L’Appel de Bobigny veut lancer un débat national sur l’éducation

lundi 15 novembre 2010.
 

A l’initiative du réseau des villes éducatrices, avec une quarantaine d’organisations d’enseignants, de parents, d’association périéducatives, de mouvements pédagogiques, de lycéens et d’étudiants, l’Appel de Bobigny veut mettre l’éducation au centre du débat des présidentielles.

"Il n’y a pas de précédent historique", affirme l’historien de l’éducation Claude Lelièvre. "Ni par le nombre de participants, ni par la forme non revendicative mais prospective, ni par la méthode de travail" lors de son élaboration. Ce monument c’est l’Appel de Bobigny, une série de propositions élaborées sur 3 ans par une quarantaine d’organisations en lien avec l’Ecole qui était présentée mardi 19 octobre à l’Hôtel de Ville de Paris.

C’est tout le champ éducatif qui est représenté.

Mis en route par le réseau des villes éducatrices, un mouvement qui réunit environ 80 municipalités et qui est présidé par Yves Fournel, l’Appel de Bobigny est co-signé par tout ce qui compte en matière éducative. Il y a des représentants des collectivités locales, comme l’Andev ou le RFVE, les syndicats d’enseignants (FSu, Unsa, Cfdt),les parents de la Fcpe, les lycéens de l’Unl et les étudiants de lUnef. Mais aussi les associations complémentaires de l’école (Afev, Dei, Céméa, Prisme, Pep, Aroeven, la Ligue de l’enseignement etc.) et les mouvements pédagogiques (Gfen, Crap, Icem, etc.). Tous ont travaillé plusieurs années pour construire cette plate-forme qui n’est pas un catalogue de revendications mais plutôt un éventail de propositions et de questions.

"Ce n’est pas une liste de revendications, une compilation", confirme Yves Fournel. "C’est des valeurs, des méthodes, une identification des changements nécessaires. L’appel veut "un grand projet national pour l’enfance et la jeunesse". Elle demande "quelle place et quels moyens veut-on donner à l’éducation dans notre pays ? Quel citoyen veut-on préparer". Des questions qui renvoient évidemment aux débats à venir des présidentielles.

L’Appel fixe 5 priorités et 18 propositions.

Il demande une "loi d’orientation et de programmation pluriannuelle pour l’enfance et la jeunesse". Il s’agit de garantir le droit à l’éducation pour tous, et donc de garantir une équité effective et non "l’égalité des chances". Il veut promouvoir "la coopération de tous les acteurs", "mobiliser les ressources des territoires et d el’école", "définir un projet éducatif global ambitieux".

Mais les partenaires de l’appel ont décliné cela en quelques points plus concrets. D4abord pour les 0 à 6 ans, qui sont vraiment prioritaires dans la perspective de l’appel. Il demande la création d’un service public de la petite enfance, reliant différents acteurs associatifs et publics, doté d’une charte à valeur réglementaire. L’Appel estime qu’il est possible de créer 300 000 places supplémentaires pour ces petits enfants en réutilisant les crédits des aides publiques existantes.

Autre grand objectif : celui des résultats.

L’Appel revendique 0 sorties sans qualification reconnue, 50% d’une tranche d’âge diplômée du supérieur. Il souhaite aussi modifier profondément l’Ecole. Il n’esquive pas la question des rythmes scolaires mais revendique d’appliquer les recommandations de l’Académie de médecine avec une semaine de 5 jours au primaire. Dans le secondaire il demande une réforme de l’évaluation, la fin des redoublements, la démocratisation du lycée. Enfin il adopte systématiquement une vue intégratrice, associant les collectivités locales et les associations au travail éducatif.

Quelles suites ?

Loin d’être le premier ou le seul appel sur l’éducation, l’Appel de Bobigny veut apparaître comme un levier du débat politique. "On veut imposer un débat national sur l’éducation", avoue Yves Fournel qui souligne l’importance des acteurs impliqués dans ce projet. Une discussion qui ne soit pas réservée à la gauche. D’ailleurs Luc Chatel, à travers la ville de Chaumont dont il est maire, participe à l’Appel… Claude Lelièvre relève que déjà certaines propositions se retrouvent dans le nouveau projet socialiste pour l’Ecole. "L’appel donne des bases au débat", souligne Thierry Cadart (Sgen Cfdt). "Les difficultés du système éducatif pèsent lourdement dans les difficultés économiques de la France. L’Appel pose des questions brûlantes. Il donne au débat ses conditions de développement". C’est donc à vous maintenant d’y participer…

Par François Jarraud


APPEL DE BOBIGNY

VERS UN GRAND PROJET NATIONAL POUR L’ENFANCE ET LA JEUNESSE

Quelle place et quels moyens veut-on donner à l’éducation dans notre pays et en Europe ? Quel citoyen veut-on préparer ? Quelle capacité à vivre ensemble dans une société solidaire et plus juste voulons-nous forger ? Quelles connaissances, quels savoirs, quelles compétences et quelles qualifications seront indispensables aux jeunes pour cela ? Quelle place auront-ils dans la construction de leur propre avenir ?

Parents, jeunes, enseignants, universitaires, associations complémentaires de l’enseignement public et d’éducation populaire, professionnels des collectivités locales, élus locaux, professionnels de la petite enfance et responsables syndicaux, nous appelons à la mobilisation de tous autour de l’éducation et de la formation, dès la petite enfance et tout au long de la vie.

Au quotidien, nous travaillons, innovons, cherchons des solutions concrètes pour la réussite, l’épanouissement des enfants et l’émancipation des jeunes.

Cela représente une chance et des compétences, une énergie et une capacité d’initiatives à mobiliser, indispensables à tout changement. Malgré notre engagement sur le terrain, des inégalités territoriales, sociales et de genre, insupportables, subsistent dans l’accès aux savoirs et à la formation ! Nous les refusons !

Nous refusons aussi les reculs considérables qui sont annoncés.

Nous refusons le statu quo !

Nous refusons les querelles stériles opposant savoirs, compétences et méthodes, sur la hausse ou la baisse du niveau des élèves ou sur le refus de l’autorité.

Nous refusons la mise en concurrence comme perspective et le pari sur les logiques des rivalités individuelles et collectives.

Nous voulons activer, au contraire, toutes les coopérations et solidarités possibles.

Nous voulons et nous pouvons nous appuyer, pour le transformer, sur le service public laïque d’éducation de la maternelle à l’enseignement supérieur et sur ses personnels, sur le secteur de la petite enfance en pleine mutation vers un véritable service public. Nous voulons évaluer les expériences éducatives qui fonctionnent et les promouvoir.

Nous voulons et nous devons nous appuyer sur la mobilisation des parents dans une démarche de coéducation, sur tous les acteurs de l’éducation populaire, du champ culturel et sur les travailleurs sociaux, mais aussi sur les jeunes eux-mêmes.

Nous pouvons nous appuyer sur des communes, des départements et des régions assumant la priorité à l’éducation et engagés dans des démarches de “territoires apprenants” ou de “villes éducatrices” et mobiliser tous les acteurs du monde économique et leur potentiel de formation et d’insertion en relation avec le service public.

Le 21ème siècle sera celui de la combinaison de l’éducation formelle, informelle et non formelle, celui du développement des connaissances, des informations disponibles et des moyens de communication. S’ajoutant aux inégalités sociales, les premières inégalités seront celles de l’accès à toutes ces sources de culture et celles de l’appropriation de ces outils de communication.

La capacité à créer, à innover, à imaginer doit être favorisée dans les politiques nationales et locales d’éducation formelle et informelle, de culture et de soutien aux pratiques artistiques et sportives, d’information, de formation et de recherche, de soutien à la vie associative.

Le 21ème siècle sera celui du développement durable et nous affirmons l’urgence de la mise en oeuvre d’une éducation à l’environnement et au développement durable accessible à tous, permettant de s’impliquer dans la vie de son territoire et qui donne les moyens de prendre des initiatives et d’agir avec les autres.

Le 21ème siècle devra aussi être celui de la réconciliation entre perspectives individuelles et collectives, entre épanouissement personnel et intérêt général, entre diversité culturelle et unité, celui du renforcement de la démocratie et de la construction d’une société du mieux être, du mieux vivre.

Tout projet national pour l’éducation et la jeunesse devra intégrer ces données en partie nouvelles.

Il devra garantir le droit individuel à l’éducation, la formation et la sécurité professionnelle tout au long de la vie. Nous avons la responsabilité et le devoir de préparer progressivement les enfants et les jeunes à être des acteurs conscients, responsables et critiques de ces évolutions et de la construction de leur avenir. Nous avons la volonté de les consulter et les associer au sujet des projets qui les concernent.

Nous proposons donc une véritable politique publique de l’éducation à la hauteur des enjeux démocratiques du 21e siècle et nous appelons la Nation à se mobiliser pour les moyens de sa mise en oeuvre.

En effet la France est loin du compte pour la part du PIB consacrée à l’éducation et la jeunesse.

Nous proposons dans cet appel de Bobigny des perspectives concrètes et positives pour l’éducation, dès la petite enfance, autour de 5 objectifs prioritaires et d’un ensemble de propositions qui sont la base d’un grand projet national pour l’enfance et la jeunesse.

Garantir dans le respect de la laïcité le Droit à l’éducation pour chacun et pour tous et donc l’équité dans l’accès à l’éducation et la formation ; refuser toute discrimination, en dépassant le droit formel à l’égalité des chances.

Définir un projet éducatif global ambitieux pour l’enfance et la jeunesse sur tous les temps et les espaces éducatifs et sociaux articulant éducations formelle, informelle et non formelle, dans un processus de formation tout au long de la vie s’appuyant sur une formation initiale solide.

Promouvoir la coéducation, la coopération éducative de tous les acteurs, garantir la place et les droits des parents, des enfants et des jeunes. Mobiliser avec ce projet éducatif global toutes les ressources éducatives des territoires et de l’école, à travers l’articulation des objectifs nationaux avec les projets éducatifs des établissements d’enseignement et des institutions culturelles publiques, et ceux des territoires.

Garantir à tous les jeunes, à l’issue de la scolarité au collège, la maîtrise évaluée des éléments (connaissances, compétences, savoirêtre et savoir-faire) indispensables à l’accès et à la réussite dans les enseignements diversifiés du lycée et à l’objectif de 0 sortie du système éducatif sans qualification reconnue, à l’accès à la citoyenneté.

Nous voulons ainsi préparer l’avenir et contribuer à construire sur le plan national une perspective éducative globale qui fait défaut aujourd’hui. Nous lançons cet appel à la Nation et à ses responsables politiques pour un grand débat national et des engagements solennels avant les échéances nationales qui détermineront l’avenir.

Nous soumettons au débat cet ensemble de propositions transversales sur les enjeux majeurs, comme première contribution au projet national pour l’enfance et la jeunesse et à l’élaboration de la loi d’orientation et de programmation pluriannuelle indispensable à sa mise en oeuvre :

* Pour atteindre ces cinq objectifs prioritaires, nous demandons une véritable priorité à l’éducation reconnue dans une loi d’orientation et de programmation pluriannuelle pour l’enfance et la jeunesse.

Nous proposons ensemble la garantie du Droit à l’éducation pour chacun. C’est-à-dire, pour l’État, une obligation de moyens et de résultats de la maternelle à l’Université, avec l’objectif prioritaire de permettre l’accès de tous les jeunes aux connaissances, compétences, savoir-faire et savoir-être indispensables dans notre société de la connaissance.

Nous proposons que le principe d’équité guide toutes les décisions. Ceci nécessite des choix politiques en faveur des territoires et des jeunes subissant aujourd’hui des inégalités et des discriminations insupportables et en faveur de l’école et du collège.

Cela exige que l’État joue tout son rôle de garant de l’équité à travers des mécanismes de péréquation entre territoires et oriente d’abord les moyens supplémentaires vers l’école primaire et le collège.

Cela exige d’abord d’affirmer les missions et le développement sur l’ensemble du territoire d’un service public de la petite enfance. Dans ce cadre, l’école maternelle doit être confortée dans ses missions et sa spécificité, dès 2 ans pour les enfants dont les parents le souhaitent.

La transition avec les autres structures de la petite enfance, assurée notamment par des classes passerelles associant des professionnels de la petite enfance, des collectivités locales et de l’éducation nationale, doit être favorisée. La petite enfance doit être exclue du champ de la concurrence et de la mise en oeuvre de la directive européenne “services”. Une charte doit garantir la qualité et la dimension éducative de l’accueil de la petite enfance (cf. texte 0-6 ans : un enjeu de société).

Cela exige ensuite que l’école primaire et le collège permettent à chaque jeune de disposer à la fin du collège des éléments indispensables pour pouvoir choisir et construire son avenir et la poursuite de sa formation. En effet, le collège n’est pas une fin en soi. Et une place plus importante devra notamment être accordée à l’éducation artistique, l’éducation physique et sportive, l’éducation à la citoyenneté, l’enseignement des langues et la maîtrise des outils informatiques et de communication et de leurs usages, qui contribuent à la réussite et l’épanouissement de tous les enfants et qui constituent une part importante de la culture des jeunes. Pour cela, le travail en équipe, des formations initiale et continue rénovées pour tous les professionnels de l’école et en particulier les enseignants, la construction de projets éducatifs globaux sur tous les temps et espaces éducatifs de l’enfant, le respect de ses rythmes de vie et d’apprentissage sont indispensables.

Une attention particulière devra être accordée, avec la participation des parents, aux moments délicats de transitions, parfois vécues comme des ruptures – à l’entrée en maternelle, de la grande section au CP, du CM2 en 6e, de la troisième à la seconde – en réalisant des projets communs et des coopérations entre enseignants des écoles et des collèges, des modules de formation communs, des liaisons inter-cycles développées, un suivi et un soutien spécifiques pour les enfants en difficulté.

Pour améliorer les rythmes de vie et de travail des enfants et des jeunes, très rapidement il faut un cadre national, décliné dans les projets éducatifs de territoire et les projets éducatifs d’établissement. Il doit prendre en compte les préconisations de l’Académie de médecine à propos de l’école primaire. Il faut donc alléger la journée et adapter le travail scolaire aux temps favorables aux apprentissages, alterner et équilibrer dans la journée les différentes formes de regroupement, les différentes activités et disciplines, les formes de travail, garantir la pause méridienne, refuser la semaine actuelle de 4 jours et prioriser un rythme annuel alternant 7 semaines scolaires et 2 semaines complètes de vacances intermédiaires, définir un volume annuel d’heures d’enseignement. Ce cadre national doit préconiser l’articulation des temps éducatifs et sociaux, leur mise en cohérence et la coopération éducative de tous. La conférence nationale sur les rythmes, convoquée par le Ministère à l’initiative de partenaires des Assises, doit commencer par acter ce cadre national pour ne pas reporter les premières décisions. Elle doit permettre ensuite de travailler avec tous les acteurs concernés pour dépasser les conflits d’intérêts et définir les moyens de sa mise en oeuvre.

La définition et l’impulsion d’un véritable projet éducatif d’école ou d’établissement et d’équipe nécessitent l’implication et la coopération éducative de tous les adultes, professionnels et parents, partenaires associatifs de l’éducation populaire, du sport et de la culture du territoire, la logique de coéducation et l’évaluation partagée de ce projet. Les écoles primaires et les établissements devront prendre en compte ces objectifs et cette dynamique nouvelle dans leur structure et leur fonctionnement, dans le respect des cadres nationaux. Les enfants et les jeunes doivent être impliqués dans cette démarche. Un contrat de confiance entre la Nation et les professionnels de l’école, en premier lieu les enseignants, doit garantir leur autonomie professionnelle, définir leurs missions et leurs objectifs et les reconnaître dans la redéfinition de leurs services, incluant la formation continue, la recherche action et le travail en équipe dans le respect de leurs statuts nationaux et de leurs conditions de travail. Cela exige notamment de garantir une véritable formation initiale et continue des enseignants à la hauteur des enjeux. Ce n’est pas le cas de la réforme actuelle qu’il faudra remettre à plat. L’École est une institution de la République à la base du système éducatif et du Vivre ensemble et joue un rôle irremplaçable dans l’éducation formelle. Ses missions doivent être confortées dans le cadre d’un service public amélioré. Mais, elle ne peut pas tout faire et tout compenser. L’éducation et l’accès aux connaissances se jouent aussi en dehors de l’École. Il faut donc assurer la cohérence éducative entre tous les acteurs, y compris les parents, concernés par cette dynamique co-éducative. C’est pourquoi nous soutenons l’incitation au développement et la reconnaissance nationale par la loi des projets éducatifs de territoire, souples, coordonnés le plus souvent par la commune ou l’intercommunalité selon leur taille et leur capacité à mobiliser les ressources éducatives du territoire et tous les acteurs. Ils doivent s’articuler avec les projets des établissements et fonctionner sur la base d’un diagnostic partagé, de la coproduction du projet et de son évaluation régulière. Un fonds national de soutien et de péréquation, accompagné par la CNAF pour les temps “péri scolaires ” et “extra scolaires”, doit soutenir ce développement.

Les associations d’éducation populaire et complémentaires de l’école doivent donc voir leurs missions de service public et le respect de leurs projets propres reconnus dans la loi d’orientation et soutenus à travers des contrats d’objectifs et de moyens pluriannuels avec l’État et les collectivités. Ces missions doivent échapper à la mise en concurrence et à la marchandisation dans la mise en oeuvre de la directive européenne “services”.

Les parents sont tout à la fois les responsables légaux de l’éducation de leurs enfants, des usagers du service public d’éducation, des acteurs de la coéducation et de la vie de l’école, des citoyens qui ont leur mot à dire sur les objectifs et le fonctionnement du service public. Les parents ont un droit à l’information, à la participation aux décisions concernant leurs enfants, à leur représentation dans les instances de l’établissement, du projet éducatif de territoire et de tous les niveaux du système éducatif. Ces droits, individuels et collectifs doivent être reconnus par tous les acteurs de la communauté éducative au quotidien et à travers leurs associations représentatives.

C’est aussi pour les enfants et les adolescents un Droit individuel et collectif qui commence par l’accès sans discrimination au service public, à l’École publique du Vivre ensemble. Ce droit n’est pas garanti partout et pour tous aujourd’hui. C’est la première priorité de tout projet national pour l’éducation et la jeunesse. Cela passe aussi par le respect du principe de gratuité de la scolarité obligatoire. Il doit se traduire, dans la proximité du domicile, par des écoles et collèges de secteur dont le fonctionnement, les professionnels qualifiés, les équipements et les locaux, la vie quotidienne et les rythmes, le bien-être, le respect de la laïcité garantissent l’équité de traitement entre tous les enfants. Il passe à la fois par le maintien d’une sectorisation pour viser partout la mixité sociale, mais aussi et surtout par des garanties sur les conditions d’étude et de vie scolaire, par des modalités et des méthodes pédagogiques actives et diversifiées et prenant en compte un accompagnement individualisé en cas de difficultés, par une attitude de bienveillance et de respect mutuels avec les adultes, par la prise en charge à l’école du temps de travail personnel pour une véritable équité, une égalité réelle des droits. Cela concerne bien sûr les enfants et les jeunes en situation de handicap.

L’égalité des chances est basée sur un quiproquo. C’est un modèle de justice auquel on est très attaché en tant qu’individu, mais qui ne crée pas forcément une société « juste ». Si on développe l’égalité des chances uniquement pour accéder aux meilleurs établissements, on développe un modèle basé sur la compétition. Et dans les compétitions, il y a des vainqueurs et des vaincus. L’école républicaine doit être celle de l’égalité réelle des droits entre tous les élèves. Elle doit viser à la réussite de tous, dans un esprit de solidarité, de coopération et non de compétition. La question de l’évaluation des élèves doit être posée clairement, avec l’objectif d’améliorer la réussite de tous. L’évaluation doit valoriser les progrès, la réussite, l’engagement et l’effort plutôt que sanctionner l’échec. Elle doit prendre en compte l’erreur comme une étape de la construction du savoir. Cela nécessite une réflexion et un changement sur le sens et les modes d’évaluation, une formation adaptée des enseignants mais aussi une sensibilisation des familles. Cela exige de faire prévaloir l’organisation et la logique des cycles et donc d’en finir avec la logique des redoublements, en adaptant la durée de chaque cycle en prévoyant des modalités d’aide et d’accompagnement individualisés.

La loi a défini le triple objectif d’atteindre 0% de sortie sans qualification après 18 ans, d’amener 80% d’une classe d’âge au baccalauréat et de 50% au niveau licence. Nous lançons un appel solennel pour en finir avec les sorties sans qualification reconnue.

Après l’école primaire et le collège de la scolarité obligatoire, qui ne sont pas une fin en soi, les adolescents doivent se voir garantis la poursuite d’une formation de qualité, l’accès à l’enseignement supérieur ou à une qualification reconnue.

Cela exige d’abord la démocratisation du lycée après la massification des trente dernières années. Cela exige la refondation du lycée avec la diversification des durées et formes des séquences et la mise en cohérence, le rééquilibrage de toutes les disciplines, un véritable dispositif d’aide et d’accompagnement individualisés pour prévenir l’échec et éclairer les choix de l’orientation, l’adaptation des locaux et des espaces, tant au travail en groupes et en ateliers qu’au travail personnel. Cela exige le respect des rythmes de vie et d’apprentissage des jeunes et d’une véritable pause méridienne. Cela exige le refus d’une hiérarchie des filières et des savoirs et une revalorisation des enseignements technologiques et professionnels, ainsi que des passerelles garanties entre les filières. Cela suppose aussi d’ouvrir chaque lycée sur son territoire et d’en faire en dehors des horaires scolaires une maison de la culture et de l’éducation informelle et non formelle. Cela pose enfin la question de l’allongement et de la diversification après 16 ans de la scolarité obligatoire comme obligation de moyens de l’État et comme formalisation des objectifs de 80% au bac et 0% de sortie sans qualification reconnue.

Cela exige aussi la construction progressive d’une orientation ambitieuse et d’une éducation aux choix pour tous les jeunes et le refus des orientations précoces. Pour garantir une orientation construite avec le jeune et ses parents, le service public d’orientation doit être renforcé et garanti avec tous ses professionnels dans les lycées, les collèges et les CIO, sans le restreindre à l’usage d’internet et de bases de données. Il convient d’articuler ce service centré sur l’orientation des élèves et des étudiants avec le service centré sur la formation permanente, l’aide à l’insertion et la VAE, dans un grand service public de l’orientation tout au long de la vie. Il doit travailler avec toutes les instances et structures du service public de l’emploi et de la formation initiale et continue, du service public national et des services publics régionaux de formation professionnelle, avec les instances et structures paritaires. Cela exige que l’offre de formation des établissements d’un même bassin ne soit pas définie uniquement en fonction des besoins locaux et soit coordonnée pour équilibrer ensemble la carte scolaire de leur secteur, en relation avec les régions. Il est de la responsabilité du ministère de l’Éducation nationale de garantir un encadrement législatif et règlementaire de l’ensemble des formations initiales et en particulier de la formation en alternance et de l’apprentissage après 16 ans, la qualité des formations et le respect des droits des jeunes.

De plus, les jeunes seront tous confrontés à une évolution plus rapide des métiers et à une plus grande mobilité dans l’emploi et plus globalement à une évolution très rapide des connaissances et des sociétés. Cela exige d’anticiper sur l’articulation entre formation initiale solide et formation tout au long de la vie et de prévoir des modalités de reconnaissance dans les garanties collectives, de certification et d’évaluation des compétences et des acquis de la formation continue qui prolongent et complètent la certification initiale, mais aussi valident les acquis de l’expérience. Il s’agit ainsi de favoriser la promotion sociale et la sécurité professionnelle.

Dans cette perspective large de qualification permanente des personnes et du point du vue de l’emploi, l’idée d’un service public de formation professionnelle, unifié dans ses objectifs d’accès de tous et de chacun à la qualification et à la sécurisation des parcours, mais diversifié et partenarial dans ses modalités d’exercice, mérite à l’évidence d’être approfondie pour articuler service public national de formation professionnelle, services publics régionaux et dispositifs paritaires et de transition professionnelle.

Pour nous, ce projet concerne tous les citoyens.

À travers l’avenir de la jeunesse, c’est celui du pays qui se joue !

SIGNATAIRES

MEMBRES DU COMITÉ DE COORDINATION ET D’INITIATIVE

Association de la Fondation Etudiante pour la Ville (AFEV),

Association Nationale des Acteurs de la Réussite Educative (ANARE),

Association Nationale des Directeurs de l’Education des Villes (ANDEV),

ATD Quart Monde,

Centres d’entrainement aux Méthodes d’Education Active (Céméa),

Confédération Française Démocratique du Travail (CFDT),

Défense des Enfants Internationale (DEI) - France,

Fédération de l’Office Central de la Coopération à l’Ecole (OCCE),

Fédération des Conseils de Parents d’Elèves (FCPE),

Fédération nationale laïque de structures et d’activités éducatives, sociales et culturelles (Francas),

Fédération Syndicale Unitaire (FSU),

Fédération des Syndicats Généraux de l’Education Nationale et de la Recherche publique (SGEN-CFDT),

Fédération UNSA-Education,

Inter-Réseaux des professionnels du Développement Social Urbain (IRDSU),

Ligue de l’enseignement,

Réseau Français des Villes Educatrices (RFVE),

Syndicat des Enseignants (SE) UNSA,

Syndicat National Unitaire des Instituteurs, des Professeurs des écoles et PEGC (SNUipp),

Union Nationale des Syndicats Autonomes (UNSA).

LISTE DES SIGNATAIRES SUIVANTS (au 8 octobre 2010)

Association de la Promotion des Initiatives Sociales en Milieux Educatifs (PRISME),

Association pour favoriser l’égalité des chances à l’école (apfEE),

Cercle de Recherche et d’Action Pédagogiques (CRAP - Cahiers pédagogiques),

Comité pour les Relations Nationales et Internationales des Associations de Jeunesse et d’Education Populaire (CNAJEP),

Confédération Générale du Travail (CGT),

Fédération CFDT des syndicats de la formation et de l’enseignement privé (Fep-CFDT),

Fédération des Associations régionales des OEuvres Educatives et de Vacances de l’Education Nationale (AROEVEN),

Fédération des Délégués Départementaux de l’Education Nationale (DDEN),

Fédération des Pupilles de l’Enseignement Public (FGPEP),

Fédération Française des Maisons des Jeunes et de la Culture (FFMJC),

Fédération Léo Lagrange,

Fédération nationale des Centres Musicaux Ruraux (FNCMR),

Groupe Français d’Education Nouvelle (GFEN),

Institut Coopératif de l’Ecole Moderne (ICEM) - Pédagogie Freinet,

La Jeunesse au Plein Air (JPA),

Mouvement Rural de Jeunesse Chrétienne (MRJC),

Syndicat de l’Education Populaire (SEP) UNSA éducation,

Syndicat National de l’Education Physique (SNEP),

Syndicat Nationale des Enseignements de Second degré (SNES),

Syndicat National Unitaire de l’Enseignement Professionnel (SNUEP),

Union Nationale des Etudiants de France (UNEF),

Union Nationale Lycéenne (UNL),


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