Tout fiche le camp : les îles Caïmans veulent instaurer un impôt direct

samedi 5 septembre 2009.
 

C’est officiel : les Caïmans ne sont plus un paradis fiscal ! Certes, ces trois îles des Antilles aux plages interminables, posées à quelques encablures de Cuba, abritent toujours la cinquième place financière mondiale, sanctuaire de l’argent baladeur. Plus de 1 000 milliards de dollars (699,8 milliards d’euros) de fonds opaques y sont gérés. De plus, l’impôt n’existe sous aucune forme dans cette colonie de la Couronne, ni sur les revenus, ni sur les sociétés, ni sur les plus-values. La vente de licences bancaires et des droits à l’importation alimentent le budget de ce caillou de 260 kilomètres où vivent 52 000 habitants.

Or voilà que le gouvernement local envisage d’introduire l’impôt direct. Plus qu’une réforme, une révolution. En 1794, selon la légende, le roi d’Angleterre avait dispensé les îliens d’impôts en remerciement de l’aide apportée par des pêcheurs caïmanais à dix navires de Sa Majesté qui s’étaient échoués sur les récifs.

AU BORD DE LA BANQUEROUTE

Prises à la gorge par le creusement du déficit budgétaire, les autorités de Georgetown ont demandé à leur tutelle, le ministère britannique des finances, l’autorisation d’emprunter 310 milliards de dollars auprès des banques internationales sises à l’ombre des cocotiers. Londres a refusé, exigeant au préalable des coupes claires et surtout la création d’une taxe foncière. Car ce confetti de l’Empire, au bord de la banqueroute, est sens dessus dessous : les contributions de l’Etat à la retraite et au plan santé des fonctionnaires ne sont ainsi plus versées.

La reconstruction de l’île, totalement dévastée en 2004 par l’ouragan Ivan, a vidé les caisses publiques. Pour financer ce vaste chantier, le premier ministre a compté sur la poursuite du boom de la capitale mondiale des fonds spéculatifs (hedge funds) et des sociétés écrans. Patatras ! La crise du crédit a entraîné une contraction dramatique des revenus tirés des établissements financiers, calculés selon le nombre de salariés. Le coût de la vie, très élevé, a fait fuir les touristes, en majorité américains. Jamais l’île aux crocodiles n’a sombré dans une telle déprime.

Le coup est d’autant plus dur que les Caïmans viennent d’échapper à la liste grise des centres financiers jugés non coopératifs lors du G20 de Londres. La nouvelle taxe frappera directement les expatriés, qui constituent la moitié de la population. A l’inverse de ce qui se passe par exemple dans les places concurrentes des îles Anglo-Normandes, ces derniers peuvent acheter de l’immobilier.

Les Caïmans, un territoire comme un autre ? L’écrivain John Grisham pourrait en faire une suite de son best-seller La Firme, dans lequel des avocats véreux se servent de l’île pour blanchir l’argent sale de la Mafia.

Marc Roche (Londres, correspondant)


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