Dans les coulisses et devant l’écran de l’émission de Drucker invitant Mélenchon

samedi 13 novembre 2010.
 

Quand la principale figure du PG est invitée à l’une des émissions les plus regardées, ce n’est pas une mince affaire pour tous les militants comme moi. Je ne peux prétendre l’inverse. La difficulté vient ici du fait que c’est un homme qui est invité, et non une organisation. Certes, l’un se confond avec l’autre, mais le danger est là. Est-ce que parler de l’un revient réellement à présenter l’autre ? Pas sûr. Je ne découvre rien, c’est le propre de la médiatisation de notre époque. Je le sais. Mais, je sais aussi que le premier intéressé ne prend pas cette tension à la légère.

Ainsi donc, Jean-Luc Mélenchon, mon camarade, le Président du Parti de Gauche, était invité aujourd’hui à Vivement dimanche présenté par Michel Drucker, émission des plus regardées. Je sais que Jean-Luc a préparé tout cela avec sérieux depuis plusieurs mois. Immédiatement, il a mesuré la difficulté de l’exercice. J’évacue de suite une question. Devait-il y aller ? Selon moi, bien sûr que oui. Pourquoi aurait-il dû refuser ? Car Jean-Luc et le PG critiquent les médias ? La belle affaire. Mais, précisément, cette critique nous la portons sans complexe dans les médias, sans quoi elle n’existe pas socialement. De plus, au risque de choquer certains de mes amis, je le dis : dans le paysage audiovisuel global, l’émission de Michel Drucker n’est pas ce qui se fait de pire, loin de là. Je m’explique. Empêche-t-elle l’invité de s’exprimer, en le forçant à répondre à des questions orientées en quelques secondes ? Non. En près de trois heures, elle permet généralement à l’inverse de prendre le temps de l’explication, de rentrer dans certains détails. Ce n’est pas si courant. Alors certes, l’émission s’intéresse essentiellement à la personne, mettant un peu de coté les idées, si l’on se laisse assoupir par le ronronnement souriant de l’animateur vedette. Mais, il reste à l’invité de rectifier, ou d’amplifier, cet angle de vue, selon son choix. Je considère que Jean-Luc a su, à tout moment, revenir dans le collectif et mettre à distance l’intime, le personnel, le privé. Les pages de sa vie personnelle, qu’il raconte lors de cette émission, sont des pages d’histoire collective : l’indépendance du Maroc et de l’Algérie, Mai 68, l’Union de la Gauche, les débats au sein du PS, la campagne pour le Non au TCE en 2005, etc… et le parcours individuel de « l’homme Mélenchon » (même à la place modeste où il a pu parfois y participer) est un éclairage apporté à ces évènements qui évoque des souvenirs personnels à des milliers de gens.

Donc, pour moi oui, pas de débat, Jean-Luc Mélenchon n’a rien « renié » en acceptant l’invitation de Drucker : il y a assumé toutes ses responsabilités en y défendant nos idées devant plusieurs millions de personnes.

Cette émission je l’ai donc vécue de deux façons. D’abord, dans les coulisses, dès mercredi 3 novembre, où j’ai eu le privilège de faire partie des camarades qui l’ont accompagné lors de l’enregistrement. Nous étions convoqués dès 13h30 pour nous retrouver au célèbre Studio Gabriel, non loin des Champs-Elysées, nous en sommes sortis à 21h ! Ce fut long, très long. Dans les couloirs, pour passer le temps et par bravade, nous avons même entonné une internationale hilare ! Nous occupions les premiers rangs, mais un autre public de spectateurs venus de province en bus, pour voir « Monsieur Drucker » étaient là aussi. Jean-Luc pour l’essentiel a su se faire adopter par eux. Je dois avouer que moi aussi, petit provincial « monté » à Paris, je me suis senti très proche de ces gens, et de leur démarche. Je vais d’ailleurs faire un aveu qui paraîtra ridicule pour certains. En entrant sur le plateau, j’ai eu la gorge un peu nouée devant le célèbre canapé rouge à l’idée que l’un des nôtres, allait s’y retrouver dans quelques instants, puis être vu par des millions de téléspectateurs. L’incroyable parcours de l’un, rejaillissait quelques secondes sur tous ceux qui étaient venus pour l’entourer. Une sorte de fierté, une façon de pouvoir dire plus tard à ses amis : « J’y étais ».

Ce marathon filmé éprouvant, je l’ai vécu assis sans rien faire, mais Jean-Luc lui, l’a parcouru à un rythme ahurissant, et dans lequel à chaque seconde, sans possibilité de pause, il devait rester vigilant. La tension était parfois palpable sur le plateau. Puis, j’ai aussi (re)vécu l’émission cet après midi comme spectateur. J’avais besoin de ce recul pour avoir une opinion précise du résultat. Me voilà rassuré. Je considère à la regarder cette fois-ci comme téléspectateur, que la première partie est une réussite indiscutable. Je crois que des millions de spectateurs ont vu dans Jean-Luc et dans son engagement militant, autre chose que cette sorte de triste Cyrano de Bergerac déclamant « Et bien oui, c’est mon vice, déplaire est mon plaisir, j’aime qu’on me haïsse… » , dans lequel quelques journalistes stars en guerre contre lui, voudraient le caricaturer. Non, Jean-Luc c’est du rire, de l’enthousiasme permanent, du courage militant, et une empathie permanente pour le peuple « populaire ». Je crois que cette émission l’a montré ou démontré. De plus, et je l’ai déjà écrit plusieurs fois sur ce blog : pour moi Jean-Luc Mélenchon, c’est un intellectuel en politique. Pour militer à ses cotés depuis près de 15 ans, je pense avoir une certaine légitimité pour l’écrire. Jean-Luc n’est pas un homme de spectacle, c’est un homme de lecture et d’écriture d’abord et avant tout. C’est un amoureux des lettres, des beaux textes. C’est un manipulateur d’idées… et c’est un homme qui les défend, face à l’adversité, avec ténacité, coûte que coûte, même si c’est dur. Je pense que cela s’est vu lors de l’émission.

Dans la furia de cette bataille pour un autre monde, pour un autre avenir, Jean-Luc cogne c’est vrai. Mais, l’adversaire aussi envoie ses coups, et ceux-là aussi font mal. « Le réel, c’est quand on se cogne » disait le psychanalyste Jacques Lacan. Et, nous sommes tous au PG, des militants du réel, de la radicalité concrète, nous voulons vraiment changer les choses.

Je fais une parenthèse. Beaucoup des insultes qui visent Jean-Luc font mal. Malgré un cuir solide, je sais qu’il n’est pas insensible à cette mitraille. Qui, pourrait encaisser sans broncher de se faire traiter de « pire que Le Pen » comme vient de le dire le Président socialiste de la Région Ile de France, Jean-Paul Huchon ? Moi, qui peut être affecté pendant plusieurs nuits par un SMS de reproches envoyé par un camarade, j’aurais du mal à essuyer pareille injure. Pire que Jean-Marie Le Pen, Mélenchon et le PG ? Minable propos qui ne peut être porté que par un ignorant irresponsable. Est-ce à dire que lors d’un second tour entre Le Pen et Mélenchon, M. Huchon choisirait Le Pen ? On touche ici l’absurdité d’une telle déclaration. Son auteur n’en croit pas un mot, mais il veut faire mal et salir. Nous sommes donc sur un champ de bataille, où l’émission de Drucker n’est pas le pire moment. Je dois dire que ce fut assez fou de découvrir que des artistes comme Francis Cabrel, faisant un jeu de mot sur une possible "présidence" pour Jean-Luc au lieu de présence, ou un Ivan le Bolloch toujours fidèle, n’hésitaient pas à déclarer une certaine synmpathie par nos idées et pour lui en particulier. Comment enfin ne pas être grisé par les propos du journaliste de Marianne, Nicolas Domenach, prévoyant un "possible score à deux chiffres" si Jean-Luc Mélenchon était candidat à la présidentielle. Tout cela bien sûr n’est possible que dans le cadre du Front de Gauche et en particulier dans un accord avec nos amis communistes. La venue de Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, fut aussi un moment fort de cette après midi. Le Front de Gauche c’est l’avenir. Sans lui rien n’est possible a bien expliqué Pierre. Message reçu camarade.

La seconde partie illustre malgré tout qu’aucun passage télévisé de Jean-Luc Mélenchon n’est totalement une partie de campagne. Avec un sourire irréprochable, M. Claude Sérillon, lors de la deuxième partie a balancé quelques peaux de bananes. Il sous entend que Jean-Luc Mélenchon accorderait peu d’importance aux droits de l’homme… au nom du fait que nous refusons de nous aligner sur la toute puissance des Etats-Unis et que nous sommes favorables à des relations économiques avec la Chine sans en demander l’autorisation aux dirigeants de « l’Empire ». A l’heure où l’on parle de Mme. Christine Lagarde comme possible future Ministre des Affaires étrangères, je demande à chacun de réfléchir à tout cela. Cette dame est connue pour être une « pro-américaine » militante. Elle a dirigé un des plus grands cabinets d’affaires américains. Peut-on lui faire confiance pour bâtir une diplomatie non alignée sur le géant américain ? Difficile à croire. C’est pourtant un des enjeux de la période. C’est cela que nous voulons pointer. Mais, nous n’avons aucune leçon à recevoir en matière de Droits de l’Homme, nous, les républicains de gauche intransigeants. Nous, qui réclamons sans relâche la liberté syndicale pour les travailleurs chinois. Et, je dois dire que c’est assez irritant de se faire ainsi présenter comme complaisant avec ce que nous avons toujours combattu : le libéralisme sauvage. Puis, viendra une attaque de Jean-Pierre Coffe. Sur le plateau, elle fut brutale et électrisa un instant l’assistance. Jean-Luc s’en est sorti avec Maestria, et l’agresseur arroseur, finira arrosé. Mais, cette charge demandant à Jean-Luc d’être moins brutal, venant d’un homme connu pour son langage fleuri et ayant l’insulte facile était assez sidérante (cf. ce lien pour mémoire ).

Les hommes font l’Histoire, mais ils ne savent pas l’Histoire qu’ils font. Il reste à constater dans les jours qui viennent les effets de cette émission. Jean-Luc Mélenchon a-t-il réussi le « test Drucker » ? Je crois que oui. S’est-il fourvoyé ? A-t-il été dompté par l’animateur le plus célèbre de France 2 et ses complices ? Ce n’est pas mon opinion. Je pense même que cette émission a fait éclater toute l’énergie entrainante contenue en cet homme.

Il nous reste en continuant le combat, à relire les vers de Rudyard Kipling :

« Si tu peux supporter d’entendre tes paroles,

travesties par des gueux pour exciter des sots,

et d’entendre mentir sur toi leurs bouches folles,

sans mentir toi-même d’un mot

si tu peux rester dignes en étant populaire…

(..) tu seras un homme mon fils. »

Nous essayerons.


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