Aux portes du second tour, l’Union populaire se prépare pour la prochaine bataille

samedi 16 avril 2022.
 

J’écris ces quelques lignes le cœur encore serré. Oui, la tristesse est immense. Passer à 421 420 voix du second tour, tellement rageant. Lundi matin, après cette soirée électorale complètement folle, où nous avons cru un incroyable retournement de situation possible, l’écart avec Marine Le Pen se réduisant comme peau de chagrin de 4 à 0,8 points, le retour sur terre a été brutal. Première image au réveil : ces 10 personnes venues nous demander une pièce, de l’aide pour manger et dormir à l’abri, en l’espace de 10 minutes place de la République dimanche soir. Place de l’Égalité et de la Fraternité, triste symbole.

Une pensée pour ces 300 000 personnes à la rue. Une pensée pour cet ami qui ne peut pas toucher le chômage, alors qu’il a pourtant enchaîné les boulots durant des mois, qui doit effectuer sa demande de RSA malgré ses 3 masters 2, la France sous Macron. Une pensée pour toutes celles et tous ceux d’entre nous menacés par la guerre sociale qu’il prépare en cas de réélection, après tous les dégâts qu’il a déjà causés pendant 5 ans, l’Hôpital et les Gilets Jaunes fracassés, pour ne citer qu’eux. Les images de ce porte-parole du droit au logement (DAL) piétiné par les CRS du préfet Lallement, comme une envie de couper les infos.

La rage au cœur en pensant aux cinq années à venir. 5 ans perdus pour la France et la planète. Alors qu’on aurait pu changer les conditions matérielles d’existence, lancer la bifurcation écologique et la 6ème République, au lieu de ça : guerre sociale, inaction climatique et monarchie présidentielle autoritaire et solitaire nous attendent, si ce n’est l’arrivée au pouvoir de l’extrême-droite. Autant dire que ce tableau, accompagné du retour de la grisaille sur le pays, est bien moins réjouissant que l’incroyable espoir soulevé par le printemps Mélenchon, le soleil et les sourires dans tous les meetings bondés de cette fin de campagne.

Forcément, la tristesse et la déception sont là sur nos visages. Beaucoup de nos yeux sont encore rougis. Et c’est humain, c’est sain, c’est normal, après y avoir autant cru, après l’incroyable espoir qui s’est emparé de nos cœurs ces dernières semaines. Mais quand les larmes vont sécher, on va pouvoir réaliser ce que l’on vient d’accomplir. Et être incroyablement fier de nous.

7 millions 700 000 personnes rassemblées autour d’un programme de rupture sociale, écologique et démocratique. La vraie gauche à 22 %, résultat historique en France, quand les mouvements de gauche ont été décimés à travers l’Europe. Nous aurions pu finir comme la gauche italienne, rayée de la carte. Rappelons-nous les 8 % que certains nous promettaient encore début janvier. Les 17 % maximum qu’on nous promettait dans les derniers sondages en fin de semaine dernière. Résultat ? Au sortir de cette présidentielle, la gauche est debout, fièrement debout en France.

Un pôle populaire est né. La sociologie électorale est claire. Samedi et dimanche, les quartiers populaires, les départements d’Outre-mer et la jeunesse, se sont déplacés massivement dans les urnes pour glisser un bulletin de vote Jean-Luc Mélenchon. Un résultat historique avec des scores dépassant les 50 % dans beaucoup de quartiers populaires du pays. Un score sur lequel bâtir la suite.

Ce premier tour aura eu le mérite de clarifier la situation politique en France, avec trois grands blocs arrivés en tête : la droite d’Emmanuel Macron, qui a siphonné la droite traditionnelle représentée par Valérie Pécresse, l’extrême-droite de Marine Le Pen, qui a largement battu l’attraction médiatique Éric Zemmour, et la gauche, désormais incarnée par La France insoumise, les partis de gauches traditionnels, responsables de la qualification de l’extrême-droite, étant à l’agonie et au bord de l’explosion au sortir de ce scrutin.

Le niveau de colère à l’égard de Fabien Roussel, Yannick Jadot et Anne Hidalgo, est immense dans le pays. Incapables de penser aux millions de personnes qui auraient pu voir leurs conditions matérielles d’existence changées avec cette élection, incapables de penser à l’avenir de la planète, incapables de penser à autre chose qu’à eux-mêmes. Leur responsabilité est historique, et je me demande bien comment ces gens peuvent se regarder dans une glace depuis dimanche, après avoir fait perdre leur camp et qualifié l’extrême-droite.

Ce qui est beaucoup plus intéressant à retenir de cette présidentielle, c’est l’incroyable politisation dans le pays ces derniers jours. Tous ces gens qui se sont déplacés pour la première fois dans les urnes dimanche, les 18/34 ans et les habitants des quartiers populaires des grandes villes. Et tous ces soutiens venus d’horizons totalement différents, de Christiane Taubira à Cédric Herrou, de Médine à Pierre Larrouturou, de Rohff à Cyril Dion, de Gaël Giraud à Frédéric Lordon. Mais aussi le raz-de-marée de Marine Le Pen dans la France périphérique, la France rurale abandonnée, terres sur lesquelles il faudra aller lutter et démasquer l’extrême-droite durant le quinquennat à venir.

Jean-Luc Mélenchon aura réussi à incroyablement rassembler autour de sa candidature. Celui à qui on a longtemps reproché un prétendu sectarisme, aura réussi à bâtir un incroyable pôle populaire. Et on ne pourra jamais lui retirer cette prouesse. La France insoumise, déjà forte de l’expérience de ses 17 député.es et 6 eurodéputé.e.s, enrichie par tous les nouveaux visages du Parlement de l’Union populaire venus du champ associatif, syndical, intellectuel, artistique et politique, est désormais soutenue par de nouvelles franges du pays. Les groupes d’actions insoumis enregistrent des volumes de renforts impressionnant depuis dimanche soir, de citoyennes et citoyens révoltés par ce résultat si cruel, et déterminés à aider dans le combat.

Car c’est bien de ça dont il s’agit : organiser le combat, porter les différentes luttes durant ce nouveau quinquennat de tous les dangers, incarner la résistance, incarner l’espoir. Et pour ça, la gauche n’est plus orpheline, elle dispose désormais d’un incroyable pôle de rassemblement : l’Union populaire. Avec un programme plébiscité par les associations et les citoyens, qui a plié le débat à gauche. Avec une équipe, d’une incroyable jeunesse, prête à se battre pour le siècle à venir. Avec une stratégie, qui vient de démontrer toute sa puissance.

La prochaine échéance décisive pour résister à la destruction du nouveau pouvoir exécutif : les législatives. La possibilité de limiter le pouvoir de nuisance du nouveau gouvernement, le privant de majorité, et même de lui imposer une cohabitation. Imaginez la tête d’Emmanuel Macron ou de Marine Le Pen avec un Jean-Luc Mélenchon premier ministre. Les 17 députés insoumis l’ont montré durant le quinquennat précédent, notamment lors de l’incroyable bataille des retraites, et alors qu’une nouvelle bataille sur le sujet s’annonce : nous avons besoin collectivement de contre-pouvoirs et de portes-paroles populaires pour incarner la résistance.

Plus que jamais, le combat continue. Après ce score historique, nous pouvons être fiers. Nous avons surtout de quoi construire la victoire la prochaine fois. L’insoumission va prendre quelques jours de vacances bien mérités après ces mois de campagne éreintants, et revenir regonflée à bloc pour reprendre la lutte. Prenez soin de vous, hasta la victoria de l’insoumission.

Par Pierre Joigneaux.


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