N’en déplaise à Z, il y a 1000 ans la France n’existait pas

mercredi 22 décembre 2021.
 

Par Philippe Simon

Il y a un peu moins de 1000 ans, n’en déplaise à Z et autres nationalo-populistes à l’esprit très "imaginatif" et à la mémoire sélective, la France n’existait pas. Il y avait, entre autres, les Plantagenêts et les Capétiens, ces derniers appelant judicieusement leur royaume morcelé et instable "Royaume des Francs" et se nommant "Rois des Francs" (et non de France, car inconnue à leurs yeux) sur leurs pièces de monnaie. Les Francs étant d’ailleurs une tribu germanique (une région de Bavière porte le nom d’une partie de leurs territoires d’origine), dont le représentant le plus célèbre fut Charlemagne, qui établit le siège de son empire à Aachen (Aix-la-Chapelle, Allemagne) et ne parlait que deux langues : le francique (dialecte germanique proche des dialectes actuels de l’Allemagne centrale), qui était sa langue maternelle, et le latin qu’il apprit plus tardivement pour pouvoir mieux régner administrativement sur les ruines européennes occidentales de l’Empire Romain que ses lointains ancêtres avaient conquis et qu’il réunifia partiellement sous sa tutelle.

La France métropolitaine, telle que nous la connaissons, dans une quasi unité politico-géographique (mais pas culturelle), a au mieux 400 ans. Son unité linguistique, hors langue administrative (issue de la langue d’Oïl, à composante celto-germano-latine), est encore plus récente. Quant à ses frontières actuelles, elles ont moins de 200 ans. De même, le concept d’une Gaule mythiquement unifiée, cher aux mêmes nationalo-populistes, date des débuts de la 3ème. République, donc de la fin du XIXème. siècle. Ce sont les romains qui appellèrent Gaule le territoire composé de tribus celto-germaniques entre Mer du Nord, Alpes et Pyrénées. Lesquelles tribus passaient leur temps à se faire la guerre entre elles au point que les armées romaines conquirent ce vaste territoire, à pied et en moins de 7 ans, au cours de plusieurs campagnes militaires qui mobilisèrent au mieux 15000 légionnaires latins.

L’Empire Romain était d’ailleurs un vaste melting-pot ethnique, linguistique (où le latin n’était qu’une langue administrative) et culturel. Plusieurs empereurs et militaires romains qui en firent la réputation n’étaient pas des latins mais natifs d’Afrique ou d’Asie. Grâce à son ouverture et à sa capacité d’intégration et de promotion de populations d’origines diverses, il dura presque 2000 ans (Byzance inclus). On ne trouve pas trace de racisme dans les écrits latins de cette époque. Bien au contraire. Il suffit de lire, parmi d’autres, les écrits de Tite Live, Tacite, Marc Aurèle (militaire, empereur et philosophe), Flavius Josèphe (militaire et historien), Sénèque et Cicéron pour s’en convaincre. L’Empire Romain n’était pas "étriqué", grâce à l’esprit et à la pensée de tous ceux, de toutes origines, qui contribuèrent à sa réussite. Ce fut sa force plus que ses légions multi-ethniques.

Quant aux Celtes : ils venaient du sud de l’Asie (grosso modo de l’Inde, du Pakistan et de l’Afghanistan actuels) avant de s’établir durablement dans l’est de l’Europe puis de se répandre principalement dans son nord-ouest. Ainsi que la plupart des peuples indo-européens qui colonisèrent l’Europe et dont beaucoup d’entre nous sont les lointains descendants ; lointains descendants seulement car il y eut bien d’autres mixages de populations après eux et il y en aura encore d’autres après nous, n’en déplaise à certains. C’est l’histoire de l’humanité et le futur ne nous appartient pas plus que le passé. Monsieur Z, lui, porte un nom arabo-berbère et son prénom est d’origine germanique. Et les chiffres qu’il utilise, comme nous tous pour calculer, sont d’origine arabe. D’ailleurs ils sont toujours qualifiés officiellement comme tels.

Il est donc bon de visiter des expositions comme celle consacrée en ce moment au Royaume des Plantagenêts par l’Abbaye Royale de Fontevraud (Anjou). Elles ont le mérite de rappeler les réalités historiques.

Quant au chroniqueur-amuseur public Z, il ferait mieux de retourner sur les bancs de l’école pour (ré)apprendre tout ceci. Et plutôt que se présenter facétieusement aux prochaines élections présidentielles, il serait plus utile qu’il donne des cours d’orthographe et de grammaire à beaucoup de ses supporters énamourés, lesquels ont des lacunes manifestes en la matière, au point qu’à les lire on ne se croirait plus ... en France !

Et pourtant, nous avons tous bénéficié d’une scolarité obligatoire, non ? Comme le dirait J.M. Le Pen, patriarche d’une dynastie nationalo-populiste mais de plus grand renom que Z en la matière : "être français, cela se mérite". Et moi, j’y oppose fermement le verset biblique : "La paille qui est dans l’œil de ton frère, tu la vois. Mais la poutre qui est dans ton œil, tu ne la vois pas." Mais si "être français cela se mérite", commençons donc par une remise à niveau en orthographe et grammaire pour les français qui se proclament "soucheux". À lire leurs commentaires sur les réseaux sociaux, beaucoup d’entre eux en ont un cruel besoin.

Comme l’écrivit Émile Zola, fils d’immigré italien : "La langue est le ciment d’un pays". Et il maniait bien mieux la langue française que certains chroniqueurs-amuseurs publics contemporains.


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