Le Front de gauche lançait dimanche 10 janvier, à Paris, sa campagne des régionales (article de Marianne)

mardi 19 janvier 2010.
 

Quatre heures de meeting devant quatre mille personnes. Hier, au Palais des congrès de Paris, le Front de gauche lançait, en grand et en long, sa campagne des régionales. Quatre heures de discours et de flèches décochées à qui mieux mieux.

À Marie-George Buffet, les critiques contre Nicolas Sarkozy et « la bande du Fouquet’s » et les attaques contre « Marine Besson et Eric Le Pen » (sic) à qui « France 2 va donner encore cette semaine plus d’une heure d’antenne pour débattre de l’identité nationale ».

À Jean-Luc Mélenchon, les tacles assassins à destination de ses anciens camarades du Parti socialiste qui seraient frappés par un mal pas vraiment obscur, celui de « la grosse tête » : « Ils sont persuadés qu’ils vont gagner 30 régions sur 22 ! » Des anciens compagnons de route qu’il soupçonne de vouloir s’acoquiner avec le MoDem et finiront, selon lui, par offrir aux Français un « retour aux alliances pourries de la IVe République ».

Et pour tous les orateurs ou presque, un message délivré à ceux qui seraient tentés de glisser un bulletin Europe-écologie dans l’urne : l’écologie n’est rien sans volonté de « changement du système de production et d’échange ».

Tout le monde en prend pour son grade. Dans la salle, les militants enthousiastes se gargarisent de chaque bon mot. Pas de tabous donc. Même lorsqu’il s’agit d’évoquer la décision du NPA de ne pas être de « l’aventure Front de gauche » pour le scrutin de mars prochain. C’est Christian Picquet, ancien membre du parti anticapitaliste, porte-parole de Gauche unitaire et désormais tête de liste du Front en Midi-Pyrénées qui évoque le sujet : « Hélas, la direction du NPA n’est pas au rendez-vous. Nous éprouvons le regret et la tristesse de les voir s’enfermer dans l’impasse du “cavalier seul” ».

D’ailleurs, dans la salle, la tête de liste qui soulève le plus d’applaudissements lorsqu’elle apparaît sur le grand écran surplombant la vaste scène habillée de rouge n’est autre que René Revol, maire de Grabels et membre du Parti de gauche. En Languedoc-Roussillon, il conduira une liste incluant le NPA. Là, faire barrage à Georges Frêche est un impératif capable de faire sauter les plus solides réticences…

Pas de tabous donc. Tout le monde a droit à un mot : les adversaires tout désignés du Front de gauche comme ceux dont il se serait bien passé. Enfin, presque. Car même si selon les mots de François Delapierre, numéro 2 du Parti de gauche, les candidats du Front sont les représentants des « invisibles » (ces millions d’« ouvriers », d’« employés », de « retraités » que comptent le pays et dont les médias ne parlent jamais), il en existe d’autres d’« invisibles » que les orateurs se gardent bien d’évoquer à la tribune.

Qui ? Ces communistes qui ont décidé de pactiser avec le Parti socialiste, dès le premier tour de l’élection, en Basse-Normandie, Bourgogne, Bretagne, Champagne-Ardenne et Lorraine.

Cinq régions qui ont fait sécession quand lors du scrutin de juin 2009 le Front de gauche avait fait bloc. Cinq régions dont les résultats seront regardés à la loupe.

Cinq régions qui feront peut-être regretter à certains communistes d’avoir opté pour la stratégie séduisante mais périlleuse du Front de gauche.

Cinq régions, enfin, qui pourront mettre à mal l’avenir du principal artisan du Front de gauche : Jean-Luc Mélenchon. Pour lui, il n’y a pas d’alternative. Les listes de « l’autre gauche », comme il la nomme, doivent rencontrer le succès. Or, en laissant Laurent en tête de la liste du Front de gauche de la région Île-de-France, le chef du Parti de Gauche prend le risque d’une déconvenue qui peut menacer l’alliance entre PCF et PG. Si le score est modeste mais consistant, autour de 5-6%, il pourrait favoriser une candidature Mélenchon en 2012. Mais s’il est trop faible et que le PCF conforte ses positions dans les cinq régions qui ont choisi l’allliance avec le PS, alors c’est l’alliance avec le PG qui risque d’être remise en cause par les communistes. Bref, pour Jean-Luc Mélenchon, le scrutin régional a tout d’un véritable quitte ou double.

Pour l’heure, les militants, eux, sont plutôt optimistes. Tous ont à la bouche les sondages qui les créditent de 7% des suffrages quand, lors de la campagne des européennes, il leur était promis à l’origine seulement 2% des voix. Avec le résultat que l’on connaît…

Gérald Andrieu - Marianne | Lundi 11 Janvier 2010


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