Trois sentiments après le Congrès de Versailles : colère, détermination, espoir

vendredi 8 février 2008.
 

A l’heure où le Congrès de Versailles vient de refuser au peuple le droit au référendum, mettant ainsi un terme à plusieurs semaines de campagne dans lequel beaucoup d’entre nous se sont investis sans compter, trois sentiments dominent.

D’abord un sentiment de colère.

Colère contre ceux qui ont intrigué contre la décision du peuple français. Colère contre Chirac qui n’a pas retiré la signature de la France malgré le vote du peuple français, laissant ainsi de nouveaux Etats ratifier le projet de constitution européenne et se mettre en place une tentative d’encerclement des « non » français et néerlandais. Colère contre Sarkozy, qui a menti en promettant de faire entendre la voix du peuple français à la table des gouvernements européens et qui au contraire leur a promis de la faire taire. Mais colère aussi parce que la gauche pouvait défaire cette manœuvre, parce que nous pouvions tous ensemble contraindre le président de la République au référendum. Le résultat du vote du Congrès confirme la justesse de notre analyse : si tous les parlementaires de gauche présents à Versailles avaient voté « non », la révision aurait été repoussée de 12 voix. Si Sarkozy l’emporte, ce n’est donc pas d’abord le résultat de sa force, qui est en train de s’épuiser, mais des faiblesses d’une partie de la gauche. Il y a vraiment de quoi enrager.

Ensuite un sentiment renforcé de détermination.

La campagne pour un référendum a été menée par un front plus large encore que celui du « non » de 2005. Celui-ci s’est exprimé dans le succès du rassemblement organisé par le CNR samedi dernier à la Halle Carpentier. Tout ceci a fini par payer. Après avoir hésité, de nombreux parlementaires socialistes, ont été convaincus ces derniers jours de voter « non » à la révision de Versailles. Les défections ont été rares du côte du « non ». En revanche, de nombreux élus silencieux ou tentés par l’abstention ont fait au final le choix du « non ». Du coup, avec 165 voix, le vote « contre » a été majoritaire parmi les parlementaires de gauche face à seulement 143 abstentions. Après avoir été minoritaire dans l’électorat de gauche, la ligne européenne de François Hollande et Jean-Marc Ayrault est minoritaire parmi les parlementaires de gauche eux-mêmes ! Dans l’épreuve, une « gauche du PS » s’est reconstituée, qui ne recoupe pas totalement les anciennes frontières, mais qui porte sur une question essentielle pour aujourd’hui et pour demain : la souveraineté populaire. Dans le pays, malgré les erreurs commises en 2007, une force nouvelle continue de se frayer un chemin, un espèce de parti aux murs invisibles qui ressurgit dans les grands moments où le peuple se trouve privé de voix pour le défendre.

Enfin, un sentiment d’espoir.

Nous ne regrettons pas la campagne menée. Car ce qui fait la grandeur d’un combat n’est pas la certitude de la victoire. Sinon nous ne mènerions pas beaucoup de batailles à gauche. Et que dire de nos ancêtres qui ont parfois lutté toute une vie sans entrevoir de victoire ! La grandeur d’un combat réside dans les raisons que l’on a de le mener. La nôtre était la défense de la souveraineté populaire. C’était une cause sans doute plus grande que nous. Mais c’est aussi une cause plus forte que le traité de Lisbonne. Jamais, en Europe ni ailleurs, aucune construction politique n’a pu tenir durablement sans soutien populaire. En choisissant de répondre au « non » des Français par une négation assumée de la souveraineté populaire, les chefs d’Etat européens ont condamné à terme un certain type de construction européenne. Déjà inefficace économiquement et injuste socialement, celle-ci est désormais illégitime politiquement. Ce désastre est consommé grâce au suivisme béat de la social-démocratie européenne et de ses adeptes français pour qui le « oui » à l’Union Européenne, indépendamment de tout contenu social et de toute exigence démocratique, tient lieu de bréviaire. La réinvention de la gauche rappelle à nouveau son urgence. Celle-ci a commencé hier, avec le CNR, le front large qu’il regroupe et les 120 000 signatures recensées à cette heure, avec les 165 parlementaires qui ont su dire « non » dans un scrutin qu’ils savaient perdu parce qu’ils avaient déjà un pied dans l’avenir.


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