Morale et capitalisme : deux mots incompatibles

mardi 19 août 2008.
 

Il y a un an la crise des crédits immobiliers américains éclatait. Mais de ce côté-ci de l’Atlantique, gouvernants et économistes professionnels se voulaient rassurants. C’était, nous disaient-ils, un phénomène passager, qui ne toucherait pas la France. En fait, très vite, la Banque européenne, avec l’accord de tous les États de l’Union européenne, intervint massivement pour ouvrir des milliards d’euros de crédits aux banques, c’est-à-dire pour faire financer par l’ensemble de la population les pertes des capitalistes qui avaient spéculé sur l’immobilier.

La suite, on la connaît : un ralentissement de l’économie dans tous les pays occidentaux, qui ne manquera pas d’entraîner des vagues de suppressions d’emplois supplémentaires, le déplacement des capitaux vers la spéculation sur les matières premières, les céréales comme les produits pétroliers, et la chute du pouvoir d’achat de toute la population laborieuse.

Parmi les banques françaises, la Société Générale a été de celles qui ont enregistré de grosses pertes dans ces opérations sur les crédits immobiliers à risque. Et au début de l’année 2008, on apprenait qu’aux deux milliards d’euros qu’elle avait engloutis dans l’affaire des crédits immobiliers à risque, il fallait ajouter cinq milliards d’euros disparus en fumée dans d’autres spéculations malheureuses. Mais de désigner aussitôt un coupable, un certain Jérôme Kerviel, un de ces « traders » chargé de jouer à la Bourse l’argent de la banque, qui aurait agi à « l’insu du plein gré » des responsables de la société. La banque avait trouvé son bouc émissaire.

Un rapport de police de la brigade financière vient d’être rendu public. Il reprend entièrement à son compte la version de la Société Générale. Ce qui n’est pas étonnant, car le conseil d’administration d’une grande banque a plus de possibilités de se faire entendre des pouvoirs publics qu’un de ses sous-fifres. Ce qui est un peu plus étonnant, en revanche, c’est la formulation des accusations dirigées contre Kerviel, qui aurait fait « fi de toute considération éthique et déontologique », autrement dit qui n’aurait pas respecté les règles de la morale professionnelle.

Il y aurait de quoi rire si les pratiques des banquiers, et des grands capitalistes en général, n’entraînaient pas autant de drames humains. Car parler « d’éthique », de « déontologie », pour un système dont la seule règle est la course au profit, dans le plus grand mépris de l’intérêt collectif, c’est vraiment se moquer du monde.

Où est « l’éthique » dans ces plans de suppressions d’emplois, de fermetures d’usines, qui brisent des milliers de vie, qui ruinent parfois des régions entières, et qui n’ont pour but que de faire assurer la même production par moins de bras, moins de cerveaux, à seul fin d’augmenter les profits du patronat ?

Où est « l’éthique » dans un système qui trouve normal que les gros actionnaires empochent des bénéfices fabuleux, que les PDG chargés de gérer leurs affaires puissent toucher chaque année ce qu’un travailleur aura du mal à gagner dans sa vie entière, et quitter leurs postes avec des « parachutes en or », alors que des millions d’hommes et de femmes sont condamnés à vivre avec quelques centaines d’euros par mois ?

Où est « l’éthique » dans cette spéculation effrénée sur les céréales, qui en ont fait augmenter de façon démesurée les prix, ce qui ne peut que générer de terribles famines alors que près d’un milliard d’êtres humains souffrent déjà de sous-alimentation chronique ?

Le capitalisme n’est pas un système qu’on peut moraliser, contrairement à ce que prétendent ceux qui sont gênés par quelques-uns de ses aspects, mais qui voudraient bien le conserver. C’est un système qu’il faudra remplacer par une organisation sociale qui ne se donnera plus pour but l’enrichissement d’une petite minorité, mais la satisfaction des besoins de toute l’humanité. Et cela s’appelait le communisme, avant que certains pays le trahissent.


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