Front de gauche : " La bataille des idées sur l’école reste à mener "

lundi 4 février 2013.
 

Entretien avec Choukri Ben Ayed, sociologue, et Gérard Aschieri, ancien dirigeant de la FSU, après la rencontre réussie du Front de Gauche à Saint-Denis. Enseignants, parents, élus ont débattu du projet de loi gouvernemental.

Quel bilan de cette initiative  ?

Choukri Ben Ayed. On a ressenti une forte demande de débat sur les questions de l’école. La déception face à la politique actuelle devient de plus en plus palpable et beaucoup constatent l’écart entre l’idéal éducatif porté par le Front de gauche et les mesures insuffisantes de la loi dite de «  refondation  ».

Gérard Aschieri. J’ai également été frappé par l’envie de débattre. Mais aussi par les témoignages sur la situation dramatique en Seine-Saint-Denis. Les inégalités y restent extrêmement fortes sans que l’on perçoive des perspectives d’amélioration.

Quelles analyses ont été faites du projet de «  refondation  »  ?

Choukri Ben Ayed. Depuis une vingtaine d’années, le système scolaire se fragmente et croule sous le poids des disparités. Le ministre dénonce ces évolutions mais, pour le moment, ce n’est que du discours. Rien n’est encore précisé sur la question cruciale de la sectorisation et donc de la mixité sociale et de l’égalité territoriale… C’est quand même préoccupant lorsqu’on prétend refonder l’école  ! Sur le fond, la loi Peillon n’est pas en rupture avec la période précédente. La politique «  Éclair  », notamment, et son idée d’un pilotage local des établissements, se poursuit alors même que l’on sait que ce type d’organisation produit de la concurrence et de la ségrégation.

Gérard Aschieri. Certes, la loi revient sur plusieurs mesures régressives et avance sur plusieurs points (fin des suppressions de postes, priorité au primaire, retour d’une formation des enseignants…). Mais cela ne va pas assez loin. Il n’y a pas d’objectif nouveau. Ainsi, la scolarité obligatoire, depuis 1959, reste fixée à seize ans… Le gouvernement refuse de la passer à dix-huit ans alors que cela formaliserait l’obligation de faire réussir tous les élèves et de lutter contre les inégalités. C’est, à mon sens, une des grandes faiblesses du projet. Et puis, certaines mesures votées en parallèle de la loi sur l’école sont inquiétantes. Le décret sur les rythmes scolaires, bien entendu, mais aussi l’acte III de la décentralisation avec des menaces sur l’orientation et la formation professionnelle.

Quelles sont les priorités du Front de gauche, désormais  ?

Choukri Ben Ayed. Les élus du Front de gauche vont mener bataille au Parlement, tandis que nous allons continuer à diffuser nos réflexions en organisant ce type de rencontre. Les municipalités, elles, devraient se saisir de la réforme des rythmes scolaires, qui va les mettre en porte à faux, pour initier des assises locales de l’éducation et associer les citoyens à la réflexion.

Gérard Aschieri. Au-delà de la bataille de propositions menée au Parlement, il faut mener une bataille d’idées. On a besoin de faire comprendre à la population que la lutte contre les inégalités scolaires concerne tout le monde et qu’accepter qu’une partie des enfants qui ne réussissent pas fait courir un risque à tous les élèves…

«  les urgences vont remonter  » Invité à conclure la soirée, Pierre Laurent a estimé, mercredi, que « la rupture dont on a besoin en matière d’ambition éducative n’était pas au rendez-vous » avec le projet de refondation de Vincent Peillon. Selon le secrétaire national du PCF, « les urgences vont remonter très vite à la surface car, pour l’instant, on est à peine dans la réparation de ce qui a été détruit auparavant ».

Entretien réalisé par Laurent Mouloud


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message