Affaire DSK : Quelle que soit l’issue judiciaire, l’onde de choc ira bien au-delà des primaires du PS

vendredi 27 mai 2011.
 

Ce qui s’est passé dans la suite de l’hôtel new-yorkais où résidait Strauss-Kahn relève non de la politique mais de la justice. Car c’est d’une accusation de crime qu’il s’agit. Avec, si celui-ci est établi, un coupable mais aussi une victime. Il faut hélas le rappeler puisque les premières réactions à cette nouvelle n’ont fait aucun cas de la femme de chambre. Nous devons donc résister sans faiblesse aux incitations médiatiques déchaînées, ne parler que de ce qui nous concerne et pour commencer, de ce que nous savons. Hélas pour les amateurs de scandales, que l’on cherchera vainement au microscope parmi les lecteurs assidus de A Gauche, nous ne savons rien d’éventuels faits criminels, et dans l’hypothèse contraire c’est à la justice que nous les destinerions.

Ce que nous savons en revanche c’est que les commentateurs qui nous pressent de nous exprimer sans tarder sur les conséquences de « l’affaire DSK » sur la vie politique française se méprennent sur l’ampleur de celles-ci. Les primaires du PS en seraient bouleversées, soulignent-t-ils. Bien observé ! Mais un peu court. Quelle que soit l’issue judiciaire, l’onde de choc ira bien au-delà de ce dérisoire château de cartes. Le régime agonise de toutes parts. Les héros d’hier riment désormais aux yeux du grand nombre avec salauds… ou complot. Quelle que soit la version choisie, l’échelle des mérites officiels est à terre. La trame des représentations dominantes est retournée. Rien ne le dit mieux que cette Une du Nouvel Observateur qui crie « ils ont tout » et choisit d’illustrer ce numéro contre l’oligarchie (sic) par une Rolls-Royce avec Marianne en proue et une cocarde de parlementaire.

« Il incarne le populisme d’extrème-gauche » avait marmotté Huchon pour juger Mélenchon « pire que Le Pen ». Que pensera-t-il de ce populisme de centre gauche ? Mais surtout cette charge contre l’oligarchie était censée viser uniquement le voyant et vulgaire Sarkozy, les parvenus davantage que les biens nés. Or elle semble aujourd’hui dénoncer DSK, l’autre candidat de l’oligarchie, celle des sondages et des grands médias, des patrons prudents désireux de se couvrir en cas de chute de leur candidat naturel comme on se protège en Bourse de la défaillance d’un débiteur par un CDS. Ce n’est donc pas seulement le PS qui est orphelin mais tout le système de domination idéologique qui espérait se débarrasser du danger de révolution qu’il sent roder (nous sommes en 1788 titre l’éditorialiste du Nouvel Obs) en promouvant une gauche FMIsée.

A propos du FMI, il faut aussi mesurer l’impact international de cette affaire. Là encore le regard médiatique opère une sélection des angles et des faits. La question qui taraude la presse se résume à la réaction des marchés financiers. Le regard gagnerait à embrasser celle des peuples. Car c’est en vantant la science du Docteur Strauss-Kahn que les gouvernements des Etats européens tombés entre les griffes du FMI ont justifié leurs plans d’austérité. La plaisanterie à la mode en Grèce est que la femme de chambre est la première personne à avoir résisté au directeur du FMI. Cet humour grinçant peut en rester au stade de l’exutoire. Il peut aussi nourrir le sentiment de l’illégitimité de cette institution et par extension de ceux qui en font leur référence. La physique moderne nous enseigne qu’un système complexe devenu instable (plus exactement métastable) est sensible à « l’effet papillon » : une infime variation des conditions initiales peut bouleverser sa course.


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