Urgence écologique : Et maintenant, la soif !

dimanche 19 octobre 2014.
 

Le 13 octobre est paru mon livre : « L’ère du peuple ». Le point de départ du raisonnement présenté consiste à prendre sérieusement en compte les conséquences de l’augmentation foudroyante du nombre des êtres humains sur la planète. L’accélération du processus saute aux yeux : le dernier milliard d’êtres humains, sur les six que comporte l’humanité actuelle, est apparu en moins de dix ans. Mais il avait fallu deux cent mille ans pour atteindre le premier milliard ! Le nombre a ses impératifs. Entre autres choses, il exerce une pression sur l’écosystème sans précédent dans l’Histoire de la planète.

De la dynamique du nombre résultera l’inévitable mise au pied du mur à laquelle nous allons être très vite confrontés. Ici, bien sûr, je laisse de côté ce qui concerne le changement climatique qui pourrait mettre un terme définitif à la civilisation humaine avant que les autres problèmes n’aient atteint leur paroxysme. Mais il faut bien repérer où se trouvent les points de tensions les plus extrêmes. J’y pensais la semaine passée en lisant quelques chiffres qui m’ont impressionné. C’est le patron de Suez environnement qui les donne, ce qui ne fait qu’ajouter à leur intérêt. Je les livre à votre méditation. « La planète commence à avoir soif » dit-il. La quantité d’eau potable disponible est relativement stable. Mais nos besoins sont en expansion. Naturellement, le mode particulier de l’agriculture productiviste d’un côté, les gaspillages de toutes sortes de l’autre et quelque paramètres de plus dont je vous fais grâce aggravent considérablement la pression qui, de toute façon, serait considérable en toute hypothèse.

On est passé de 15 000 m3 disponibles par habitant au début du vingtième siècle à 3 000 aujourd’hui. Cinq fois moins. Lorsqu’on atteint 1 800, on parle de sécheresse et à 1 000 m3, il s’agit de stress hydrique. Ces chiffres sont posés en général. Mais leur réalité n’est pas uniforme sur la planète. Il y a donc une conséquence géopolitique à cette situation. Ainsi, la Chine représente 23 % de la population mondiale mais ne dispose que de 8 % des ressources en eau de la planète. Il est frappant de se souvenir à cet égard du fait que la gestion de l’eau par les paysans chinois est la base du « communisme primitif » que Marx décrivit. La rareté d’un bien commun qui paraissait sans limite et hors de toute discussion est donc imminente.

J’ai eu récemment le privilège d’une discussion plutôt approfondie avec quelqu’un dont j’ignorais qu’il fut un esprit aussi construit, aussi riche en référence, aussi capable d’esprit de système dans le meilleur sens du terme. Il s’agit de Nicolas Hulot. Nous traitions précisément de ce que pour ma part j’appelle les « principes auto-organisateurs », c’est-à-dire ces situations où ces besoins qui impliquent pour les satisfaire le recours à toutes sortes de moyens d’une complexité croissante. Ceux qui s’arrêtent à l’examen de cette complexité ne voient jamais les principes simples qui sont à l’œuvre. C’est une tâche essentielle que d’être capable de ce repérage. Nicolas Hulot était de plain-pied dans cette façon de voir. Selon lui trois nouveautés vont organiser le futur. La contrainte des inégalités rendues insupportables pour tout un chacun par le spectacle, désormais rendu possible par la télévision, du bien-être dont jouissent les autres. La vulnérabilité c’est-à-dire la prise de conscience du fait que ce que nous connaissons finira par s’effondrer, qu’il s’agisse de civilisation où de ce que l’on voudra. Le troisième c’est la rareté que je viens d’évoquer. Une rareté structurelle et non pas provisoire. Une rareté indépassable tout simplement parce que la ressource est limitée. J’abonde évidemment dans son sens. Et on verra dans mon livre comment, avec mes mots, je mets en exergue ces idées et l’articulation des réalités qu’ils désignent les unes avec les autres.


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