Face au capitalisme immoral... Oui aux lanceurs d’alerte

vendredi 18 mai 2007.
 

A) Du danger de croire à l’éthique pour un salarié

Chronique juridique de Savine Bernard, avocate, association LoyseL-tiennot Grumbach

Du danger de croire à l’éthique et de la protection à l’invoquer  : deux ­affaires récentes frappent par leur similitude. Un salarié de Natixis, choqué de voir un collègue commettre un acte boursier irrégulier (manipulation des cours en violation des règles de déontologie), l’éthique rigoureuse et chagrinée, en alerte son responsable, mais se voit rabroué pour avoir « dérangé et perturbé » le collègue, « occupé à devoir déboucler une position délicate » (sic). Obstiné, inconscient utopique, le seul à croire dans les procédures internes, inquiet pour l’intégrité de la société plus qu’elle ne l’est, il saisit alors le service de la conformité pour dénoncer. Deux mois plus tard, il est licencié pour insuffisance professionnelle et pour avoir « dénigré » son collègue.

Un salarié de Vinci Concessions, expatrié, refuse de signer un contrat relatif à l’extension d’un aéroport. Il juge les conditions anormales (surfacturation de 50 %) et non conformes « aux règles éthiques du groupe Vinci », qui en a, au moins par écrit. La société, dans le mois, met fin à son expatriation. Sept jours plus tard, le salarié rigoureux, également croyant des procédures ­internes, saisit le ­représentant éthique du groupe Vinci des faits présumés de corruption. Un mois plus tard, il est ­licencié pour faute grave, notamment pour la diffusion d’informations de nature à porter le discrédit sur Vinci et ses dirigeants.

S’il est donc dangereux pour un salarié de vouloir être plus intègre que son employeur (ou de simplement vouloir que son employeur le soit), si saisir la direction de la dénonciation d’actes illicites, dans le cadre de procédures internes, conduit simultanément au licenciement du salarié, c’est aussi l’acte qui va le protéger.

Dans ces deux affaires, la cour retiendra en effet que la concordance entre le licenciement et l’alerte démontre que le salarié est licencié pour avoir exercé le droit d’alerte. Le salarié peut bénéficier de la protection prévue, protection qui inclut le droit de réintégrer son emploi, s’il le souhaite, option que prendra le salarié de Natixis. Comme quoi, un acte de confiance dans l’intégrité est également un acte protecteur.


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