"Monsieur ou Damoiseau ?"

jeudi 20 octobre 2011.
 

« Monsieur ou Damoiseau ? »... c’est la formule que je sors, à chaque fois qu’un homme, dans une administration ou la vie quotidienne, me demande « Madame ou Mademoiselle ? ». En général, cela calme mon interlocuteur qui comprend de suite l’incongruité de cet usage sexiste des termes de la civilité pour les femmes. Interpellée récemment par les associations féministes, j’ai interrogé le ministre de l’Intérieur, par voie de question écrite (question n°119325 publiée au Journal officiel du 12 octobre 2011), sur la persistance discriminatoire de la civilité « Mademoiselle », utilisée en concurrence à « Madame », et des expressions « nom de jeune fille » et « nom marital » dans un grand nombre de documents administratifs, en dépit d’une circulaire de 1974 qui précise que « ces mentions n’ont aucune justification légale ou réglementaire ».

Non ! Ces formules ne sont pas flatteuses pour les femmes ! En effet, l’usage d’une civilité ou de l’autre a au contraire pour finalité de donner une information sur la vie privée des femmes, de façon intrusive. J’ai ainsi demandé au ministre de l’Intérieur de rédiger une circulaire commune à tous les ministères pour faire supprimer la civilité « Mademoiselle » et remplacer les expressions « nom de jeune fille » et « nom marital » par « nom de naissance » et « nom d’usage », dans les relations entre les usagers et l’administration.

Martine Billard

Texte de la question écrite :

Mme Martine Billard attire l’attention de M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration sur la persistance discriminatoire de la civilité « Mademoiselle » et des expressions « nom de jeune fille » et « nom marital » dans un grand nombre de documents administratifs. Tombée en désuétude dans la plupart des autres pays occidentaux, l’expression « Mademoiselle », jugée à tort flatteuse, est révélatrice d’un sexisme encore présent dans les relations qu’entretiennent les usagers avec l’administration. En effet, les hommes sont appelés toute leur vie, sans distinction et quel que soit leur statut marital, « Monsieur ».

À l’inverse, les femmes sont « Mademoiselle » puis « Madame ». Le passage de l’un à l’autre ne dépend pas de leur âge ou de leur insertion professionnelle, mais de leur statut marital. L’usage d’une civilité ou de l’autre donne alors une information sur la vie privée des femmes. Pourtant, cette information n’a aucun caractère légal. Lorsque le statut marital a une importance, dans les relations avec l’administration fiscale par exemple, il est demandé indépendamment de la civilité utilisée. La circulaire FP n°900 du 22 septembre 1967 précise que « l’emploi de l’une ou l’autre de ces formules est [...] une question d’usage et ne constitue en aucune manière un des éléments de l’état civil des intéressées ». De plus, la circulaire FP n°1 172 du 3 décembre 1974 complète que « ces mentions n’ont aucune justification légale ou réglementaire ». Pourtant, cette distinction discriminatoire, intrusive et non obligatoire perdure dans les formulaires administratifs.

Les femmes souhaitant user de la civilité « madame » se heurtent souvent à de nombreuses difficultés afin de faire valoir leurs droits. Dans le même esprit, les termes « nom de jeune fille » et « nom marital » sont totalement désuets. La loi du 6 fructidor an II dispose ainsi que la femme garde son « nom de naissance » toute sa vie. Si elle souhaite porter le nom de son époux après le mariage, celui-ci est alors son « nom d’usage ». De plus, depuis la loi du 4 avril 2006, l’homme et la femme ne peuvent se marier qu’à partir de l’âge de 18 ans, la femme n’est alors plus une jeune fille. Toutefois, nombre de documents continuent d’utiliser ces expressions d’un autre âge qui ne correspondent plus à aucune réalité. En conséquence, elle lui demande s’il ne serait pas pertinent de rédiger une circulaire commune à tous les ministères supprimant la civilité « Mademoiselle » et remplaçant les expressions « nom de jeune fille » et « nom marital » par « nom de naissance » et « nom d’usage » dans les relations entre les usagers et l’administration.


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