Les élections prud’homales jouent le rôle, entre autres, d’un indicateur de l’influence respective des syndicats complétant ainsi l’information donnée par leur nombre d’adhérents.
Les pouvoirs successifs depuis les années 1980 sont largement responsables de la désaffection des salariés pour les élections prud’homales.
Les conseils de prud’hommes constituent un contre-pouvoir contre la toute-puissance de l’État et des directions d’entreprises.
Quelques rappels historiques.
Les conseils des prud’hommes sont le résultat d’un long processus historique multiséculaire. Ils constituent l’un des piliers du droit français.
"Apparu au XIème Siècle, le mot prud’homme provient de preux homme ou prode homme, preux et prode provenant de la même racine latine prode dérivée du verbe latin prodesse : « être utile ».
Étienne Boileau (1200-1270), prévôt de Paris sous le roi Saint-Louis cite l’arbitrage traditionnel des anciens, les « probi homines », hommes de valeur, prudents et de bon conseil. Le terme prud’homme s’appliquait alors aux « défenseurs du métier » qui intervenaient si un conflit surgissait entre artisans, il était tranché par leurs pairs : les prud’hommes.
C’est sous le règne de Philippe le Bel que furent constitués les premiers conseils de prud’hommes. En l’an 1296, le conseil de la ville de Paris créa vingt-quatre prud’hommes et les chargea d’assister le prévôt des marchands et les échevins afin de juger, en dernier ressort, les contestations qui pourraient s’élever entre les marchands et les fabricants qui fréquentaient les foires et les marchés établis à cette époque ; ils allaient, de plus, faire la visite chez les maîtres et peuvent être regardés, par-là, comme l’origine des gardes et jurés établis postérieurement dans chaque communauté d’arts et métiers.…
Au Moyen Âge et sous l’Ancien Régime, existeront également des prud’femmes, dont le rôle est de défendre les intérêts des femmes. Dans la vie professionnelle, les femmes étaient présentes dans la quasi totalité des corporations, et pouvaient comme les hommes accéder au statut de maître. Certains métiers leur étaient réservés, comme le travail de la soie. Ainsi, les femmes participèrent aux élections internes à certains métiers sous l’Ancien régime et désignèrent ainsi des prud’femmes pour diriger certaines corporations professionnelles."
Se développe ensuite une longue histoire de ces conseils. On peut se reporter à l’histoire des prud’hommes sur le site de Wikipédia.
"Une réforme mise en œuvre en 1979, la loi Boulin, généralise l’institution : tant sur le plan géographique que dans la couverture des branches d’activités ; une ultime mesure législative interviendra 3 ans plus tard pour réduire les mandats électoraux à 5 ans. Il existait, jusqu’à fin 2008, 271 conseil de prud’hommes mais la réforme de la carte judiciaire menée par la ministre de la justice, ,Rachida Dati a conduit à la fermeture de 63 d’entre eux"
Il fallut attendre la loi du 19 mai 1874 pour que soit créé l’inspection du travail.
On constate donc que la modification des modalités d’élection des conseils prud’homaux constitue un enjeu important dans l’histoire du droit social français.
On peut constater aussi l’avis défavorable au projet de loi visant à la suppression des élections prud’homales de3 organisations syndicales (CGT, FO et Cfe-Cgc) sur 5 au sein du Conseil supérieur de la Prud’homie (CSP) qui s’est tenue le 17 décembre 2013 concernant cette suppression des élections prud’homales
Voici le texte de la CGT :
Mobilisation pour le maintien des élections prud’homaleshttp://cgt.fr/Mobilisation-pour-le-... mercredi 18 décembre 2013
Source : CGT http://cgt.fr/Mobilisation-pour-le-...
Le Conseil supérieur de la Prud’homie (CSP) s’est tenue le 17 décembre avec à son ordre du jour, l’avis des organisations syndicales et patronales sur le projet de loi portant sur la suppression des élections prud’homales qui devrait être débattu au parlement en février 2014. A cette occasion, plusieurs centaines de conseillers prud’hommes et militants CGT se sont rassemblés afin d’exprimer leur exigence du maintien des élections prud’homales. Cette mobilisation a eu un certain écho lors du Conseil supérieur de la Prud’homie.
En effet, 3 organisations syndicales (CGT, FO et Cfe-Cgc) sur 5 ont donné un avis défavorable au projet de loi visant à la suppression des élections prud’homales. De leur côté, les organisations qui ont donné un avis favorable (Cfdt, Cftc Medef et Cgpme) ont, pourtant, souligné qu’elles ne voyaient pas comment cette désignation pouvait se faire ! Rappelons que l’UNSA, Solidaires et les employeurs de l’économie sociale ne siègent pas au CSP. Or, ces organisations, qui ont des conseillers prud’hommes élus, ont exprimé leur attachement aux élections prud’homales et leur refus de passer au mode de désignation.
Cela fait beaucoup d’opposition ou de scepticisme pour un projet qui, soit disant, devait passer comme une lettre à la poste ! La CGT a donc raison de poursuivre la mobilisation pour faire reculer le gouvernement sur son projet ! D’autant que, non content de supprimer une élection au suffrage universel, le gouvernement veut, sans attendre l’issue du processus parlementaire, engager immédiatement un groupe de travail au sein du CSP pour trouver des solutions au mode de désignation. Processus de désignation qu’il est, en l’état, incapable de solutionner !
Cela fait 5 ans que la CGT demande la mise en place d’un groupe de travail au CSP pour trouver les moyens de mieux impliquer les salariés dans le mode d’élection de leurs conseillers prud’hommes. On voudrait aujourd’hui nous enrôler de force dans un groupe de travail pour supprimer les élections, avant même de connaître la décision du législateur. Inadmissible ! La CGT a exigé que ce groupe de travail ne soit mis en place qu’après le processus législatif.
La CGT va s’adresser dans les jours à venir aux députés et sénateurs pour les informer de la gravité de la situation et pour connaître leur position dans ce dossier.
Des milliers de voix, de tous horizons, s’élèvent contre la volonté du gouvernement de supprimer l’institution prud’homale ! Les 15 000 signatures de la pétition « les élections prud’homales, je signe pour ! » sont un encouragement à poursuivre cette lutte !
Montreuil, le 19 décembre 2013
Pour d’autres informations sur le projet gouvernemental de suppression des élections prud’homales, on peut se reporter sur le site de la ligue des droits de l’homme à l’article : la démocratie sociale en grand danger
Hervé Debonrivage.
LES PRUD’HOMMES DANS LE VISEUR DU GOUVERNEMENT (réactions syndicales)
La décision serait prise : les élections prud’homales, la seule élection sociale démocratique transparente, vont être supprimées. Immense recul de la démocratie. Qui annonce la suppression des prud’hommes eux-mêmes.
On devait voter en 2014, Sarkozy avait repoussé en 2015… Rachida Dati avait supprime 30 % des tribunaux prud’hommes. La gauche va donner le coup de grâce. Il paraît que ça coûte trop cher et qu’il n’y a pas assez de votants. Trop facile d’accuser son chien d’avoir la rage… Il suffisait d’y ré introduire des moyens, une plus grande volonté d‘information et de débats pour redynamiser aussitôt l’élection. Y a t il « trop » de droits et de vie syndicale dans ce pays ?
Le scrutin coûtait 91 millions d’euros, 4,77 euros par électeur inscrit. Une goutte d’eau. Ce n’est rien comparé à tant d’autres élections professionnelles moins importantes. C’est quatre fois moins cher que ce que l’état s’apprêtait à donner (440 millions) à « ecomouv’ » l’organisme privé qui devait récolter « l’écotaxe ».
Il y aurait trop d’abstentions : certes elle est passée de 37 % en 1979 à 74,5 % en 2008. Oui, mais on est passé à 5 millions de chômeurs, les grands médias boycottent tous débats sur ce sujet, les listes sont erronées et incomplètes, le patronat a largement saboté, la chasse au sorcières antisyndicale s’est démultipliée. Tiens : les salariés des petites entreprises (97 % ont moins de 50 soit 8 millions de salariés) ont le « droit » de quitter leur travail pour aller voter sans perdre de salaire…mais les patrons écrasent ce droit ! Décidons que, une fois tous les 5 ans, le jour du vote sera férié et le taux de participation augmentera ! Améliorez l’information et les salariés immigrés – qui ont le droit de voter dans ce scrutin national pour élire les juges de la République – y participeront fièrement…
Aux prudhommes, 4,5 millions de salariés, c’est énorme, venaient voter pour leurs syndicats et donnaient une majorité (comme les élections des TPE) pour la CGT et FO, avec 33,56 % des voix pour la CGT et 15,68 % pour FO, la CFDT obtenant 21,67 %.
A l’avenir, les juges prud’homaux salariés ne seraient plus élus mais « désignés » – loin des salariés – en fonction du « poids » de chaque syndicat. Depuis mars 2013, ce « poids » des syndicats est établi en agglomérant les résultats des élections d’entreprises CE et DP au niveau des branches. Mais ces votes sont douteux, étalés sur 4 ans, transmis par les DRH avec plein d’erreurs et collationnés par les technocrates du ministre du travail ! Une opacité de plus.
Avec ce nouveau mode de scrutin par entreprise, la CGT ne nommera plus que 26,77 % des juges prud’homaux, la CFDT 26 %, FO 15,94 % ! La CFTC monterait à 9,30 %, la CFE-CGC à 9,43 % ! L’UNSA 4,56 % et Solidaires (SUD) 3,47 % sont éliminés. Soit un renversement de la « majorité » pour CFDT-CGC-CFTC.
Coté patronal, le Medef est un groupuscule électoral : il refuse donc toute élection de représentativité car l’Union professionnelle artisanale (UPA) forte de ses 1,3 million d’entreprises adhérentes, deviendrait la première organisation, devant la CGPME et…le Medef.
Apres avoir supprimé les élections, seul lien direct avec les salariés, il sera plus facile de supprimer les prud’hommes – comme le réclame, in fine, le Medef.
Cet article a été écrit par Gérard Filoche, publié le 19 novembre 2013
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