Nicolas Sarkozy a trouvé plus libéral que lui, un conseiller de Ségolène Royal pendant les présidentielles : Jacques Attali

samedi 20 octobre 2007.
 

Nicolas Sarkozy a créé une " Commission pour la libération de la croissance", composée de 43 personnalités, dont Anne Lauvergeon, d’Areva, ou Peter Brabeck, le patron de Nestlé. Le nom de cette commission, sa composition et ses objectifs laisaient présager une orientation ultra-libérale dédouanant médiatiquement le gouvernement sous une apparence d’expertise.

Qui a accepté de présider une telle commission ? Jacques Attali. C’était déjà énorme mais nous devrons boire le calice jusqu’à la lie. Son rapport est encore plus ultra-libéral que nous ne l’aurions parié : de la concurrence libre et non faussée dans le secteur de la distribution aux Partenariats Public Privé pour construire dix villes nouvelles.

Ci-dessous, interview dans le Nouvel Observateur

Rapport Attali : le pari très libéral

Liberté pour l’urbanisme commercial, fin de la réglementation de la revente à perte et des soldes, la commission Attali * propose une libéralisation totale de la grande distribution

de Nathalie Bensahel

Le Nouvel Observateur . - Le rapport d’étape que vous venez de remettre au président de la République contient déjà des propositions de réformes radicales, d’inspiration très libérale...

Jacques Attali. - Le gouvernement nous a demandé ce rapport partiel, car il prépare un projet de loi sur la réforme du secteur de la distribution qui devrait être présenté avant la fin de l’année. Il était donc normal que nous soyons consultés sur la question. Les propositions que nous présentons ici concernent quelques dimensions du pouvoir d’achat, mais pas toutes. Il s’agit pour nous d’améliorer le niveau de vie des Français, de réintroduire de la concurrence là où c’est possible, à travers deux leviers importants : la distribution et le logement. Tout cela représente à peine 10 à 15% de nos réflexions sur le pouvoir d’achat qui portent par ailleurs sur les salaires, le contrat de travail, la fiscalité.

N. O. - La commission préconise la suppression de la loi Galland qui devait protéger le petit commerce et réguler les rapports des grands distributeurs avec leurs fournisseurs.

J. Attali. - Evidemment ! Cette loi n’a pas marché, et son impact sur le petit commerce s’est révélé négatif. La loi Galland était censée protéger les petits commerçants et les petits fournisseurs de la toute-puissance de la grande distribution. Résultat : les prix des produits ont augmenté et le système a préservé toutes les rentes de situation. Donc, la meilleure façon de faire, c’est de supprimer la loi Galland et par la même occasion les lois Royer-Raffarin sur l’autorisation d’implantation des surfaces commerciales.

N. O. - Et on remplace tout cela par quoi ?

J. Attali. - Par rien du tout. Nous voulons laisser faire la concurrence. Il n’est plus question d’interdire la vente à perte ou de réglementer les soldes. Par ailleurs, en ce qui concerne l’urbanisme commercial, nous proposons de mettre en place des dispositifs de contrôle locaux afin de lutter contre les situations de monopole. On peut même imaginer que ces outils de contrôle disposent du pouvoir de « casser » des autorisations d’implantation lorsque la concurrence est menacée.

N. O. - Si on laisse faire la concurrence, ce qu’il reste de PME dans le commerce et parmi les fournisseurs de la distribution risque de disparaître.

J. Attali. - Attendez, tout cela suppose un accompagnement budgétaire pour soutenir le petit commerce. Nous voulons augmenter les aides distribuées aux PME du secteur par le Fonds d’intervention pour les Services, l’Artisanat et le Commerce (Fisac). Pour l’instant, les sommes distribuées par le Fisac ne dépassent pas 90 millions d’euros par an alors que le Fonds dispose normalement d’un budget de 800 millions. Il y a donc de la marge. Nous proposons aussi de ramener le paiement des factures aux PME à 30 jours maximum. Enfin, on a ouvert une petite fenêtre vers les actions collectives ou actions de groupe, qui ne seraient accessibles qu’aux consommateurs sous des conditions très strictes.

N. O. - Vous dites également qu’on peut libérer du pouvoir d’achat en réactivant le secteur du logement...

J. Attali. -Je n’invente rien. C’est un secteur industriel majeur, qui libère chaque année 420 000 logements alors qu’il en faudrait 500 000 pour couvrir tous les besoins. Pour combler ce déficit, il faut déjà faciliter l’échange, supprimer les droits de mutation, réduire massivement les commissions d’agence. Par ailleurs, pour favoriser une meilleure rotation dans le secteur du logement social, on peut imaginer une bourse internet d’échanges.

N. O. - Cela revient à court-circuiter les offices HLM...

J. Attali. - Certes, mais c’est en rendant les choses plus transparentes que les échanges seront facilités dans ce secteur saturé et opaque. Surtout, pour augmenter le nombre de logements, il faut en construire. Et là, nous avons un projet de construction de villes nouvelles : c’est bcopolis. bcopolis, ce sont dix villes nouvelles de 50 000 habitants chacune, à la pointe de la technologie et de l’écologie. Nous proposons un financement mixte dans le cadre d’un partenariat public-privé (PPP).

N. O. - Où voulez-vous implanter ces villes nouvelles ?

J. Attali. - Nous en proposons plusieurs en région parisienne, trois dans des quartiers prioritaires, dont une dans le Var.


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