La France dans la toile de la mondialisation 2 Marché du travail

dimanche 26 janvier 2020.
 

La mondialisation du marché du travail

La France dans la toile de la mondialisation Deuxième partie

Suite de la première partie : http://www.gauchemip.org/spip.php?a...

La première partie a surtout traité de la situation de la France dans la mondialisation. Sans vouloir être exhaustif, avant d’aborder le problème de la concurrence de la main-d’œuvre au niveau mondial, il peut être utile de rappeler quelques données concernant le commerce mondial. "La mondialisation des échanges se traduit par une croissance du commerce international plus rapide que celle du produit intérieur brut (PIB) mondial. Entre 1983 et 2006, le commerce en volume a progressé de 4,9 % par an, contre 2,7 % pour le PIB mondial."

(source : Mondialisation rime avec financiarisation. Michel Husson http://hussonet.free.fr/atlasd9.pdf )

Le commerce international a en effet considérablement augmenté de 1970 à 2009 : Il est passé de environ 500 milliards à 3500 milliards de dollars sur cette période, soit une multiplication par sept environ. La croissance du commerce international ne suffit pas à rendre compte de l’interdépendance croissante des économies. Le développement des entreprises multinationales joue un rôle grandissant. Raison pour laquelle on peut parler aussi de multinationalisation, mais ce terme est peu utilisé en raison de son ambiguïté ! Rapporté au PIB mondial, leur poids, par leurs investissements directs à l’étranger, a doublé tous les dix ans entre 1980 et 2000, pour atteindre un quart de la production mondiale en 2007. (Source : Alternatives économiques. Hors-série. Octobre 2009. Protectionnisme : le retour http://nrc-gauthey.fr/upload/fileMa... )

Rappelons que les flux financiers sont environ 50 fois plus importants que les flux commerciaux matériels. (source : bon petit résumé sur "le développement du marché des capitaux" http://www3.ac-clermont.fr/pedago/e...

Mais si l’on considère l’Europe comme bloc économique, il faut souligner que "l’importance du commerce intra-européen, qui représente 73 % des exportations et 70 % des importations de l’Europe prise comme un tout. En consolidant les échanges à l’intérieur de l’Europe, on peut mesurer le faible degré d’ouverture de l’Europe. Ses importations représentent alors 9,9 % de son Pib (16 000 milliards de dollars en 2006) et ses exportations 8,3 %, soit un déficit équivalant à 1,6 % du Pib. Ce déficit se décompose en un excédent vis-à-vis des autres pays développés et un déficit avec les pays du Sud. Celui-ci représente 2,4 % du Pib" (source : Contre-temps. Protectionnisme et altermondialisme. Husson http://www.contretemps.eu/intervent... )

3- La concurrence entre travailleurs déchaînée par le capitalisme mondialisé

Le document qui i suit, de titre ci-dessus, est extrait de : "Penser le communisme, le socialisme aujourd’hui" Une synthèse produite par A Contre-Courant, Carré Rouge, L’Émancipation sociale et À l’Encontre

http://www.millebabords.org/spip.ph... ou : http://www.lagauche.com/lagauche/sp... (site de A l’encontre : http://alencontre.org )

Dans tous les pays, sans aucune exception, les « prolétaires », au sens que Marx donne à ce mot (ceux qui sont obligés de vendre leur force de travail, de « trouver un emploi » pour vivre et faire vivre leurs enfants), subissent les effets de plus en plus brutaux d’un processus politique de libéralisation et de déréglementation de l’investissement direct à l’étranger, des transactions commerciales et des flux financiers, libéralisation et déréglementation imposées simultanément à toutes les parties du monde sur une échelle sans précédent.

Les salarié(e)s des pays où les retraites par capitalisation prévalent (Chili, Argentine, États-Unis, Royaume Uni, par exemple) n’échappent pas à la mise en cause de leurs conditions d’existence. Dans ces pays, le capital ne manifeste aucune reconnaissance envers ceux dont « l’épargne salariale » alimente les marchés boursiers, et il porte le fer contre eux autant, et parfois plus qu’ailleurs. Aux yeux de ceux qui l’impulsent et qui en tirent leur richesse ainsi que leur pouvoir, le processus de libéralisation et de privatisation est encore inachevé. Pourtant il est déjà très avancé. Sa conséquence la plus nouvelle et la plus dramatique est de permettre au capital d’organiser, à l’échelle de continents ou de sous-continents, la mise en concurrence directe des salarié(e)s, des prolétaires vendeurs de leur force de travail et producteurs de plus-value. C’est déjà le cas de l’ensemble européen dont l’UE (Union européenne) est le cœur mais dont l’espace s’étend vers l’Est et la Méditerranée. C’est aussi celui de l’Amérique au nord du canal de Panama, de l’Amérique centrale et du Sud. Dans le cas des pays d’Asie, vers lesquels une part croissante des capacités industrielles mondiales ont été transférées, le capital met ces travailleurs en concurrence entre eux, en même temps qu’il se sert d’eux comme d’une arme contre les niveaux de salaires et contre les conditions de travail d’autres travailleurs presque partout dans le monde. Les moyens de la mise en concurrence des travailleurs sont la délocalisation de la production par investissement direct, mais aussi des formes multiples et très sophistiquées de sous-traitance vers les pays où les salaires sont les plus bas et la protection sociale la plus faible.

La mise en concurrence directe, à une échelle proprement planétaire, de travailleurs vivant dans des rapports sociaux très inégaux face au capital et à l’État a bénéficié de la réintégration dans le marché mondial des pays « du bloc soviétique », comme de ceux qui faisaient partie de l’ex-URSS. Cette mise en concurrence directe connaît un saut qualitatif depuis le passage complet de l’élite bureaucratico-capitaliste de la Chine au capitalisme mondialisé et l’entrée de la Chine à l’OMC.

Le développement des technologies de l’information et de la communication a été délibérément orienté par des groupes industriels, aidés par les principaux gouvernements, et il a fourni au capital les conditions techniques d’une optimisation de la productivité et du profit, sur la base de la dispersion, de la flexibilisation et de la précarisation des travailleurs.

À mesure que les positions de ceux-ci dans la lutte des classes s’affaiblissent, le capital voit s’élargir sa possibilité de voiler le caractère social de la production, de disloquer les collectifs de travail qu’il avait lui-même aidé à faire naître dans la phase antérieure du capitalisme, et d’accroître le taux d’exploitation. L’allongement du temps de travail et l’usure physique et psychique accentuée de la force de travail (au point d’en faire une préoccupation explicite d’organismes paritaires comme le BIT) sont deux traductions de la montée en puissance d’une surexploitation qui combine les traits du 19e et du 21e siècle.

La sélection des immigré(e)s et les statuts juridiques spéciaux qu’on leur impose (« l’immigration choisie »), auxquels s’ajoute « l’immigration clandestine » suivie par les services de police, extraordinairement bénéfiques aux employeurs, sont un autre instrument du choix d’aligner progressivement les salaires et les niveaux de protection sociale des salarié(e)s, qui continuent à être employé•e•s dans les pays sources des investissements et des ordres de sous-traitance, sur des niveaux sans cesse plus bas de salaire et de protection. Les centaines de cadavres qui flottent sur les eaux de la Méditerranée ou qui périssent dans les zones frontières entre le Mexique et les États-Unis symbolisent et matérialisent la barbarie d’un marché du travail mondialisé, structuré par les lois du développement inégal et combiné propres à l’impérialisme du 21e siècle.

Énoncer le mot d’ordre « Prolétaires de tous les pays unissez-vous » dans les conditions d’aujourd’hui signifie trouver des parades, à commencer par des paroles, qui soient entendues des salarié•e•s menacé(e)s par le chômage et la précarité, de façon à ce que le travailleur « étranger » ne soit pas vu comme le concurrent, si ce n’est l’ennemi. (fin de citation)

4 – La mise en concurrence de marchandises fabriquées par des pays dont les droits sociaux sont extrêmement éloignés est une forme de barbarie.

Ce libre échangisme sans régulation suffisante et adaptée revient à remettre en cause non seulement le droit du travail existant dans les pays les plus développés socialement, mais aussi à remettre en question des acquis de civilisation. Pour s’en convaincre, on peut prendre comme exemple l’historique du conseil des prud’hommes .

Il est courant de dater l’origine du droit du travail avec l’apparition de la loi du 22 mars 1841, inspiré du rapport de Louis-René Villermé. Celle-ci interdit le travail des enfants de moins de huit ans, limite la journée de travail à huit heures pour les 8-12 ans et à douze heures pour les 12-16 ans. Le travail de nuit (9 heures du soir-5 heures du matin) est interdit aux moins de 13 ans, et pour les plus âgés, deux heures comptent pour trois. D’autres, date cette origine à l’année 1803

La loi 12 avril 1803 - sur la réglementation du travail dans les manufactures et les ateliers qui réaffirme également l’interdiction des coalitions ouvrières. La loi du 1er décembre – sur la création du livret ouvrier, sorte de passeport permettant à la police et aux employeurs de connaître la situation exacte de chaque ouvrier. Tout ouvrier voyageant sans son livret est considéré comme vagabond et condamné comme tel.

Mais en réalité, même si le droit du travail se développe vraiment au XIXe siècle et au XXe siècle, son origine peut remonter à des temps beaucoup plus anciens. Le conseil des prud’hommes constitue un exemple intéressant car il montre que son origine historique remonte au XIIIe siècle. Nous extrayons cet intéressant historique de Wikipédia.

"Apparu au XIe siècle, le mot prud’homme provient de preux homme ou prode homme, preux et prode provenant de la même racine latine prode dérivée du verbe latin prodesse : « être utile ». Étienne Boileau(1200-1270), prévôt de Paris sous le roi Saint Louis cite l’arbitrage traditionnel des anciens, les « probi homines », hommes de valeur, prudents et de bon conseil. Le terme prud’homme s’appliquait alors aux « défenseurs du métier1 » qui intervenaient si un conflit surgissait entre artisans, il était tranché par leurs pairs : les prud’hommes.

Au Moyen Âge et sous l’Ancien Régime, existeront également des prud’femmes, dont le rôle est de défendre les intérêts des femmes. Dans la vie professionnelle, les femmes étaient présentes dans la quasi totalité des corporations, et pouvaient comme les hommes accéder au statut de maître. Certains métiers leur étaient réservés, comme le travail de la soie. Ainsi, les femmes participèrent aux élections internes à certains métiers sous l’Ancien régime et désignèrent ainsi des prud’femmes pour diriger certaines corporations professionnelles C’est sous le règne de Philippe le Bel que furent constitués les premiers conseils de prud’hommes. En l’an 1296, le conseil de la ville de Paris créa vingt-quatre prud’hommes et les chargea d’assister le prévôt des marchands et les échevins afin de juger, en dernier ressort, les contestations qui pourraient s’élever entre les marchands et les fabricants qui fréquentaient les foires et les marchés établis à cette époque ; ils allaient, de plus, faire la visite chez les maîtres et peuvent être regardés, par-là, comme l’origine des gardes et jurés établis postérieurement dans chaque communauté d’arts et métiers. Pendant près de deux siècles, la ville de Paris posséda seule des prud’hommes. Dans plusieurs villes maritimes, notamment à Marseille, il existe un conseil de prud’hommes dont l’origine paraît fort ancienne. Ce sont des prud’hommes pêcheurs qui jugent les contraventions en matière de pêche maritime et les différends entre marins à l’occasion de leur profession de pêcheurs. Cette catégorie de prud’hommes remonterait, croit-on, à l’époque du roi René, comte de Provence (1462). Des arrêts différents de mai 1758, novembre 1776, octobre 1778 et mars 1786 ont réglementé sans beaucoup la modifier cette institution qui traversa sans à-coups la Révolution de 1789, pour arriver telle quelle jusqu’à nos jours, telle qu’elle était dès le XVème siècle.

C’est le 18 mars 1806 qu’une loi créant un conseil de prud’hommes à Lyon est promulguée par Napoléon Ier puis complétée par un décret du 3 juillet 1806 : les employeurs y sont majoritaires. Des tribunaux favorisant la conciliation entre les fabricants de soie et les ouvriers lyonnais (canuts) existaient déjà et servirent d’exemple. A Paris, un conseil de prud’hommes pour les industries métallurgiques est créé en 1845, puis en 1847 des conseils de prud’hommes pour les tissus, pour les produits chimiques et pour les industries diverses. La Deuxième République remanie la législation des prud’hommes par la loi du 27 mai 1848, qui confère à l’institution un élément fort de sa forme actuelle avec l’apparition du paritarisme ("employeurs" et "salariés" rendant ensemble les décisions). La loi de 1848 déclarait électeurs pour les conseils de prud’hommes tous les patrons, chefs d’atelier, contremaîtres, ouvriers et compagnons âgés de 21 ans et résidant depuis six mois au moins dans la circonscription du conseil de prud’hommes. Elle déclarait les mêmes éligibles, s’ils savaient lire et écrire et s’ils étaient domiciliés depuis un an au moins dans la circonscription du conseil."

J’arrête ici cet aperçu historique. Pour avoir la suite de l’histoire, le lecteur peut se reporter à l’article de wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Consei...’hommes_(France)

Rappelons, qu’il existait en France, jusqu’à fin 2008, 271 conseil de prud’hommes mais la réforme de la carte judiciaire menée par la ministre de la justice, Rachida Dati a conduit à la fermeture de 63 d’entre eux.

Parallèlement à cela, il serait difficile de ne pas dire deux mots de l’inspection du travail.

"L’inspection du travail fut créée par la loi du 19 mai 1874, instituant un service de 15 inspecteurs divisionnaires et des inspecteurs départementaux. La nouvelle organisation devait être financée par les Conseils généraux, à leur initiative. Devant le peu d’empressement de ces derniers, et suite à la Conférence internationale sur le Travail, réunie à Berlin le 15 mars 1890, prévoyant l’instauration d’une législation internationale du travail, les autorités françaises créèrent, par la loi du 2 novembre 1892 un corps d’inspecteurs, fonctionnaires d’État". Pour avoir plus d’informations, on peut se reporter à Wikipédia :http://fr.wikipedia.org/wiki/Inspec... Selon le rapport 2009 de l’Inspection du travail, on comptait en 2009 :2190 agents de contrôle (dont 767 inspecteurs et 1423 contrôleurs) relevant du ministère du travail,

Ceci pour 18 millions de salariés et 3 422 000 entreprises relevant du secteur privé. A cela s’ajoute près de 870 sociétés contrôlées par l’État qui emploient 793 200 salariés.

On constate ainsi que ces droits séculaires, sont le résultat d’une lente et laborieuse construction, restent toujours fragiles et que leur application est loin d’être évidente, raison supplémentaire pour ne pas les fragiliser encore plus par une concurrence libre et non faussée … par le droit du travail des pays les plus socialement avancés.

Fin de la deuxième partie.

Hervé Debonrivage


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