Vacances d’été : Les buches et embuches de Vincent Peillon

vendredi 8 mars 2013.
 

Un contrefeu sur un contrefeu n’a jamais éteint un incendie. Après avoir tenté le 26 janvier, par le biais du décret sur les rythmes scolaires, une première diversion pour échapper à la sanction sur sa loi d’orientation présentée trois jours plus tôt, Vincent Peillon essaie de nous resservir la même manœuvre via les vacances d’été pour sortir du bourbier dans lequel il s’enfonce sur les rythmes.

Dimanche 24 février, Vincent Peillon a donc préconisé sur BFM-TV six semaines de vacances en été réparties en deux zones. Paniqués, ses conseillers l’ont invité à corriger le tir en cours d’émission comme le rapporte Le Parisien-Aujourd’hui en France du 25 février, le ministre concédant que « nous commencerons peut-être à en discuter après 2015 ». Peu importe, le ministre venait de lancer une nouvelle balle et attend désormais de voir qui ira la ramasser.

Pour autant, les stratégies d’évitement du Ministre ne se limitent pas à des ficelles de communication. Elles ne doivent pas occulter qu’à chaque saillie médiatique, Vincent Peillon tente de pousser toujours un petit peu plus son avantage vers une territorialisation de l’éducation, la fin du cadre national et l’instauration d’une école à la carte, nouveau vocable pour parler d’une école à plusieurs vitesses.

Ce que cache la déclaration du ministre sur les vacances d’été transparait dans la justification qu’il fournit à l’appui de sa proposition : « ça va nous obliger à revoir les examens, et en particulier le fameux baccalauréat […] qui occupe les locaux d’un certain nombre d’établissements très tôt dans le mois de juin ». Nous y voilà !

La nouvelle annonce de Vincent Peillon cible donc une fois encore le baccalauréat en tant qu’examen national. Le 12 janvier 2013, au Grand-Jury- RTL, il avait déjà défloré le terrain arguant qu’il faut désormais « attaquer des choses qui divisent les français, comme le baccalauréat. Cette question ne devra pas être taboue. […] Le bac, le contrôle continu, oui on y réfléchi. Pour reconquérir le mois de juin ».

Si Vincent Peillon est aussi persévérant sur cette voie, c’est qu’il sait que le démantèlement du cadre national est le préalable libéral à l’institution d’une école à plusieurs vitesses dont la loi d’orientation bâtie sur l’égalité des chances et le socle commun est l’outil perce-muraille. Cela se traduit donc aussi au niveau des diplômes. Après que Sarkozy ait explosé la carte des formations et des diplômes dans le supérieur, Peillon veut réussir dans le secondaire là où ses prédécesseurs Fillon, Ferry et Darcos avait échoué malgré leurs velléités : abandonner le baccalauréat en tant qu’examen national anonyme pour y substituer un contrôle continu à la carte.

Briser le cadre national du bac général par le contrôle continu est un vieil objectif du patronat. Cela permettrait ensuite de justifier la sélection à l’entrée de l’Université, mais surtout d’affaiblir les conventions collectives, le bac étant le premier diplôme général reconnu par celles-ci. De là à trouver une cohérence avec l’accord Medef apporté par un plateau par le gouvernement le 11 janvier dernier et auquel se sont ralliés trois syndicats minoritaires, il n’y a qu’un pas qui ne nécessite pas même d’étirer la jambe…

Bien sûr, Vincent Peillon va se montrer rassurant et proposer une « dose de contrôle continu ». Mais qui ne voit pas qu’en développant le contrôle continu, les épreuves nationales anonymes seraient très vite réduites à la portion congrue ? Il faudrait dès lors détenir le précieux sésame délivré par un lycée des beaux quartiers pour prétendre continuer dans les voies les plus demandées. La sacro-sainte concurrence libre et non faussée trouverait un nouveau terrain d’atterrissage dans l’éducation nationale, avec d’un côté des établissements prolongeant le socle commun destiné à la plèbe, quand d’autres appliqueraient les programmes et proposeraient des activités à la carte. Ce bac, enraciné dans l’environnement socio-économique, n’aurait dès lors plus de valeur identique sur le marché du travail, pas plus qu’il n’offrirait les mêmes garanties de poursuite d’études, et a fortiori de réussite ultérieure.

Vincent Peillon ne commet aucune bourde. Il avance à marche forcée et jauge jusqu’où il peut aller. Des rythmes scolaires aux vacances d’été en passant par le baccalauréat, il prépare les points d’appui à sa loi d’orientation. Ses contrefeux sont autant de bûches qui servent à alimenter le brasier dans lequel il invite à se brûler les doigts. Nous ne lui ferons pas ce plaisir car nous ne sommes pas dupes du démantèlement de l’école publique auquel il s’attèle avec tant d’application.


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