Trop d’impôts en France ? Qui n’a jamais entendu l’affirmation suivante : « la France est la championne des taxes » ? Le MEDEF n’a de cesse de marteler sa propagande : les prélèvements seraient trop élevés en France. Mais pour qui ? Qui paye vraiment l’impôt en France ? Les petits payent gros, les gros payent petits. Selon une enquête du journal l’Obs, en juillet 2022, le taux moyen d’impôt pour les groupes du CAC 40 était de… 4,5%. À l’inverse, le taux d’impôt pour les petites ou moyennes entreprises (PME) varie de 15% à 25%. L’injustice fiscale, dénoncée notamment par les Gilets Jaunes, est totale dans notre pays.
La France est en réalité championne des dépenses publiques pour les (grandes) entreprises : plus de 200 milliards d’euros par an d’aides pérennes, composées à 80% de niches fiscales (comme le CIR) et d’exonérations de cotisations (comme l’ancien CICE transformé en exonération de cotisations), essentiellement captées par les grandes entreprises sans aucune contrepartie. Sans oubliés les 240 milliards d’euros distribués pendant la crise. Vous entendez, à longueur de plateaux, parler du « coût du travail », jamais du « coût du capital ». Le pognon de dingue est pourtant à aller chercher chez les assistés… d’en haut ! Une désintoxication économique vitale pour combattre le Rassemblement national (RN) qui prétend défendre les petits, alors qu’il n’a de cesse de protéger les gros, qu’il préfère protéger les profits des grandes entreprises plutôt que de défendre le travail.
Désintoxiquons nous : l’impôt sur les sociétés (IS) pèse moins en France (2,2 % du PIB) que dans le reste de l’OCDE (3,3% du PIB en moyenne). Par contre, selon les statistiques des recettes publiques de l’OCDE (édition 2020), l’impôt pèse beaucoup plus en proportion sur les PME, que sur les grandes entreprises, qui, comme si ça ne suffisait pas, captent l’immense majorité des subventions et avantages fiscaux. « Les entreprises », ça ne veut rien dire. « Trop de taxes », sans préciser sur qui elles pèsent, ça ne veut rien dire. En revanche : 5% d’impôt pour le CAC 40, zéro centime d’impôt pour Total et Renaud en France en 2021, quand, « en même temps », les boucheries et boulangeries sont menacées d’être rayées de la carte, ça signifie que l’injustice fiscale est immense dans le pays.
« Trop de taxes », « les riches vont se barrer », « les riches créent de l’emploi », « pas d’argent magique »… L’insoumission.fr lance une nouvelle série : « Désintox économique ». L’objectif : apporter des outils à nos lecteurs pour participer à la bataille culturelle contre la propagande économique véhiculée tous les jours par les médias traditionnels. Notre but : vulgariser les débats économiques pour les rendre accessibles au plus grand nombre. L’adversaire : les milliardaires qui détruisent la planète et les humains, et qui possèdent les médias dominants. Nos alliés dans la bataille : nos économistes et vous, nos lectrices et lecteurs.
Dixième épisode de notre série Désintox économique : « trop d’impôts ».
Les PME payent beaucoup plus d’impôts (en proportion) que les grandes entreprises : les chiffres 10 milliards d’euros d’impôt seulement en France pour les entreprises du CAC 40 en 2021 pour… 174 milliards d’euros de bénéfices réalisés dans le monde. Un taux d’imposition du CAC 40 à… 4,5% en moyenne. 4,5% seulement pour le CAC 40 ! Comment ? Par une solution magique : l’optimisation fiscale, la délocalisation des grandes marques, domiciliées dans les paradis fiscaux, généralement aux Pays-Bas, souvent au Luxembourg. Pour l’instant, la plus grande entreprise de France, Total, paye… 0% d’impôt en France, toujours selon l’OBS (juillet 2022). Malgré… 20,5 milliards d’euros de bénéfices, le résultat net le plus élevé jamais réalisé par l’entreprise. Oui, c’est une folie.
Ces grands groupes ont un redoutable allié, tout au sommet de l’État. Non seulement Emmanuel Macron a fait chuter l’impôt sur les sociétés de 33% en 2017, à 25% aujourd’hui, mais son gouvernement ferme les yeux sur le casse du siècle que représente l’évasion et la fraude fiscale pour les caisses de l’État (80 à 100 milliards chaque année). Comme si ça ne suffisait pas, le chef de l’État n’a cessé de baisser les taxes… sur les grandes entreprises, « et en même temps », a multiplié les milliards et les milliards d’euros d’argent public déversés sans aucune contrepartie sur les grandes groupes.
Aucune contrepartie signifie : les plus grands groupes français peuvent se gaver d’argent public et derrière dans la plus grande impunité licencier, délocaliser et… faire pleuvoir les dividendes. Oui, notre modèle économique est totalement fou. Et oui, on attend toujours le ruissellement de ces milliards d’argent public, l’argent du contribuable, notre argent, sur le reste de la société. Le rapport de France Stratégie, institut rattaché à Matignon, est formel : la suppression de l’impôt sur la fortune (ISF) et l’instauration du prélèvement forfaitaire unique (PFU) sur le capital, deux premières mesures emblématiques de l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron en 2017 ont eu une conséquence : l’explosion des revenus des… 0,001% les plus riches du pays.
Pendant ce temps là, les boulangers les bouchers sont menacés de disparition.
Pourquoi donc ne pas réformer l’impôt sur les sociétés (IS) pour favoriser les petites ou moyennes entreprises (PME) ? Le Rassemblement national (RN), qui se présente comme le grand défenseur des petits contre les gros, la candidate autoproclamée du pouvoir d’achat qui a séduit une partie des classes populaires durant la présidentielle, s’est abstenue le 5 octobre dernier sur un amendement proposant une imposition plus juste des multinationales, tout en refusant une réforme de l’impôt sur les sociétés (IS) qui favoriserait les PME !
Lâcher des grosses larmes de crocodile sur les pauvres TPE-PME qui ne s’en sortent plus et risquent la faillite, étouffées par l’inflation historique des prix, notamment l’explosion du prix de l’énergie, « et en même temps » refuser de taxer les super-profits des géants du transport et de l’énergie. C’est pourtant bien à cause de ces multinationales qui engraissent leurs actionnaires par la spéculation que les petites entreprises ne peuvent plus payer leur facture.
Cette contradiction s’explique facilement : toute la droite et l’extrême droite de l’hémicycle feignent de s’intéresser au sort des petits. Le RN descend dans la rue pour s’afficher aux côtés des bouchers et des boulangers, mais refuse strictement de rétablir l’ISF, de taxer les super-profits, ou ne serait-ce que de réguler l’usage des yachts et jets privés (vote contre du RN au Parlement européen). Quand il s’agit de choisir entre les intérêts du capital et du travail, la droite et l’extrême droite a toujours choisie son camp. Et ce n’est pas celui des travailleurs.
Non, il n’y a pas « trop de taxes en France ». Elles sont simplement cruellement réparties : les petits payent gros, les gros payent petit. Les Gilets Jaunes se sont élevés contre cette injustice fiscale. À quand une révolution fiscale en France ?
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