupuscules se sont exprimés par des jets de pierres, de pavés, de barres de fer, de bouteilles ayant même conduit à l’hospitalisation d’un commissaire de police. D’autre part plusieurs journalistes ont été agressés physiquement. Tout cela se serait accompagné de seulement 12 interpellations, selon la presse, alors que plusieurs dizaines, voire centaines d’individus ont participé à ces violences. Il semble apparaître ainsi une certaine asymétrie entre la répression contre les manifestants syndicalistes et ouvriers ayant perdu leur emploi et la répression des groupuscules violents ayant fait dégénérer la manifestation contre le mariage pour tous. Si cette asymétrie était vraiment établie, les électeurs et les élus de gauche devraient en tirer toutes les conséquences.

Alors que François Hollande avait promis dans unelettre adressée au Collectif National Droits de l’Homme Romeurope, lors de la campagne présidentielle, qu’il n’y aurait plus d’expulsions de Roms, le processus entamé par Sarkozy n’a pas seulement été stoppé mais a été amplifié en de multiples endroits du territoire. et ce, notamment, dès le milieu de l’été 2012 dernier, en une période où les mobilisations de contestation sont beaucoup plus difficiles

D’autre part, le droit européen dont une circulaire d’août 2012 sur le démantèlement des camps, impose des dispositions d’accompagnement, en amont et en aval des expulsions. ces dispositions n’ont pas été respectées, comme le rappelle par exemple les avocats d’une douzaine de familles de Roms lors d’une audience au tribunal administratif de Lyonle 3 avril 2013 remettant en cause la décision du préfet du Rhône.

D’ailleurs le syndicat national de la magistrature a rappelé cette obligation dans un communiqué de presse.

D’autre part la loi Besson pour l’accueil des gens du voyage n’est toujours pas appliquée.Le webzine Rue 89 a d’ailleurs publié la carte des villes hors-la-loi.

Bref cette accumulation de promesses non tenues, la poursuite des mesures d’exclusion, la signature de l’accord favorable au Medef, l’enfermement suicidaire dans une politique d’austérité sont l’expression d’une dérive droitière conduit à considérer le parti socialiste comme n’étant plus un parti représentatif de la gauche, contrairement à ce que répète journellement les médias, mais plutôt comme un parti de droite, celui de la droite complexée pour reprendre un terme de Frédéric Lordon dans un billet de son blog.

Hollande et son vaisseau fantôme.

Le PS n’est plus qu’un vaisseau fantôme, tel le légendaire "Hollandais volant"(appelé aussi voltigeur hollandais) dérivant et attiré par des courants de plus en plus noirs et glauques. Triste navire dont la coque est rongée par plus de 30 ans de funeste navigation en mer libérale, voiles déchirées par des pluies acides que Sainte Cécile ne peut juguler et dont les mâts sont vermoulus par les termites du libéralisme L’homme de barre, Bartolone, dont la compétence de navigation n’est pas ici en cause puisqu’il est capable de détecter une tempête dans un verre d’eau, , n’arrive plus à maintenir le cap du hollandais volant qui vogue hors flot et même hors Duflot. Il perd de sa voix et sa voie. Les galériens ne rament plus en rythme et s’épuisent. Ils ne leur reste que l’espoir de rejoindre le continent perdu de l’Atlantide, outre-Atlantique, englouti par sa dette planétaire.

Il ne subsiste plus pour le PS que quelques problèmes sociétaux -comme celui du mariage pour tous lui permettant de donner l’illusion qu’il est encore un parti de gauche. Mais même sur cette problématique, la ligne de démarcation n’est pas si nette que cela, car certains électeurs de droite sont pour le mariage pour tous et certains électeurs de gauche sont contre.

La gauche, c’est le Front de gauche.

Il ne reste donc plus finalement qu’une seule force de gauche significative en France : le Front de gauche, et celui-ci ne constitue pas "l’extrême gauche" comme veut le faire croire l’ensemble des autres partis et les médias, mais tout simplement la gauche, la seule qui subsiste.

Le mythe de l’extrémisme.

Peut-on considérer comme des positions extrémistes de gauche le fait d’accepter une hiérarchie de salaire de 1 à 20 ? Extrémiste de limiter les revenus mensuels à 30 000 € ? Extrémiste comme de faire coexister,
- d’une part un secteur public qui ne se réduit pas à quelques grosses entreprises nationalisées mais qui se décline sous différentes formes de collectivités publiques sociales et solidaires
- et d’autre part un secteur privé opérant dans un marché régulé ou les salariés des entreprises ne soient pas de simples agents économiques de production mais aussi des citoyens ? Extrémiste de vouloir mettre un terme à ce que la finance règne en maître et asservisse les états ? Qui sont donc les extrémistes ? Ceux-là mêmes qui accusent le FdG de l’être pour mieux masquer leur véritable nature d’intégristes ultralibéraux ! L’extrême gauche existe : elle est constituée notamment de Lutte Ouvrière et du Nouveau Parti Anticapitaliste, du moins à ce jour (pour ne citer que les groupes qui se présentent aux élections).

Que ceux qui considèrent les positions économiques et sociales du Front de gauche comme étant extrémistes, notamment les catholiques, fassent l’effort de lire l’encyclique sociale du Vatican de 2009 Caritas in Veritate qui définit la politique sociale de l’Eglise , (notamment chapitre 2 à 4). Alors, ils constateront qu’elles sont à peu près identiques ou très proches à celles contenues dans le programme l’Humain d’abord. (j’exclus évidemment ici les questions sociétales comme celles de l’avortement, de la contraception, du mariage entre personnes de même sexe qui sont les arbres qui cachent la forêt conformément à une stratégie médiatique bien huilée).Pour le lecteur qui en douterait, ce qui est fort compréhensible, il lui est facile de le vérifier par lui-même en comparant les contenus thème par thème.

Non, la gauche n’est pas le PS, c’est le Front de gauche ! Et une gauche capable de rassembler très largement tous ceux et celles qui veulent replacer l’Humain au centre et mettre la finance hors-jeu.

Il existe donc maintenant quatre grandes composantes de droite : la droite dure : le FN et l’UMP ; la droite molle : le PS-EELV et le Centre.

Quand soufflera la tempête, il sera facile de prévoir la nouvelle reconfiguration politique : une partie du PS et de EELV rejoindront le FdG ; une autre partie du PS fusionnera avec le centre pour donner, par exemple, le parti démocrate français (PDF) ; la majorité de l’UMP fusionnera avec le FN pour donner le parti national populaire (PNP) ou encore le nouveau parti capitaliste (NPC) , une partie minoritaire de l’UMP rejoindra le PDF.

Voilà quelles seront les conséquences politiques de l’orientation droitière du PS si elle se confirme irréversiblement. Devant une telle situation tendancielle, il existe deux sensibilité au Front de gauche : l’une considère que l’on peut stopper cette dérive est remorqur le PS à gauche, et l’autre considère que c’est peine perdue car le PS est mort en ayant perdu son identité socialiste. (non par ses discours, mais par l’ensemble des actes qu’il a posés). La marche du 5 mai 2013 pourra-t-elle créer et une vague de fonds capable de réorienter le vaisseau vers des eaux plus claires ? Mais peut-être vaut-il mieux compter sur le vaisseau neuf du FdG dont le cap est clairement fixé que sur un vaisseau fantôme errant au gré des cours de la bourse.

Hervé Debonrivage

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