Sous la turbine, que de vents ! Réponse de Jean Luc Mélenchon à l’article du Monde

mardi 26 décembre 2006.
 

Je vous invite à ne pas manquer la lecture de l’article paru dans le journal "Le Monde" et titré "Jean-Luc Mélenchon renonce à ses rêves de dissidence du PS". Tout un programme. Les lecteurs de rêves ont l’eau à la bouche, j’imagine. Ce qui ont eu le temps de lire ma note parue la veille, où ceux qui auront la patience de la lire à présent, apprécieront tout le sel de la perfidie du procédé utilisé à mes dépens.

Naturellement, aucune raison dans l’actualité ne commandait la publication de ce papier. Il n’y a pas d’actualité à mon sujet concernant les élections présidentielles. Je n’ai rien à dire de plus que ce que j’ai écrit ni à ce que j’ai dit sur RTL dans l’émission de Jean-Michel Aphatie. J’ai écrit en pesant mes mots, en réfléchissant avec soin. J’ai parlé de même, autant que je le pouvais à cette heure matinale de l’émission de RTL....Dès lors, ce que cet article en dit est seulement un commentaire somme toute assez grossier qui n’engage que son auteure.

Que de vents sous la turbine !

Dans la mesure où il y a plusieurs mois que la rubrique PS du journal "Le Monde" considère que je relève en fait de la rubrique nécrologique, on devine que je vivais heureux, ailleurs, dans les rubriques moins mondaines, éloignées de la sphère d’influence des déjeuneurs et dineurs de la rue de Solférino et des entourages colporteurs de nouvelles "de source sûres". Aucun lecteur de cette rubrique dans le passé ne savait qu’un membre éminent du bureau national du PS nourrissait des rêves de dissidence.

Comment cela avait-il pu échapper à la vigilance d’observatrices aussi aguerries ? Pour mon malheur me voila réintégré dans la rubrique où se construisent les trafics d’influence. Dans ces conditions, je suis obligé de préciser qu’il n’y a eu aucun "entretien" avec moi à l’occasion de ce papier contrairement à ce que laisse croire une référence à mes propos. Celle-ci est uniquement destinée à donner une couleur de confirmation à cet article, comme si en quelque sorte j’avais moi-même confirmé cette lecture de ma position politique.

Je vous donne des détails pour que vous sachiez tous comment se passent les choses quand vous êtes sur la liste des vaincus du moment. "La hyéne suit la charogne", dit l’adage de ma banlieue où je vis avec les autres rustres de ma sorte. Ici la chasse s’est faite en bande. Comme les policiers, certains journalistes procèdent à des interrogatoires croisés. L’une a contacté François Delapierre, l’autre moi, au téléphone, la veille de la publication. Comme ce n’était pas le seul appel dans ce sens je me suis mis en alerte ainsi que je vous l’ai raconté. Je ne vous décris pas le coup de téléphone, car vous ne le croiriez pas.

Je peux juste vous certifier qu’il ne pouvait pas être considéré comme un entretien raisonnable. Entre cet appel téléphonique (ce n’était pas le seul) et la publication, il y a eu ma note éditée sur mon blog qui a gâché la "révélation". Dés lors, se référer aussi à cette note est une suavité du venin jeté. Mes lecteurs sauront que me méfiant du coup tordu j’ai moi-même prévenu les journalistes qui m’avaient appelé de la parution de ma note sur mon blog. Ouf ! Le blog est l’arme de dissuasion du faible au fort.

Quoi que raconte dorénavant cette sorte de Geneviève Taboui, les dates de parution protègent au moins la cohérence de mes propos. Vous serez amusés d’apprendre que la signataire de l’article m’a aussitôt rappelé pour me dire son indignation et ainsi de suite. Comment avais-je pu la comparer à Geneviève Taboui ! Comment avais je pu la soupçonner d’aussi noirs desseins ? Pendant ce temps d’indignation, de l’autre main, elle écrivait exactement ce que je l’avais mis en garde de ne pas écrire. Bien sûr, tout ceci n’est rien qu’un moment de honte vite oublié pour l’intérressée.

Pour moi il en va tout autrement. Cet article mondain signifie des heures de téléphone avec les camarades qui vont le prendre au pied de la lettre. Cela impliquera des reprises en boucle par d’autre grands journalistes d’investigation qui recopieront leur collègue en toute confiance car il s’agit du journal de réference tout de même. C’est ça le prix à payer pour refuser de dire à une journaliste de complaisance ce qu’elle a prévu de vous faire dire. Voyez comment elle conclu son papier sur la référence à cet autre bobard sur le "concours de beauté" dont j’aurais à me faire "pardonner". Attendez-vous à savoir de source sûre que cette personne vit dans un univers spirituel où le pardon et l’offense marchent en couple sado-masochiste. Le mien dans ces circonstances est souvent plus frugalement inspiré de la loi du talion.

Le message, c’est la cohue qui le crée !

Le pire c’est que ce n’est pas le service de presse de Ségolène Royal qui a commandé cette merveilleuse révélation concernant la fin de mes rêves. Les plumes de complaisance fonctionnent de leur propre initiative. Dans la mesure où le papier de la veille titrait à la une que la candidate prenait ses distances avec le parti socialiste, déclenchant les crises que l’on imagine, il fallait bien, deux jours plus tard, compenser par un papier supposé plus flatteur pour la candidate socialiste.

Et ainsi de suite. Le journalisme à la Geneviève Taboui c’est ça. Une invention aide à faire digérer l’autre, un bobard le suivant. Tout commence dans un dîner en ville, tout finit dans un potin. Et le cycle peut recommencer. Je prie les camarades de m’en excuser. Je ne peux rien contre ça. Je vous demande de comprendre que je n’y suis pour rien. Ces gens sont venimeux par nature et il est impossible de les éviter. En temps ordinaire je laisserais passer pour m’éviter leurs représailles.

Mais dans ces heures si spéciales où tant d’entre vous sont si douloureusement secoués par cette suite de combats acharnés sans succés, j’ai pensé que je devais cette mise au point à ceux que la réalité interresse. Je la devais davantage encore à ceux qui partagent mon engagement à PRS. Que leur liberté de réflexion et de contribution au débat que nous avons dans la discrétion du huis clos protecteur de notre intranet ne se bride pas.

A chacun : j’insiste pour que vous lisiez les deux documents : ma note et le papier paru dans "Le Monde". Les membres de PRS pourront s’en servir comme document pour la séance de formation sur les médias et la culture dominante. C’est un très bon document de travail. Tous les autres pourront se rendre compte et se méfier dorénavant non pas de temps en temps mais tout le temps et sur tous les sujets. Tous doivent se guérir de l’illusion d’une presse parisienne factuelle et soucieuse de présentations argumentées.

La presse parisienne n’est rien d’autre qu’un acteur de la scène globale. Elle agit d’après sa propre logique commerciale et relationnelle. Sa relation aux faits est tout aussi engagée que n’importe lequel d’entre nous. Vous ne devez pas croire ce que dit la presse pariseinne. Jamais. Surtout celle qui se prétend de centre gauche car c’est elle qui se sent obligé de donner le plus de gages.

On apprend et on s’instruit mille fois mieux en lisant "Le Figaro" ou "L’humanité" ou n’importe lequel des journaux qui annoncent la couleur plutôt que des soit disant journaux d’information du type "Libération" pour prendre un exemple au hasard. Un point de vue de presse, c’est un point de vue formaté, modulé par l’idéologie dominante et le réseau d’influence plus ou moins resserré de l’oligarchie de notre pays. Interressant comme tel. Rien d’autre.

Que cet épisode soit une occasion de s’en souvenir. Nous ne pouvons rien faire de plus dans ce type de circonstances. J’en suis désolé. Evitez surtout de m’écrire interminablement, ou de me laisser des messages téléphoniques, ou des sms, pour me faire connaitre votre position à propos de l’analyse que me prêtent ces sortes d’illusionistes. Ce que je pense est dans mes notes, écrites par moi, et dans les interviews radio ou télé. Quant à la presse écrite : seulement ce que j’ai relu. Tout le reste n’engage que ses inventeurs. Dernier détail : au CN de PRS les adhérents ne sont pas convoqués comme le prétend l’article. Mais s’ils avaient prévu de monter à Paris, ils peuvent toujours aller rendre visite à la journaliste qui les y a convoqués.


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