Homme de coeur, intelligent et progressiste, durant l"époque sectaire et violente des Guerres de religion, Michel Servet fut pourchassé à la fois par le catholicisme et par le protestantisme.
Le 26 octobre 1553, Michel Servet est condamné au bûcher comme hérétique par le Grand Conseil de la république de Genève. Il est brûlé le lendemain à Champel, aux portes de la ville.
Ce médecin de génie est né en 1509 ou 1511 en Aragon, à Villanueva de Sigena (Villeneuve d’Aragon, Espagne).
Ayant lu dans la Bible que l’âme humaine réside dans le sang, il entrevoit la circulation sanguine, près d’un siècle avant l’Anglais William Harvey. Il va jusqu’à préciser que le sang se régénère dans les poumons au contact de l’air.
Mais il ne s’en tient pas à des recherches scientifiques et se laisse happer par les guerres religieuses de son temps, entre catholiques et protestants.
Dès l’âge de 20 ans, il a le front de développer des idées très personnelles sur le dogme de la Sainte Trinité dans un petit livre publié en 1531 sous le titre De trinitatis erroribus (Les erreurs de la Trinité). « L’essence divine est indivisible... il ne peut y avoir dans la Divinité diversité de personnes », écrit-il notamment.
En 1536, Michel Servet entre au service de l’évêque de Vienne (Dauphiné) en qualité de médecin. Il se garde d’afficher ses opinions religieuses mais entame une correspondance secrète avec le réformateur protestant Jean Calvin pour tenter de le convaincre de leur bien-fondé.
Il en vient à publier en 1553 un opuscule : Christianismi restitutio (Restitution chrétienne), en réplique au livre fondamental de Calvin (L’Institution chrétienne). Ses détracteurs l’accusent de nier dans ce livre la divinité du Christ, comme les arianistes du IVe siècle.
Calvin lui-même décide d’en finir. Il dévoile sa correspondance avec Servet à un ami qui s’empresse de dénoncer le médecin à l’Inquisition catholique.
Michel Servet est arrêté mais arrive à s’échapper et ne trouve rien de mieux que de se cacher à Genève, où Calvin impose au nom de la Réforme protestante une très sévère discipline morale. Le médecin cherche de l’appui auprès des « Vieux-Genevois », en conflit avec Calvin.
Mais il est arrêté encore une fois. Son procès, pendant deux mois, donne lieu à un débat très vif. Le Grand Conseil de Genève consulte les autres villes suisses avant de se prononcer sur la peine : la mort. Calvin, qui a pris Servet en haine, entérine la décision.
L’époque, il est vrai, ne se prête guère à la tolérance et à la libre discussion, tant du côté protestant que du côté catholique.
Calvin, toutefois gêné aux entournures, tente de se justifier mais il s’attire dès l’année suivante une réponse cinglante de son ancien ami Sébastien Castellion sous la forme d’un opuscule : « Lorsque les Genevois ont mis à mort Servet, ils n’ont pas défendu une doctrine, ils n’ont fait que tuer un homme. La violence endurcit le cœur qui ne s’ouvre pas à la mansuétude. On ne surmonte le mal, on ne dissipe les ténèbres que par la lumière, non par l’épée »
René Castillon
JC Genoud-Prachex (21-10-2007 21:59:03)
Il se trouve que je connais bien l’affaire Servet, pour avoir rédigé une planche aur le sujet (Je suis Franc- Maçon).
Farel, par lettre, le 08.09.1553, réprimande Calvin pour sa "complaisance inacceptable" (en faveur de Servet : on prête FAUSSEMENT à Calvin des paroles selon lesquelles il n’aurait pas voulu de ce bûcher !!!), ce qui servira de prétexte à ses admirateurs : en 1903, les réformés de Genève, poussés par Emile Doumergue, calviniste zélé et professeur de théologie à Montauban, parviennent à devancer un projet de monument, décidé par un congrès international de libres-penseurs. A l’angle des boulevards Beau-Séjour et Roseraie, à Genève, ils en construisent un autre, moins pour rappeler le destin tragique de Servet que pour absoudre Calvin :
"Fils respectueux et reconnaissants de Calvin, notre grand réformateur, mais condamnant une erreur qui fut celle de son siècle et fermement attachés à la liberté de conscience selon les vrais principes de la Réformation et de l’Évangile, nous avons élevé ce monument expiatoire".
Selon le professeur Valentine Zuber (Michel Servet, entre mémoire et histoire), il s’agit surtout d’un opportun blanchiment, avant de célébrer le 400ème de la naissance de Calvin, par le mur des réformateurs.
Mais, avant l’arrestation de Servet à Genève, Calvin a écrit à d’autres collègues du consistoire : " Il me faut parler franchement. On ne doit pas se contenter de mettre à mort de tels hommes, on doit les faire brûler impitoyablement.
Théodore de Bèze est d’une virulence rare : " Qu’on extermine les hérétiques comme des chiens. Le crime de sang ne fait périr que le corps, la corruption par l’hérésie touche l’âme éternelle, les corrupteurs de l’âme sont pires que les criminels ". Où est l’humanisme dont on pare aujourd’hui sa mémoire ?...
En 1979, Gabriel Mützenberg (L’obsession calviniste), n’hésite pas à justifier l’exécution de Servet par celle de Ranucci, en 1976 !!! Mieux, il cite Mathieu Mory, inquisiteur du procès Servet à Vienne, selon lequel, "...le nouveau testament recommandant de brûler les livres de magie, on a plus de raison encore de brûler les livres vivants, les hommes. " Tout un programme...
Le premier qui protestera fermement contre cette condamnation et fait rejaillir l’opprobre sur le calvinisme s’appelait Sébastien CASTEILLON.
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