Dopage : Lance Armstrong avoue s’être dopé dès le début de sa carrière, en 1992

samedi 23 mai 2020.
 

Lance Armstrong en dit plus. Déchu de ses sept victoires sur le Tour de France, l’Américain avait reconnu s’être dopé en 2013. Dans un documentaire intitulé « Lance » et diffusé sur ESPN les 24 mai et 1er juin prochains, il raconte quand tout cela a débuté, et pourquoi.

Dans un extrait publié par la chaîne américaine, Armstrong – ainsi que de nombreux anciens coéquipiers comme Hincapie, Hamilton ou Vaughters – répond à la question « La première fois que vous vous êtes dopé, quel âge aviez-vous ? ». « J’avais probablement 21 ans », confie-t-il. Ce qui nous ramène à 1992, sa première année en tant que coureur professionnel, chez Motorola.

« Oui, je me suis dopé » (Lance Armstrong)

Les larmes n’y changeront rien – les regrets non plus… Le « oui je me suis dopé », de Lance Armstrong, accompagné, face caméra, de quelques sanglots peut-être sincèrement assumés, restera bien sûr dans l’histoire du sport quand les images seront diffusées, ce jeudi, sur la chaîne américaine CBS.

Dans le genre mélodrame façon showbiz, Oprah Winfrey sait y faire. Bien d’autres avant le Texan sont passés sur le divan de l’animatrice starifiée. Les douleurs de l’enfance  ; le parcours tout en vigueur d’un enfant battu par l’un de ses supposés « pères »  ; et puis la genèse d’un caractère hors du commun, capable de vaincre un cancer qui aurait dû le terrasser, mais capable aussi d’imposer dans le peloton un ordre mafieux, par le mensonge coopté par tous (ou presque) et l’appétence du pouvoir absolu.

Trop tard, Lance, trop tard  ! S’il faut se réjouir que
l’ex-septuple vainqueur du Tour ait enfin avoué avoir triché, comment ne pas comprendre qu’il s’est soumis à la pression de ses proches et des membres de sa fondation contre le cancer, Livestrong, au bord du gouffre. Et comment taire sa frustration que cette confession vienne si tardivement. Car, depuis la lecture du volumineux rapport de l’agence antidopage américaine, l’Usada, le « cas » Armstrong s’écrivait déjà au passé, 
tant étaient accablantes 
les conclusions de cette enquête dans laquelle nous avions découvert – sans vraiment le découvrir – ce que l’Usada appelle « une conspiration du dopage le plus sophistiqué jamais révélé dans l’histoire ». Le plus grand scandale de l’histoire du sport moderne.

S’il avait avoué plus tôt, beaucoup plus tôt, par exemple après la rémission de son cancer en 1997, ou lors 
des nombreux scandales qui éclaboussèrent les années 2000 jusqu’à son come-back, le cyclisme aurait gagné du temps pour réfléchir à sa refondation, sinon 
à sa révolution. Nous avons beau nous dire qu’à chaque fois qu’un repenti s’exprime, c’est un pas de franchi vers le renouvellement des mœurs, nous ne pouvons que constater l’ampleur du mal enduré. Armstrong a écorné la légende de Juillet. Il a profané le mythe. Il a accéléré le processus de spectacularisation d’un nouveau genre de coureurs, proches des héros virtuels, monétisables, préfigurant un futur cauchemardesque où seraient rois les acteurs de la métamorphose des corps, enfantés dans les horreurs des pires prédictions du bio-pouvoir.

Lance n’était qu’un revenant du cancer. Cela lui offrait 
du crédit et de la compassion. Il disait qu’il n’avait plus rien d’autre à perdre « que la vie ». Comment a-t-il pu trahir à ce point les malades  ? Tel est son drame intime. Avec quelques-uns (citons prioritairement Pierre Ballester, David Walsh et Damien Ressiot), nous ne tirons aujourd’hui aucune gloire d’avoir eu raison avant tout 
le monde en combattant le « système Armstrong » 
en un temps où la glorification de l’Américain était 
la règle imposée. Nous n’étions pas nombreux. Désormais, tout le monde sait que le cyclisme, lui aussi, mérite que des journalistes cherchent la vérité 
et la disent. On ne joue pas impunément avec l’Histoire du Tour de France.

Jean-Emmanuel Ducoin, L’Humanité


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