Baccalaureat : Un examen national et anonyme au nom de l’exigence républicaine

lundi 25 juin 2012.
 

Le démantèlement du cadre national est le préalable libéral à l’institution d’une école à plusieurs vitesses. Cela se traduit donc aussi au niveau des diplômes. Et voilà que Vincent Peillon s’y rallie en ciblant le baccalauréat en tant qu’examen national.

Vieil objectif pour le patronat, briser le cadre national du bac par le contrôle continu permettrait ensuite de justifier la sélection à l’entrée de l’Université, mais surtout d’affaiblir les conventions collectives, le bac étant le premier diplôme général reconnu par celles-ci.

Qui ne voit pas qu’en développant le contrôle continu, les épreuves nationales anonymes seraient très vite réduites à la portion congrue. Il faudrait dès lors détenir le précieux sésame délivré par un lycée des beaux quartiers pour prétendre continuer dans les voies les plus demandées.

Notons que les fossoyeurs du bac ne lésinent pas sur les moyens pour le discréditer. Pensons aux couacs récurrents qui viennent entacher chaque année son déroulement : erreurs dans les énoncés, fuites sur les sujets, copies égarées ou non corrigées etc… A défaut d’être orchestrées, elles sont au moins très vite instrumentalisées pour inviter à introduire davantage de contrôle continu.

Il faut noter la grande persévérance de ceux qui, à droite comme à gauche, veulent abattre le bac comme examen national anonyme. En 2005, un ministre de l’éducation nommé François Fillon avait dû reculer devant la mobilisation lycéenne alors qu’il souhaitait introduire une part non négligeable de contrôle continu. Les lycéens percevaient à juste titre les effets pervers que la prise en compte d’éléments de contrôle continu n’aurait pas manqué d’entraîner, avec notamment l’émergence à très court terme d’un bac à deux vitesses : un premier pour les établissements socialement favorisés pour lesquels les exigences seraient maintenues, un second significativement déprécié pour les quartiers sensibles ou les zones rurales isolées. Avec pour conséquence logique, dans une société où l’image de marque prime du fait de la sacro-sainte concurrence libre et non faussée, d’alléger le niveau d’exigence dans ces derniers pour maintenir des taux de réussite suffisamment élevés. Ce bac, enraciné dans l’environnement socio-économique, n’aurait pas été considéré de valeur identique sur le marché du travail, pas plus qu’il n’aurait offert les mêmes garanties de poursuite d’études, et a fortiori de réussite ultérieure.L’introduction d’une part de contrôle continu dans les épreuves du baccalauréat représenterait par ailleurs une véritable aubaine pour l’enseignement privé.

Au niveau du collège, les flux d’élèves entre enseignement public et enseignement privé bénéficient au privé. Par contre, au niveau du lycée, la tendance s’inverse. Comment expliquer cette distorsion ? En partie par la présence ou l’absence de contrôle continu à l’examen final. La part du contrôle continu dans le brevet des collèges atteint quasiment les deux tiers de l’évaluation finale : afin de justifier des taux de réussite élevés, ce en quoi réside leur principal argument publicitaire d’attractivité, les établissements privés sont tentés de gonfler avec générosité les notes distribuées en cours d’année (ce qui possède aussi l’avantage de donner l’impression aux parents-clients que l’investissement financier consenti est bien rentabilisé).

Par contre, le contrôle continu reste pour l’instant encore absent pour l’obtention du baccalauréat. Dans la très grande majorité des cas, la scolarisation dans un lycée public reste la voie de réussite offrant le plus de garanties, y compris pour les familles qui visent l’excellence. D’où l’inversion logique des flux.

Quoiqu’on en dise, le bac est encore loin d’être bradé. Il doit donc conserver son caractère d’examen national et anonyme. C’est en cela aussi que réside la défense de l’exigence républicaine.

François Cocq est secrétaire national à l’éducation au Parti de Gauche


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