Clémentine Autain. « Il y aura un avant et un après l’affaire DSK »

dimanche 13 novembre 2011.
 

Quelle est votre réaction à la décision d’abandonner 
les poursuites pénales contre DSK  ?

Clémentine Autain (Animatrice de la Fédération pour une alternative sociale et écologique Fase) C’est une mauvaise nouvelle car, quelle que soit la réalité des faits, justice ne sera pas faite. Si DSK est innocent, le soupçon subsiste. Si Nafissatou Diallo 
a dit vrai, un viol reste impuni. Les raisons de cet abandon tiennent pour l’essentiel aux mécanismes judiciaires américains. Je craignais depuis le départ que nous ne sachions jamais ce qu’il s’est réellement passé dans la suite new-yorkaise. Le viol est un crime difficile à établir car les preuves matérielles font généralement défaut. C’est souvent parole contre parole. Même si la relation sexuelle est avérée, il n’est pas facile de prouver le non-consentement 
de la victime. C’est l’une des raisons pour lesquelles 
de nombreuses femmes violées ne portent pas plainte. Or, 
il y a infiniment plus de violeurs qui dorment tranquilles que de femmes qui déposent plainte pour un viol imaginaire.

Comment réagissez-vous aux commentaires 
au sein de la gauche, particulièrement du PS  ?

Clémentine Autain. Je ne comprends pas cette communion de soulagement validant l’idée d’un DSK blanchi 
par la justice. Depuis le début de l’affaire, la plupart des leaders socialistes ont réagi avec deux poids deux mesures. Ils ont d’abord défendu l’homme, l’ami, 
le camarade, sans avoir de mots pour la plaignante. Ils n’ont pas, ou très peu, trouvé les mots pour contribuer à envoyer un message contre les violences faites aux femmes. Notre responsabilité était de savoir dépasser 
le cas précis de DSK, dont seulement deux protagonistes connaissent la réalité, pour prendre en considération 
ce dont il était question  : le viol. Si le féminisme imprégnait sérieusement ce grand parti politique, les commentaires de ses principaux dirigeants auraient été d’une tout autre teneur. Cette séquence aura révélé un impensé ou un mal-pensé au PS sur la domination masculine, ses ressorts, son ampleur, ses modes de reproduction.

Cette décision peut-elle créer en France un retournement de situation sur le regard que porte la société 
sur les violences à l’égard des femmes  ?

Clémentine Autain. Je ne veux pas le croire. Il y aura un avant et un après l’affaire DSK parce qu’une chape de plomb s’est soulevée. Les violences faites aux femmes sont sorties du tabou. Au bureau, entre amis, en famille, nous avons parlé du viol et du machisme. Bien sûr, la contre-offensive s’est fait entendre. La confrontation politique est ouverte. C’est infiniment mieux que de tenir les violences faites aux femmes et le sexisme à distance du social et du politique, dans le pré carré de la vie privée et de l’intime.

Entretien réalisé par Mina Kaci, L’Humanité


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