Le 5 mai, donnons de l’air !

vendredi 19 avril 2013.
 

L’actuelle Constitution est née en un temps que les moins de 70 ans ne peuvent pas connaître. La France en ce temps-là comptait 80% d’une génération sans bac, un quart des jeunes de 14 ans au travail, 25% de la population active employée dans l’agriculture, trois chaînes de radio et une seule de télévision (contre trois aujourd’hui en Corée du Nord). Cette année-là, en 1958, les femmes mariées ne pouvaient pas travailler sans l’autorisation de leur époux, Internet et l’actuelle Union Européenne n’existaient pas.

Pourtant nous vivons toujours sous la Constitution de 58. Pourquoi ? Pas en raison de l’adhésion du peuple. L’abstention ne cesse de croître. Ce mouvement de boycott des urnes s’inversa une seule fois, en 2005, pour contester les forces dominantes en votant « non » au projet de Constitution européenne. La Cinquième République doit plutôt sa durée aux efforts constants de la Cour qui y fait bombance et à l’abondant clergé qui la célèbre. Car ce régime est devenu l’écrin douillet de l’oligarchie. La Cinquième, c’est l’irresponsabilité érigée en vertu, qui dégouline du président de la République sur la plupart des responsables publics et justifie la multiplication des autorités indépendantes. La Cinquième, c’est le peuple admis à se prononcer sur les politiques nationales une fois tous les cinq ans et à se faire sonder entre-temps. La Cinquième, c’est le régime qui permit la forfaiture du traité de Lisbonne violant le « non » de 2005 puis la ratification du TSCG contraire aux engagements du candidat Hollande. La Cinquième, c’est la colonisation des hautes sphères de l’État par les intérêts privés. La Cinquième, c’est le verrou de tout changement véritable remettant en cause la petite oligarchie installée qui défend avec acharnement un ordre social conforme aux intérêts de la finance.

Le passage à la Sixième République permettra de congédier l’armée des inamovibles et interchangeables qui se succèdent à eux-mêmes dans le cadre des institutions actuelles. C’est la condition de la reprise du pouvoir par le peuple. Nous défendions déjà dans le programme présidentiel et législatif l’Humain d’abord l’élection d’une Assemblée Constituante dans laquelle ne pourrait siéger aucun membre des actuels assemblées ni aucun candidat aux suivantes. Il lui reviendra de soumettre au peuple la nouvelle règle du jeu. Je suis convaincu que la Constitution nouvelle ne ressemblera à aucun des systèmes qui l’ont précédée. Car elle devra garantir la souveraineté du peuple dans un contexte radicalement neuf. L’intérêt général de notre époque autour duquel le très grand nombre doit se rassembler, c’est la réponse à l’urgence écologique. Or pour changer de modèle de production nous ne pourrons nous en remettre uniquement à des fonctionnaires chargés de faire appliquer les lois découlant de la planification écologique. Il faudra aussi des droits pour les salariés.

L’accélération du temps politique appelle également de nouveaux outils comme le referendum révocatoire pour assurer une souveraineté populaire continue. De même la Sixième république devra maîtriser la finance, notamment en imposant la séparation bancaire, régler enfin démocratiquement les rapports avec l’Union Européenne en soumettant tout transfert de souveraineté à l’accord du peuple, comme en Irlande, garantir la neutralité du Net, assurer la qualité de l’information et le pluralisme des médias… En comprimant la place reconnue au peuple, la Cinquième étouffe le pays, tue la créativité et le dévouement aux autres. Avec la Sixième, choisissons des habits neufs qui lui permettront enfin de respirer.

François Delapierre


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