Répondre à la crise de l’industrie automobile en supprimant la taxe professionnelle : il fallait y penser ! (par Corinne Morel Darleux)

mercredi 11 février 2009.
 

Nicolas Sarkozy, qui vient de découvrir que la France, malgré ses « deux constructeurs importants », importe ses voitures de l’étranger, ne s’en remet pas... Il propose donc de « relocaliser » l’industrie automobile par cette sentence définitive : « Une usine en Inde pour vendre aux Indiens, d’accord. Une usine en Tchéquie pour vendre en France, non. »

Il semble oublier que les traités qui régissent l’Union Européenne interdisent précisément les mesures nécessaires à prendre dans ce sens ! Ces traités dont il se fait fait pourtant l’ardent défenseur, allant jusqu’à renier la souveraineté populaire en tentant de faire passer en force la ratification du Traité de Lisbonne malgré le vote des Français.

La relocalisation est en effet impossible dans l’Union Européenne actuelle, car elle nécessite des dispositifs qui fausseraient la libre circulation des marchandises et la « concurrence libre et non faussée ».

Comment va-t-on favoriser les circuits courts si on ne peut pas d’une manière ou d’une autre "pénaliser" les productions plus lointaines et polluantes... ?

Ainsi, l’idée de fiscalité environnementale, par le biais de la taxe carbone, est tout juste évoquée du bout des lèvres, : elle serait « à voir »... Cette taxe carbone permettrait pourtant de prendre en compte l’impact écologique, en taxant les produits générateurs de pollution et ceux qui sont importés de l’autre bout de la planète. Or Nicolas Sarkozy n’a à l’évidence aucune intention de défendre une telle taxe, qui s’appliquerait en premier lieu... à l’industrie automobile, dont le bilan carbone est lourd !

En revanche, Nicolas Sarkozy sort de son chapeau la suppression de la taxe professionnelle en 2010... En sous-entendant - sans rire - que c’est à cause de la taxe professionnelle en France que les entreprises délocalisent...

Répondre à la crise de l’industrie automobile en supprimant la taxe professionnelle : il fallait y penser !

A la question des contraintes pour les entreprises en échange de cette supression de la taxe professionnelle, qui par ailleurs concernera tous les secteurs, qu’ils délocalisent ou non, quils soient touchés plus ou moins durement par la crise, quelle que soit leur utilité sociale et leur coût écologique... On apprend... qu’il n’y aura pas de sanction : « la contrainte, c’est un engagement » (sic) !

Plutôt que de prendre des mesures fiscales permettant de pénaliser les productions les plus lointaines et polluantes, on reporte encore le poids sur les collectivités territoriales avec un « impôt de remplacement à trouver »... Impôt qui remplacerait donc la taxe professionnelle, qui est actuellement la principale source de financement des collectivités.

Celles-ci, qui attendent toujours les subsides de l’etat correspondant aux nouvelles délégations et transferts de compétences qui s’empilent sur elles depuis des années, apprécieront...

Enfin, Nicolas Sarkozy remet une pièce dans la machine du capitalisme vert. Voitures « propres », moteur électrique... Encore un joli cadeau au lobby du nucléaire, principal producteur d’électricité en France. D’autant que Nicolas Sarkozy sous-entend par sa formule que l’électricité issue du nucléaire serait une énergie « propre ». Or son coût environnemental, lié à l’extraction de l’uranium, principalement réalisée au Niger, à son acheminement et à sa transformation, au démantèlement des centrales... est loin d’être négligeable. Sans compter que les déchets générés restent polluants pour des millénaires sans qu’aucune solution absolument fiable ne soit connue...

Pas gêné, Nicolas Sarkozy évoque également la « prime à la casse » de son plan de relance : non seulement cette prime à la casse est en-deça des exigences d’émissions polluantes définies pour le bonus-malus du Grenelle, mais en plus tous les experts s’accordent à dire qu’elle n’a qu’un effet d’aubaine !

En bref, on continue les mêmes recettes, on prend les mêmes et on recommence !

Une fois de plus, ce sont les intérêts privés qui priment sur l’intérêt général.

Face aux défis sociaux et écologiques actuels, face à la crise énergétique, au dérèglement climatique, à l’épuisement des ressources naturelles, on était en droit d’attendre autre chose !

Il est urgent de développer le frêt, le ferroutage, les transports alternatifs à l’usage individuel de la voiture, de commencer à planifier la sortie du tout automobile. Cette mutation, nous devons impérativement la mener en organisant la défense des milliers de salariés de ce secteur et en planifiant la reconversion industrielle nécessaire.

Tenir compte à la fois des impératifs écologiques et du contexte de crise qui frappe la population, voilà ce qu’on est en droit d’attendre d’un gouvernement responsable. On en est très loin.


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