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Martine Billard députée et coprésidente du Parti de gauche, ouvre des alternatives pour favoriser le développement de l’emploi.
Le chômage en passe de franchir la barre des 10%. Comment réagissez-vous ?
Martine Billard. Ce n’est malheureusement pas une surprise. À partir du moment où toutes les politiques menées sont des politiques d’austérité et de réduction de la dépense publique, cela a des conséquences. Réduction d’emplois dans la fonction publique, réduction des dotations aux collectivités territoriales qui les amène à moins investir… tout cela conduit à une baisse d’activité et à une augmentation du chômage.
La majorité met cette situation sur le dos de la crise…
Martine Billard. La crise n’est pas la cause essentielle. Face à la crise, la réponse par l’austérité provoque du chômage. Les premières victimes sont les jeunes. Les CDD, pour ne pas parler des CDI, reculent. Les cinquantenaires trinquent aussi. Il y a un an, le gouvernement nous expliquait que la réforme des retraites permettrait de faire reculer le chômage des moins de soixante ans. Or il explose. Pire, beaucoup sont en fin de droits avant d’accéder à leur retraite. Il n’y a pas seulement augmentation du chômage mais aussi de la misère.
Cette situation résulte, pour vous, de choix politiques ?
Martine Billard. Nombre d’entreprises qui ont mis en œuvre des plans de licenciement ne sont pas en difficulté. Prenons Fralib, Still Montataire ou ArcelorMittal…, elles font des bénéfices, distribuent des dividendes à leurs actionnaires, délocalisent pour s’implanter là où les coûts de production sont moins chers car les salariés moins payés.
Une alternative existe-t-elle ?
Martine Billard. Oui. Immédiatement, par exemple, supprimons les exonérations des heures supplémentaires, qui coûtent 4 milliards d’euros par an, somme qui serait plus utile pour soutenir la création d’emplois, et ne crée aucun emploi supplémentaire puisque ce sont les salariés déjà dans l’emploi qui peuvent travailler plus. Les chômeurs, eux, restant chômeurs. Autre exemple, le budget de l’État pour l’aide à l’emploi est en diminution. Ainsi les contrats aidés, qui ne sont pas une panacée mais peuvent permettre aux chômeurs de passer un cap et de se reconvertir, seront moins importants dans le budget 2012 qu’ils ne l’étaient en 2006. C’est dire.
Mais au-delà des mesures immédiates…
Martine Billard. Il faut réindustrialiser la France. C’est le secteur qui a le plus souffert. Relocaliser l’industrie près des lieux de consommation n’est pas pour nous, au Front de gauche, un choix nationaliste mais une question sociale et écologique. Il est absurde de diminuer le nombre de raffineries et ensuite de réimporter ; de même, autre exemple, fermer Still Montataire, la seule usine en France de chariots élévateurs… Il nous faut une politique d’aide à la réindustrialisation pour garder nos productions en France.
Peut-on mener une telle politique dans l’environnement européen ?
Martine Billard. C’est une question de volonté politique. Certes, les traités européens peuvent bloquer certaines politiques. Mais regardez l’Angleterre ou la Hongrie qui s’exonèrent, sans trop de conséquences pour eux, de certains traités pour mener des politiques plus libérales. La France pourrait décider demain de faire de même mais pour mettre en œuvre des politiques plus sociales et écologiques. Ce qui aurait des conséquences positives pour le pays.
Entretien réalisé par Max Staat, L’Humanité
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