Au cinéma ce soir : La Journée de la Jupe (avec Isabelle Adjani)

dimanche 29 mars 2009.
 

Si vous avez envie de passer une soirée inoubliable, alors ne loupez sous aucun prétexte, fût-il de toute première importance, ce film rare, que nous avons déjà vu en avant-première à la télé vendredi. Ça sort mercredi, ça s’appelle « La Journée de la Jupe » et s’il ne devait y avoir qu’une seule raison pour vous de vous offrir le ticket, ce serait celle-là : c’est LE retour d’Isabelle Adjani.

On a dit tout tout tout et son contraire sur cette actrice unique, qu’elle se la joue star, qu’elle apparaît, disparaît, revient, repart, et tout le reste aussi, ses amours, ses peines de cœur, ses colères, et au milieu de tout ça, on oublie souvent d’ajouter que c’est une comédienne extraordinaire, capable de tout jouer, la Reine Margot, et Adèle H, et Agnès, et Marie Stuart, et une petite gamine à qui Lino Ventura flanque une « Gifle » mémorable. Depuis l’Été meurtrier, on a vite su qu’elle est avant tout une grande tragédienne. La voilà revenue. Et on est plutôt content de voir qu’elle est toujours cette lumière et ce talent absolus.

C’est l’histoire d’une prof en galère, dans un collège en ZEP. Elle va essayer de faire jouer Molière à une classe, disons de troisième. J’en entends déjà, qui rétorquent : « Quoi ? Molière ? Pas étonnant qu’elle ait du mal… » C’est un peu comme ceux qui disent que la Princesse de Clèves, etc. etc. En tout cas, elle essaie. Parce que c’est son boulot, et qu’elle aime ça. Devant elle, la bande de loulous, pas trop motivés pour les belles lettres. Et puis, soudain, tout bascule. Comme dans un film. Et soudain, elle se transmute en preneuse d’otages. Le monde à l’envers, en somme. Depuis le temps qu’on nous raconte des histoires de gamins qui pètent les câbles, là c’est la prof qui…

En un rien de temps, l’essentiel est dit : la peur du prof dépassé par des gosses excessifs, la panique de la sacro-sainte Administration, le système qui part en vrille, le racket et le racisme et le sexisme aussi (d’où le titre, si juste) mais c’est pareil, en pire, les collègues trop sûrs d’eux, la bonne copine qui a tout compris, le mari qui ne sait pas aimer, mais qui aime pourtant, les parents assis sur leur bon droit, et ce fameux respect, dont tout le monde parle sans l’avoir beaucoup pratiqué.

Alors, bien sûr, des collèges, on en a vu d’autres, et même l’an dernier un qui a eu le prix à Cannes. Ici, on était un brin sceptiques, souvenez-vous, même si on est bon public en général. Comme on connaît un peu la chanson, celle des salles de classe et des cours de récré et des salles des profs, ça nous avait moyennement émus, cette histoire trop belle pour être tout à fait honnête, eh bien là, cette fois, c’est une sacrée réussite. On ne va pas vous raconter la fin, que vous n’attendez certainement pas, et qui vaut à elle seule tous les dénouements théâtraux du monde. Car oui, il y a ici tout ce qui fait une tragédie classique.

Et vous n’en sortirez pas exactement blindés de certitudes, même si vous aussi vous croyiez avoir tout compris de l’école et de ses pièges, et de ses risques, pas seulement pour les profs, aussi pour les gamins qui essaient d’y vivre, le moins mal possible, et ce n’est pas facile tous les jours. Ni pour les uns, ni pour les autres.

brigitte blang pg57


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