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La raison du plus fort est toujours la meilleure :
Nous l’allons montrer tout à l’heur
Un Agneau se désaltérait
Dans le courant d’une onde pure.
Un Loup survient à jeun qui cherchait aventure,
Et que la faim en ces lieux attirait.
Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ?
Dit cet animal plein de rage :
Tu seras châtié de ta témérité.
Sire, répond l’Agneau, que votre Majesté
Ne se mette pas en colère ;
Mais plutôt qu’elle considère
Que je me vas désaltérant
Dans le courant,
Plus de vingt pas au-dessous d’Elle,
Et que par conséquent, en aucune façon,
Je ne puis troubler sa boisson.
Tu la troubles, reprit cette bête cruelle,
Et je sais que de moi tu médis l’an passé.
Comment l’aurais-je fait si je n’étais pas né ?
Reprit l’Agneau, je tette encor ma mère.
Si ce n’est toi, c’est donc ton frère.
Je n’en ai point.
C’est donc quelqu’un des tiens :
Car vous ne m’épargnez guère,
Vous, vos bergers, et vos chiens.
On me l’a dit : il faut que je me venge.
Là-dessus, au fond des forêts
Le Loup l’emporte, et puis le mange,
Sans autre forme de procès
Notes
Voici une des fables les plus connues...
Le terme de "procès" employé à la fin de la fable peut faire réfléchir en quoi elle peut exposer réellement un procès.
" L.F. fixe en ses vers les circonstances respectives de ceux qui sont dans le récit accusateur (le Loup) et défenseur (l’Agneau) plaidant la cause de la victime (le Loup) face à l’agresseur (l’ Agneau) afin que le lecteur soit le juge de cette cause" (Patrick Goujon, Le Fablier, N°3 )
" [...] la prétention du Loup qui veut avoir raison dans son injustice, et qui ne supprime tout prétexte et tout raisonnement que lorsqu’il est réduit à l’absurde par la réponse de l’Agneau." (Chamfort)
" [...] "Le Loup et l’Agneau", cette merveille, pas un mot de trop ; pas un trait, pas un des propos du dialogue, qui ne soit révélateur. C’est un objet parfait." A.Gide (Journal 1939-1949, Bibl.de La Pléiade)
Les sources sont Ésope (titre identique) et Phèdre (I,1) que La Fontaine suit d’assez près
(1) à l’instant même
(2) assez hardi pour
(3) "Tous ceux qui savent écrire et qui ont étudié, disent "je vais" [...] mais toute la cour dit "je va", et ne peut souffrir "je vais", qui passe pour un mot provincial ou du peuple de Paris" (Vaugelas).
Je me vas : forme dite progressive marquant la continuité de l’action : je suis en train de me désaltérer.
(4) puisque
Lecture sonore
https://www.youtube.com/watch?v=WHY...
https://www.youtube.com/watch?v=9mn...
https://www.youtube.com/watch?v=az-...
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