Bonne conscience, antisémitisme et attaques contre Siné

jeudi 14 août 2008.
 

Il est temps de faire une pause sur mon blog. Une sorte de fermeture annuelle pour cause d’été. De toute façon je suis parvenu à un stade qui signale le besoin urgent de débrancher la machine. La lecture de la propagande médiatique grossièrement anti chinoise ne me donne même plus ce petit coup de fouet qui réveille. Juste la nausée. Le dégout de la machine à indignation sélective qui crucifie trois lignes de Siné mais ignore la diffusion en boucle d’une publicité différencialiste écœurante me met en état de sidération avancée, là où les mots finissent par se dissoudre avant d’être prononcés. Suis-je moi aussi bientôt mithridatisé ? A force d’avaler le poison à petite dose, suis-je devenu insensible à sa présence dans mon assiette ? Hier j’ai bavardé avec les ouvriers qui mettent de l’asphalte sur les trottoirs. Ils en avaient charrié des tonnes depuis le matin dans des petits seaux en gros bois qui résistent à la chaleur. Dommage que les poumons de ces gars là ne soient pas en bois. Car certains ont le nez dedans toute la journée, accroupis par terre à étaler la boue visqueuse qui fume comme un bouillon de onze heures. Mes deux grands pères sont morts en respirant des saloperies professionnelles, l’un avec un pistolet à peinture, l’autre avec du produit de nettoyage pour les cuves. Je regardais ces types en me demandant comment j’allais leur dire au revoir, après ces quatre mots échangés, tandis qu’ils couraient du cul du camion aux taloches sur le trottoir. L’un m’a dit « on s’y fait ». L’autre m’a dit : « ce n’est pas vrai, personne ne peut s’y faire ». Tous ceux qui étalaient l’asphalte étaient africains. Un hasard évidemment. « Qu’est ce qu’on y peut » a dit le chef d’équipe ? En effet. Ils ne sont même pas tibétains.

Les mains dans la neige

Dans cette pub, le bel acteur imprime ses mains dans le ciment qui immortalise les talents sur le trottoir à Hollywood. Puis il monte dans sa belle grosse auto de la super marque « schmoll » et roule jusque sur « le toit du monde » comme dans un rêve tellement sa bagnole est merveilleuse. Là, on le voit avec un petit gosse et ils impriment tous les deux leurs mains dans la neige. Le gosse sourit comme un soleil. Happy end. Mais dans cette image il y a un truc qui me cloue. Le gosse a des dents de lait. Il lui en manque deux devant. C’est vraiment un petit gosse en somme. Mais il a la boule à zéro et un sari de moine tibétain.

Ce gosse qui a des dents de lait est moine. Et personne ne dit mot. C’est une pub qui passe tous les jours sur votre foutue télé. Mais l’état d’abrutissement sur lequel débouche la campagne anti chinoise et pro Dalaï Lama est telle que personne ne s’insurge de voir donner en spectacle un môme qui a des dents de lait et qui est moine. On suppose que c’est parce que c’est dans leur nature à ces gens, là bas, de donner leurs gosses tous petits au monastère. On ne va pas les embêter avec les Droits de l’homme et ceux de l’enfant ceux là alors que nous devons nous soucier de la protection de leur culture millénaire « si riche » à propos des enfants des femmes et des monastères. N’y est-il pas heureux et souriant ce gosse quand un vieux monsieur blanc vient jouer avec lui à mettre les mains dans la neige ? D’ailleurs le slogan final, si parlant dans ce contexte, souligne bien que nos différences sont très importantes et que on est plus riches d’elles et bla bla bla, le refrain habituel pour trouver normal la différence des droits. C’est une sorte de racisme light.

Que font les « grandes voix » de la bonne conscience ? Motus. Silence. Ou sont les défenseurs des droits de l’homme au Tibet ? Menard et son cirque ambulant ? Bernard Henry Levy ? Précisément celui-ci ne peut pas être partout. Il mène une lutte implacable contre le danger terrifiant que représente Siné et ses incitations à la haine raciale bien connues. Ici, dans « la patrie des droits de l’hommeuuuu » la parole est d’abord à des énergumènes comme ces deux bouffons « ex membres de la ligue communiste » (la seule qualité au nom de laquelle ils s’expriment) qui ont eu le privilège séance tenante d’une tribune dans « Le Monde » pour dénoncer, sans blêmir de honte, la dérive anti sémite de la ligue communiste ? Et pour le reste, feu sur la Chine !!! Médaille d’or le journal « Le Monde » qui publie quatre à cinq articles anti chinois par jour ! Imaginons une pub (je rêve) où l’on verrait pendant disons une demi seconde une réalisation positive de la Chine. Bon. Non. Disons un quart de seconde car sinon mon exemple manquera de réalisme compte tenu de la surveillance anti chinoise implacable du service international de l’industrie du spectacle et des médias. Que se passerait-il ? Ca ne vaut même pas la peine de le raconter.

FAIRE SON DEVOIR

Et moi, pourquoi est-ce que je parle de ça ? Parce que le devoir d’une conscience libre, d’une conscience du type de celles qui sont encensées quand elles s’expriment chez les autres et résistent à l’idéologie dominante de leur zone, le devoir est de montrer que tout ceci est une farce pitoyable. Un bourrage de crâne et un flicage des cerveaux comparable, avec des méthodes différentes, à celui qui est dénoncé par ailleurs avec des trémolos dans la voix. Le dessinateur Sine ne menace personne, ses propos ne sont pas antisémites. Toute la vie de Siné, qu’on aime ou pas, témoigne qu’il n’a rien à voir avec le racisme. De toute façon, dans le contexte de Charlie Hebdo, ce qu’a dit Edwy Plenel sur le sujet est si juste que je n’y ajoute pas une ligne. La preuve ultime de l’ineptie de cette bataille d’accoutumance de l’opinion au flicage communautariste et aux fatwas de la bien pensance, c’est qu’aucune plainte n’est déposée contre Siné alors même que dans notre pays, fort justement, l’anti sémitisme n’est pas une opinion mais un délit. Quand de vrais antis sémites frapperont, ils auront les mains d’autant plus libres que toutes les munitions auront été usées pour rien par ces batailles sans objets qui sèment le doute sur les intentions réelles de ceux qui les mènent. De même, la mode pro Tibet et anti chinoise est une création de propagande certes efficace mais sans consistance sérieuse.

Elle est destinée à fabriquer des réflexes pavloviens pour entrer dans la nouvelle ère de l’histoire du monde. C’est la culture du « choc des civilisations ». Pour les nord américains et leurs griots, les Jeux ne doivent pas être une réussite mise au crédit de la Chine. La Chine ne doit pas faire la démonstration de son entrée réussie comme candidate à la première position dans le monde. A cette logique belliqueuse absurde, construite à coup de stéréotypes à la limite du racisme il faudrait plutôt une alternative raisonnée. Il ne manque pas de scénarios à ce sujet. Mais tous commencent par la résistance à l’idéologie du « choc des civilisations » dont l’ethnicisme et le communautarisme sont le navire amiral.


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