Une « Restauration conservatrice » menace le cycle des gouvernements progressistes en Amérique latine

mercredi 8 octobre 2014.
 

Interview du président Raphael Correia, par Beto Almeida, Emir Sader e Valter Xéu, pour Brasil de Fato.

Raphael Correa - qui gouverne l’Équateur depuis 2007 et qui a l’intention de concourir pour sa réélection en 2017 - était au Brésil au mois de juillet pour participer à une réunion de l’UNASUR (Unión de Naciones Suramericanas), qui regroupe plusieurs pays d’Amérique du Sud, et des BRICs, comprenant la Chine, la Russie, le Brésil, l’Afrique du Sud et l’Inde.

Le président équatorien, qui plaide en faveur de lois qui restreignent le pouvoir des médias, estime aussi qu’à l’heure actuelle, une « restauration conservatrice » est en cours en Amérique Latine, qui vise à mettre fin au cycle de gouvernements progressistes qui ont émergé sur le continent ces dernières années.

Emir Sader – Monsieur le Président, après votre première première élection, vous avez dit que ce n’était plus une époque de changement, mais un changement d’époque pour l’Amérique latine et pour l’Équateur. Avec les derniers développements actuels, pouvons-nous dire que nous commençons à sortir d’un monde unipolaire, comme celle de la guerre froide, en direction de la construction d’un monde multipolaire ?

Rafael Correa – Nous assistons à un changement d’époque. Nous avons commencé un nouveau cycle en Amérique latine quand, devant la débâcle néolibérale, de nombreux gouvernements progressistes sont arrivés au pouvoir. L’ échec retentissant du néolibéralisme, en particulier dans notre Amérique latine, avaient plongé les droites nationales et internationales dans la plus grande confusion, d’où leur difficulté à concevoir le moindre projet. C’est pourquoi j’ai parlé d’un changement d’époque. Ce ne furent pas de simples réformes planifiées en fonction de modes existants, mais des changements profonds, historiques. Des changements dans les relations de pouvoir, dans la transformation de nos états bourgeois en états populaires avec l’arrivée d’Hugo Chavez, de Lula da Silva, du Parti des travailleurs, de Tabaré Vasquez en Uruguay, d’Evo Morales en Bolivie, de Michelle Bachelet au Chili, et la révolution citoyenne en Équateur ... Mais nous devons être très attentifs. Car on assiste au début d’un nouveau cycle conservateur, qu’ils nomment restauration conservatrice. Cette confusion dans laquelle sont tombées les anciennes droites nationales et internationales, après la débâcle du néolibéralisme et l’arrivée de tant de gouvernements progressistes, a déjà été surmontée. On voit clairement une coordination des forces réactionnaires mondiales, continentales et nationales. Je crois que les peuples de l’Amérique latine ne permettront jamais un retour complet au passé. Mais une grande partie de ce qui a été gagné, oui, peut être perdue. Ce nouvel ensemble de forces en faveur de la grande majorité, que les gouvernements progressistes ont réussi à obtenir, peut en effet être inversé. La base en est le mensonge - ce que Gramsci appelait la culture hégémonique - transmis par les médias qui font croire aux pauvres que ce qui est bon pour les élites est bon pour eux, du moment qu’ils restent dans cette condition d’exploitation historique qui a toujours été de mise dans notre Amérique . Nous devons être très attentifs à ce sujet. En ce qui concerne l’autre question, si cette rencontre de blocs signifie un changement d’époque. Peut être. C’est un début. Comme vous l’avez dit, nous vivons dans la dernière décennie d’un monde unipolaire où, de toute évidence, l’Amérique latine a subi un préjudice. Nous avons perdu de l’importance. Avant on se préoccupait un peu plus de l’Amérique latine pour empêcher le communisme de s’infiltrer, etc. Quand nous sommes passé à un monde unipolaire, ce ne fut plus une priorité. Et l’Amérique latine a perdu beaucoup avec ce monde unipolaire. La façon de changer cet ordre mondial, qui est non seulement injuste, mais immoral, toujours en fonction des plus forts, des pays hégémoniques, du grand capital financier, et du capital de la pire espèce, le capital spéculatif, le fonds vautour - le cas de l’Argentine en est un exemple flagrant. La façon de changer l’ordre du monde et de le transformer en un monde multipolaire avec un meilleur équilibre des puissances, une plus grande justice, une plus grande participation, ne peut se faire que par le biais de blocs. Seul, l’Équateur ne fera absolument rien. Le Brésil peut faire un peu, avec 200 millions de personnes, il peut améliorer l’économie, mais le pays est comme l’Équateur et d’autres pays d’Amérique latine, il ne peut pas faire grand chose s’il est isolé. Donc, nous devons consolider nos blocs, et dans ce cas, l’UNASUR. C’est bien que les BRIC se consolident. C’est une bonne chose qu’il y ait des rencontres entre ces blocs. C’est donc un grand espoir. Mais, cependant, il reste à voir si, en effet, nous assistons au début d’un nouveau cycle de transformation de l’ordre mondial vers un ordre multipolaire.

Beto Almeida - Cette réunion qui a eu lieu ici, entre les BRICS et l’UNASUR, qui a un développement très important à l’échelle internationale, peut également prétendre à une articulation politique. Le président Chavez parlait d’une Cinquième Internationale. D’autres parlent de former un camp anti-impérialiste international. Comment pourrait-on créer une initiative, d’ordre politique, à l’échelle internationale, à partir des initiatives de coordination économique, comme les banques qui sont actuellement créées par exemple, mais qui serait exclusivement dans le domaine de la politique anti-impérialiste ?

Raphael Correia - Vous savez, nous devons être très réalistes. La création de ces blocs alternatifs qui cherchent à briser l’hégémonie d’un ou deux pays, ou de régions au niveau mondial, est une bonne nouvelle. Mais cela ne signifie pas que tous les pays des BRICS aient des gouvernements progressistes. Même à l’UNASUR tous ne sont pas des gouvernements progressistes. Nous devons être très prudents et savoir jusqu’où nous pouvons aller. Mais c’est déjà beaucoup de présenter des alternatives, par exemple, dans l’architecture financière régionale. Afin de ne pas toujours dépendre des mêmes. C’est ce que proposent les BRICS avec leur fonds de réserve, avec leur banque de développement, y compris le change de monnaie, avec une compensation du commerce, les échanges en monnaie locale, ce que le Brésil a déjà établi avec la Chine. Ainsi, indépendamment de l’orientation idéologique de certains gouvernements à l’intérieur des BRICS, ce sont des étapes déjà importantes vers un monde plus juste, moins concentré, avec moins de concentration de pouvoir. Ce que j’espère fermement pour l’avenir, c’est que nous puissions également approfondir le dialogue politique ; mais j’insiste, ne vous méprenez pas : les gouvernements des BRICS ou de l’Unasur ne sont pas tous progressistes. Pourtant, nous parviendrons à un consensus en fonction de nos intérêts, car si une décision des États-Unis peut réellement détruire l’Argentine - ils ont la capacité d’intervenir dans tous les paiements de ce pays - n’importe quel gouvernement, qu’il soit de droite ou de gauche, recherchera une nouvelle architecture financière, des moyens de paiements internationaux qui ne passent pas par les États Unis. Ainsi, rien qu’en cherchant des alternatives, ce serait un pas énorme vers un monde moins injuste et vers plus de possibilités pour les nouvelles économies émergentes.

Valter XEU - Monsieur le Président, au cours de votre mandat, les indices concernant la santé et l’éducation dans votre pays se sont beaucoup améliorés. Comme l’éradication de la pauvreté. Comment expliquez-vous qu’en Équateur, avec cette économie peu développée, vous arriviez à atteindre des indices que certains pays, dont les économie sont beaucoup plus fortes, n’ont pas encore réussi à atteindre ?

Raphael Correia - Le changement dans les relations de pouvoir. Le développement est essentiellement un processus politique. Pourquoi l’Amérique du Nord s’est-elle développée et pas l’Amérique latine ? Alors qu’elle avait plus de ressources, plus de technologie, des civilisations consolidées comme les Mayas, les Aztèques, les Incas ... La question et la réponse sont complexes, c’est la grande énigme du développement. Mais certainement l’une des réponses est le type d’élite qui nous a dominé historiquement. Une élite exclusive qui a concentré le pouvoir, ce qui a empêché que les autres profitent des progrès techniques... Pour cette raison, le début du processus de développement est politique. Le changement des rapports de forces. Ce que nous avons atteint en Équateur s’explique parce que c’est le peuple équatorien qui dirige. Parce que d’un État bourgeois nous sommes passée à un État populaire en fonction de la grande majorité. Il y avait beaucoup de ressources dans le pays comme, par exemple, le pétrole. Sur 100 barils, 80 restaient entre les mains des industries pétrolières. En trois ans, nous avons renégocié les contrats et quatre compagnies pétrolières ont quitté le pays, qu’ils aillent au diable ... Mais maintenant, c’est exactement l’inverse : Sur 100 barils, 80 appartiennent au peuple équatorien. Nous devions payer une dette illégitime, et même anticipée. Il y avait donc des ressources qui étaient là, mais dans de mauvaises mains. Et comment avons-nous réussi ? Parce qu’il y a maintenant un gouvernement et un état qui reflète le bien commun.Il fonctionne sur la base des grandes majorités, il y a eu un changement dans le rapport de force en termes de pouvoir populaire. Cependant, ce procédé a une limite, des limites externes. Lorsqu’ils verront que le succès de l’Équateur est dangereux, nous serons attaqués de tous les côtés. Que personne n’en doute. Beaucoup de choses dépendent de nous, mais il existe des contraintes externes. Ces traités de protection réciproque d’investissement, par exemple, comme dans le cas de Chevron qui aurait pu détruire l’équateur. Le Groupe d’Action Financière (GAFI), qui nous impose, à nous pays du Tiers Monde, des conditions auxquelles ne se soumettent jamais les pays développés. Ah, mais c’est pour contrôler le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme, toute une série de conditions que ne remplissent pas les pays développés. Et ce sont dans ces pays que sont installés les paradis fiscaux. Donc, il y a une faute morale internationale terrible. Et tous les droits de propriété ... La connaissance se privatise. Quand davantage de gens ont accès à la connaissance déjà créée, qui est un bien public, plus grand est le bien-être social. Mais les biens environnementaux doivent être consommés gratuitement, ce dont on n’a même pas parlé à Kyoto. Et nous produisons les biens environnementaux. Et cela coûte cher de produire des biens environnementaux. Entretenir la forêt etc, parce que c’est une ressource naturelle. Ainsi, il y a des contraintes externes que nous ne pouvons affronter qu’avec l’intégration (régionale NDT). Et pas seulement cela. Une première étape dans notre processus a été de préserver le mieux possible les ressources existantes. Puis vient déjà la seconde étape, qui est de créer davantage de ressources, de créer plus de richesses. Et c’est là que le socialisme a toujours échoué un peu. Et nous devons parler de ces choses. Le socialisme a beaucoup parlé de justice sociale, mais a peu dit sur le rendement. Et le socialisme moderne doit parler de rendement.

Emir Sader - Face à la faiblesse des partis de droite, en particulier en Amérique latine, les monopoles des médias tiennent quelquefois le rôle de partis d’opposition. Vous avez beaucoup progressé dans la démocratisation des médias. Quel est le modèle actuel de formation de l’opinion publique démocratique ?

Raphael Correia - Nos principaux adversaires sont les médias qui, comme vous l’avez dit, ont pris sans vergogne la place des partis politiques de droite. À qui les médias d’Amérique latine appartiennent-ils ? Aux pauvres ou aux oligarques ? C’est un outil pour maintenir le statu quo. Mais nous devons avancer très attentivement. Ça a été un énorme combat. Ils n’ont pas réussi à vaincre le gouvernement, grâce à sa crédibilité, mais plus de 90% des médias en Équateur sont entre les mains du privé. Bien sûr, il y a toute la propagande selon laquelle Correa a accumulé les moyens de communication car nous avons l’un des six journaux nationaux – au niveau local et régional, il en existe plus de deux cents. Aussi parce que nous avons deux chaînes, appartenant à des banquiers qui ont fui et dont nous avons résilié les contrats, deux chaînes sur six ou sept chaînes nationales, mais il existe des dizaines de chaînes régionales. Parce que nous avons relevé la Radio nationale, mais il y a environ un millier de stations de radio. Donc, avec cette propagande, ils trompent le peuple. « Tant de pouvoir accumulé par le gouvernement et tous les médias sont aux mains du public ». Mais la réalité est que, ni même 10% des moyens de communication sont publics, et je ne parle pas seulement du gouvernement central, mais aussi des municipalités, des assemblées, les universités publiques ... Tout le reste appartient au privé. Un combat énorme dans la communication est une contradiction fondamentale. Car la communication est un droit. Et c’est quelque chose de fondamental pour la cohésion sociale, pour la coexistence. Et selon le modèle capitaliste, ce droit, ce service, est fourni par des entreprises privées qui cherchent le profit, ce qui est une contradiction en soi. Entre le profit et le droit qui, par définition, entrent en conflit. Entre assurer un droit et s’assurer un profit, par définition, c’est l’entreprise de profit qui prévaudra. Mais il est clair que ce n’est pas seulement le profit qui est recherché. C’est le pouvoir. C’est une forme de domination. Tout pouvoir doit s’assurer du contrôle social. Le pouvoir politique, le pouvoir économique, le pouvoir social, le pouvoir religieux, le pouvoir des médias. Mais quand il s’agit de mettre des limites à ce pouvoir des médias cela devient tout de suit une attaque contre la liberté d’expression. C’est totalement incohérent. Lorsque nous parlons de mettre des limites au pouvoir politique, tout le monde applaudit, y compris le pouvoir financier. Mais quand il s’agit de mettre des limites au pouvoir des médias, c’est une attaque contre la liberté d’expression. On voit ici la capacité de ces entreprises, dans la défense de leurs intérêts, à faire croire au peuple - ce dont parlait Gramsci à propos de la culture hégémonique - qu’ils défendent les droits des personnes. Donc, nous devons mentionner clairement qu’il s’agit d’un problème planétaire, mais surtout en Amérique latine, parce que la presse latino-américaine dépasse tous les records en terme de manque d’éthique, de concentration de la propriété, de manque de professionnalisme, de manipulation politique etc ...

Beto Almeida - En face de ces articulations dans le domaine monétaire, économique, financier que représentent la CELAC, UNASUR, Mercosur ... il semble nécessaire qu’il apparaisse aussi un journalisme d’intégration parce qu’il n’existe seulement qu’un journalisme de désintégration. En ce qui concerne la Coupe (du monde de football NDT), il semblait que cela devait être un échec parce que les médias l’avaient présenté comme un échec inévitable, et elle ne l’a pas été. Ils présentent aussi tous ces événements, comme la réunion des BRIC avec l’UNASUR, comme si cela n’était rien, comme si ce n’était pas un moment historique parce que ce type de journalisme est un journalisme de désintégration, de séparation, comme si le peuple ne pouvaient avoir aucune aptitude à la solidarité, à la coopération. Comment voyez-vous la nécessité d’un autre journalisme ?

Raphael Correia - C’est que, précisément, du diagnostic sortirait une solution. Le problème de base est que ce soit un droit, alors que ce bien fondamental pour la question sociale est entre des mains privées. C’est une entreprise à but lucratif. En outre, c’est une propriété privé hautement concentrée dans les mains des oligarchies. En Équateur, les médias nationaux sont détenus par une demi-douzaine de familles. On m’a dit qu’au Brésil, un pays beaucoup plus grand, ils sont la propriété d’un nombre plus petit encore de familles. Par conséquent, on voit la solution. Avoir beaucoup plus de médias communautaires, sans but lucratif, qui chercheraient à effectuer un vrai journalisme, sans cette contradiction fondamentale entre le profit et la garantie d’un droit. Avoir plus de médias publics, ce qui signifie pas qu’ils soient les médias du gouvernement, mais de la société, de la citoyenneté, avec un contrôle social. Des médias publics non seulement de l’administration centrale, mais de gouvernements locaux, d’universités. Dans la nouvelle Constitution équatorienne est inscrit que la fréquence pour les médias audio-visuels dans le spectre radioélectrique est distribuée de la manière suivante : un tiers pour le secteur privé à but lucratif, un tiers pour le secteur public et un tiers pour le secteur communautaire, sans but lucratif. C’est un combat très difficile parce que cela signifie briser l’épine dorsale du pouvoir des médias dans le pays. Car une grande partie de ce spectre, qui est propriété de tout le peuple équatorien, est toujours concentré par les médias privés. Nous devons donc aller en diminuant la proportion du privé, en augmentant la proportion communautaire et publique. Mais il y aura des dénonciations qui nous accuseront de porter atteinte à la liberté d’expression, parce que nous réduisons la proportion des médias audiovisuels privés pour répartir le spectre entre les secteurs public et communautaire. C’est une des réponses, parmi d’autres mesures, qui peuvent être prises pour avoir un bien meilleur journalisme qui, au lieu de désintégrer, intègre ; qui ne désinforme pas ; qui ne manipule pas ; mais qui communique.

Beto Almeida - Il y a une université pour l’intégration créé par Lula au Brésil, l’Unila ; il y a l’École Latino-américaine de Médecine à Cuba, mais on aurait besoin d’un journalisme avec une autre perspective...

Raphael Correia - C’est fondamental. L’un des grands défis de l’humanité au 21e siècle est de vaincre ce pouvoir médiatique, qui dispose de mécanismes solides pour faire croire que critiquer ces entreprises de communication est une atteinte à la liberté d’expression. Si vous critiquez le pouvoir financier, pratiquement tout le monde applaudira. Mais quand on critique le pouvoir des médias, de nombreuses personnes vont dire que nous nous attentons à la liberté d’expression. Nous devons surmonter cette tromperie.

Emir Sader - Vous avez récemment fondé une nouvelle université, fondée sur l’idée du « connaître bien » du savoir commun. Quelle est la nature de ce nouveau projet que vous développez ?

Raphael Correia - En fait, nous avons créé quatre nouvelles universités. À laquelle vous référez-vous ? Je crois que vous faites référence à l’Ikiam [Université Régionale Amazonienne] dans la forêt. Nous avons profité de cet avantage majeur qu’est la jungle amazonienne, le plus grand et le meilleur laboratoire naturel dans le monde ; et contrairement au Brésil où la forêt amazonienne est assez loin des grandes villes, ici en Equateur, à trois heures et demi de Quito, on peut être au milieu de la jungle amazonienne, où Ikiam se trouve. Nous avons créé cette nouvelle université, appelé Ikiam, qui signifie « jungle » dans la langue Shuar, l’une des nombreuses langues ancestrales de notre pays, et qui est au milieu d’une réserve naturelle d’environ 900 kilomètres carrés, afin d’en faire une université de classe mondiale. Essentiellement, au niveau national, elle répond à la demande de la région amazonienne, qui manquaient d’universités, ou dont les universités étaient d’un très faible niveau... créée au milieu de la jungle et consacrée à la bioconnaissance. Je peux d’ores et déjà vous garantir que ce sera une université unique, avec des avantages indépassables dans ce domaine d’étude : la biodiversité et la bioconnaissance.

Valter XEU – Pour en revenir au terrorisme médiatique. Au début de votre administration, il y a eu un conflit avec l’entreprise brésilienne Norberto Odebrecht, et la presse brésilienne en était presque à exiger du Planalto (Palais de la Présidence à Brasilia NDT) qu’il envahisse l’Equateur. La presse indépendante a compris les raisons de l’Équateur et l’a défendue. A cette époque, cela a créé un certain malaise au sein du gouvernement. Aujourd’hui, où en sont les relations bilatérales entre l’Équateur et le Brésil ?

Raphael Correia - Jusqu’à présent, elles sont extraordinaires, avec Dilma et également avec Lula. Mais à l’époque, nous avons même rappelé notre ambassadeur ; cependant, le temps nous a donné absolument raison. Odebrecht a reconnu son erreur. C’était une usine hydroélectrique mal construite, qui a fini par arrêter complètement de fonctionner. L’entreprise a réparé l’usine, en payant les travaux comme cela devait se faire. Odebrecht travaille maintenant normalement en Équateur et gagne de nombreux nouveaux contrats.

Beto Almeida - Nous savons que vous aimez beaucoup parler du rôle des ONG, car il existe des ONG et des ONG ... Ici nous avons eu une expérience très sinistre. Certaines ONG provoquent des manifestations qui encouragent la violence gratuite pour détruire des bâtiments publics, des installations publics, le métro... Au Venezuela, nous savons ce qui s’est passé ... les guarimbas [manifestations et barrages], avec de nombreuses ONG financées par des fondations étrangères agissant pour des pays riches. Mais il s’agit d’un nouveau processus que certains appellent « le visage social du néolibéralisme » ... et c’est ce à quoi nous sommes également confrontés ici au Brésil actuellement ..

Raphael Correia - C’est un problème très grave, avec une enveloppe très jolie, car comment appeler, par exemple - ici nous avons notre groupe de « déstabilisation de gouvernements progressistes » … - évidemment qu’ils ne vont pas l’appeler ainsi, mais lui donner un nom attrayant : ONG, organisations sociales, représentants de la société civile. Rappelez-vous qu’ils se présentent toujours avec des belles dénominations. Dans le Chili de Pinochet il était question d’un Chili libertaire ... Nos élites ont toujours parlé de démocratie, mais quand la démocratie pouvait changer quelque chose, on la supprimait, c’était une démocratie de commodité. Nous devons être prudent avec ça. Nous croyons tous dans l’action des organisations sociales, non gouvernementales, mais attention parce que c’est une nouvelle stratégie d’infiltration dans nos pays. Comme l’a dit Álvaro García Linera, le vice-président de la Bolivie, ce ne sont pas des organisations non gouvernementales, mais des organisations gouvernementales qui travaillent sur nos territoires dans le but d’imposer un certain nombre de restrictions et de contraintes dans les intérêts des grandes puissances. Par exemple, tout cela à propos du « Ne touchez pas aux ressources naturelles », « garder la jungle intacte »... Bien sûr, et nous, idiots utiles, nous produisons des biens environnementaux pour que les grands pollueurs continuent à consommer leurs biens environnementaux de manière absolument gratuite, parce qu’il n’ont même pas de compromis avec le protocole de Kyoto. Donc, nous ne pouvons pas remplir ce rôle qu’ils veulent que nous tenions dans la nouvelle division du travail à l’échelle internationale. Eux, qui produisent une connaissance qu’ils privatisent et nous, qui produisons des biens environnementaux qu’ils consomment gratuitement. Mais ces ONG ne travaillent pas seulement dans ce sens, mais, de toute évidence, nous avons aussi des ONG en Équateur qui ne sont plus financées par l’USAID (United States Agency for International Development), qui a déjà quitté l’Équateur, mais par la NED (National Endowment for Democracy – Fondation Nationale pour la Démocratie), de l’extrême-droite américaine, pour « la formation politique », « l’amélioration de la démocratie », en d’autres termes, former les dirigeants locaux opposés à notre gouvernement pour voir s’ils arrivent à nous déstabiliser. Ainsi, l’Amérique latine doit être très attentive. Et les propres organisations sociales, les vrais ONG et les ONG patriotes, nationalistes, doivent être très conscientes de cela parce qu’elles tombent souvent dans ce piège et ensuite, par esprit de corps, elles défendent cet « onguisme » qui est un moyen de s’infiltrer dans nos gouvernements. Et puisque vous abordez le sujet, les organisations sociales de gauche en Amérique latine devraient parler plus clairement parce que certaines associations, parfois extrêmes, portent préjudice à ces processus progressifs. Voyez la reconnaissance qu’a obtenu le processus équatorien ; même ainsi, les critiques pleuvent de la part d’organisations sociales équatoriennes soi-disant de gauche qui ne comprennent pas ce qu’est de gouverner, qui ne comprennent pas les dilemmes, les décisions qui doivent être prises et qui défendent férocement la nature comme si nous ne le faisions pas. Et même pour la défendre, ces organisations ont besoin de ressources et pour cela elles n’hésiteront pas à tirer profit des ressources naturelles. Donc, cette position de prétendues ONG, d’organisations sociales nationales de gauche - équatoriennes, boliviennes, vénézuéliennes - qui prétendent « ne pas toucher aux ressources naturelles »... Imaginez ce que deviendrait le Venezuela sans le pétrole. Imaginez ce que ce serait la Bolivie sans le gaz. C’est un suicide que de proposer ces choses. Il y a des déclarations claires d’organisations sociales dans ce sens ... Parce que même si vous ne le croyez pas, dans le cas de l’Équateur, elles nous font une plus grande opposition que la droite elle-même.

Traduit avec difficulté par Nicolas (un texte oral c’est toujours compliqué) pour Si le Brésil m’était traduit...

Source (en espagnol) : http://site.adital.com.br/site/noti...


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