A table à l’ère du réchauffement climatique

mardi 25 juillet 2017.
 

Ça chauffe dans nos assiettes, de Yves Leers et Jean-Luc Fessard. Éditions Buchet-Chastel, 162 pages, 19 euros.

Comment va-t-on se nourrir en 2050  ? L’alimentation se trouve aujourd’hui à un tournant  : victime des crises agricoles provoquées par le réchauffement climatique, elle est aussi une des causes principales de la flambée du thermomètre. Selon une enquête réalisée en 2015 par la fondation GoodPlanet, trois Français sur quatre savent qu’elle joue un rôle dans le dérèglement du climat. Mais ils sont seulement 13 % à juger cet impact important. Or, le système alimentaire mondial émet à lui seul 30 % des gaz à effet de serre, bien plus que les transports ou l’énergie. «  Nous n’avons plus le temps de voir venir  », alertent les auteurs, qui signent un ouvrage pédagogique, argumenté, dont le travail d’édition est assez remarquable.

Pour les deux journalistes, Yves Leers, déjà corédacteur d’un livre sur viticulture et climat (1), et Jean-Luc Fessard, fondateur de l’association Bon pour le climat, réduire l’impact de notre alimentation sur l’environnement devient un «  enjeu majeur pour l’humanité.  ». L’urgence frappe à la porte. Par les dégâts qu’il provoque sur les récoltes, le réchauffement de la planète met en péril la souveraineté alimentaire mondiale. Sur les dix secteurs d’activité les plus menacés, cinq concernent l’alimentation. Les experts s’accordent pour considérer qu’une flambée des températures au-delà de 3 °C rend tout plus difficile. «  Au-delà, c’est l’inconnu  », préviennent les auteurs. Le dérèglement climatique produit déjà ses premières victimes  : la vigne et les arbres fruitiers ont amorcé des mouvements de migration vers le nord. En mer, la taille des poissons ne cesse de diminuer. Les rendements de blé, d’orge et de riz chutent. Le tableau est sombre mais pas désespéré, car les causes sont identifiées. La solution suscite pourtant une apparente contradiction  : peut-on tourner le dos au productivisme agricole alors qu’il va falloir nourrir 9 milliards d’êtres humains en 2050  ? Le plus sûr moyen d’y parvenir est de produire et manger autrement, écrivent les journalistes. Et de mettre en avant, parmi les pistes de transition, le développement de l’agriculture biologique ou de l’agroécologie, techniques de cultures locales, sans engrais chimiques ni pesticides, adaptées au territoire, donc mieux à même de réagir aux colères du climat. Déplacer les subventions publiques vers ces modes de culture propres permettrait d’entrer dans le cercle vertueux d’une production alimentaire plus saine, ancrée sur la qualité et la diversité. Et, pour «  garder le plaisir de manger sous l’ère du changement climatique  », l’ouvrage n’oublie pas de passer à table. Outre des conseils utiles, à même de faire évoluer les habitudes quotidiennes, il offre un certain nombre de recettes estampillées du logo de Bon pour le climat, imaginées par des cuisiniers engagés, dont le président de l’association, François Pasteau, chef de l’Épi Dupin à Paris.

(1) Menace sur le vin, les défis du changement climatique, avec Valéry Laramée de Tannenberg, aux éditions Buchet-Chastel.

Paule Masson Rédactrice en chef, L’Humanité


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message