Macron giflé : l’extrême droite condamne, excuse, justifie et se réjouit

mardi 15 juin 2021.
 

Quand on demande aux fachos s’ils condamnent l’agression du chef de l’État, ils répondent tous « oui, mais… ».

Si le débat démocratique peut être âpre, il ne saurait en aucun cas tolérer la violence physique. Je condamne fermement l’agression physique intolérable qui a visé le président de la République. »

« Il est inadmissible de s’attaquer physiquement au président de la République. Je suis la première opposante à Emmanuel Macron, mais il est le Président : on peut le combattre politiquement, mais on ne peut pas se permettre à son égard la moindre violence. »

Marine Le Pen est une politique habile. Il ne faut pas la sous-estimer. Ces deux citations sont d’elle, le 8 juin, après qu’Emmanuel Macron ait pris une gifle lors d’un bain de foule.

La présidente du Rassemblement national entend bien gouverner la France, dès 2022. Impossible alors, aux vues de ses prétentions, de dire autre chose sur l’agression du chef de l’État. Et si Marine Le Pen semble avoir réussi à tenir sa garde rapprochée afin d’éviter toute polémique – sauf Julien Odoul, qui vit médiatiquement par la polémique et qui a lancé sur LCI : « La violence verbale entraîne souvent la violence physique » –, sa nébuleuse s’est chargée du sale boulot pour elle.

Ainsi tweete le conseiller régional Alain Avello : « Agresser physiquement le président de la République est un scandale absolu [...] Mais c’est le président de la République lui-même, à la suite de plusieurs de ses prédécesseurs, qui abaisse la fonction en abaissant la France. »

Ainsi Jean-Yves Le Gallou, ancien eurodéputé FN, justifie la gifle par le fait que « Macron fait honte à la France ».

Plus loin du RN (quoi que…), Nicolas Dupont-Aignan y va aussi de son « oui, mais » : « La classe politico-médiatique condamne la gifle au président de la République, mais oublie de s’interroger sur les causes de la violence. Abaissement de la fonction présidentielle, crise de l’autorité de l’Etat, inutilité du vote… » Sentiment d’insécurité

Difficile, tout de même, de trop se réjouir que le Président se fasse agresser. Alors, un élément de langage est apparu dans les rangs de l’extrême droite : Emmanuel Macron ne considérerait pas suffisamment le « sentiment d’insécurité » que ressentent les Français, le voilà pris à son propre jeu.

Comme le tweete Damien Rieu, star de la fachosphère : « Vous imaginez si quelqu’un disait que c’est juste un "sentiment" de gifle le scandale que ça ferait ? »

Et voici ce que l’on lit sur Boulevard Voltaire : « Ainsi, donc, notre Président a-t-il été victime d’un léger sentiment d’insécurité, ce 8 juin, à Tain (Drôme), lorsqu’un badaud l’a giflé aux cris de "Montjoie Saint-Denis, à bas la Macronie !" L’assaillant a été immédiatement maîtrisé par le service de sécurité, rassurons-nous. Il doit, en ce moment même, réfléchir aux conséquences de son geste en attendant la comparution immédiate qui ne manquera pas. Contrairement aux auteurs des violences quotidiennes qui émaillent notre beau pays, il y a fort à parier que la Justice ne lui montrera aucune clémence. Il risque, semble-t-il, trois ans de prison. Presque un an par doigt de la main. [...] Un peu partout, on pousse des cris d’orfraie. C’est la République qu’on gifle, tout ça tout ça. C’est oublier un peu vite deux choses : d’abord, la République elle-même s’est construite sur la violence, la haine et la profanation du sacré. [...] La République, c’est la décapitation de tout ce qui est grand, beau ou sacré. [...] Ensuite (et surtout), Macron n’a, contrairement à ce qu’il avait annoncé et commencé à montrer en 2017, rien rendu au caractère prétendument sacré de sa fonction. » Un ami nommé Zemmour

Éric Zemmour aussi joue avec ce concept : « Si je voulais être cruel, je demanderais si Macron a eu un sentiment de claque ou une réalité de claque. Puisqu’il parle lui-même de sentiment d’insécurité ».

On se souvient d’Éric Zemmour, agressé en pleine rue en mai 2020. Emmanuel Macron l’avait alors immédiatement appelé, pour une conversation de 45 minutes. « Je voudrais rendre hommage à l’élégance du geste même si je suis et je fus journaliste politique, donc je vois les arrières pensées politiques mais il y a une élégance qu’il faut reconnaître », avait-il alors déclaré sur CNews.

Eh bien, quand la situation inverse se produit, l’ambiance change radicalement : « Gifler le Président, c’est inqualifiable. On ne gifle pas quelqu’un qui est sacré et respecté. Mais on en est arrivé là car Macron a désacralisé sa fonction. [...] il n’a pas à engager comme ça un dialogue avec un quidam. Il est président de la République, il est le roi, surtout dans la conception française des institutions [...] Il s’est lui-même désacralisé, et donc il a ce qu’il mérite si j’ose dire. C’est horrible à dire, évidemment je condamne cet acte [...] mais il a ce qu’il a provoqué ».

Si on a les élus qu’on mérite, on a aussi les amis qu’on mérite. Montjoie Saint-Denis et Mein Kampf, c’est l’extrême gauche !

Ainsi dit Martial Bild, directeur général de TVLibertés : « L’agresseur de Macron appartient, semble-t-il, à l’extrême gauche. » Même analyse pour Pierre Sautarel, du site Fdesouche : « Un des membre de la bande ayant giflé Macron se dit anarchiste... il ont participé à une manif d’extreme-gauche likent des trucs entre autres d’extreme-droite se réclame de l’anarchie… »

Même le journaliste de BFM et RMC Olivier Truchot s’y engouffre : « Donc ils ne sont pas royalistes et se définissent plutôt de gauche voire d’extrême gauche. Plus Visiteurs qu’Action Française. Certains ont parlé trop vite. »

Vous vous rappelez quand Jean-Marie Le Pen assurait mordicus qu’il n’était pas d’extrême droite mais… centriste ?

Bref, le malaise est palpable. C’est un de leur camarade qui a giflé le Président, et ça la fout mal ! L’éditorialiste Julie Graziani semble d’ailleurs inquiète de voir ce genre de comportement émaner de son propre camp : « L’homme qui a giflé le Président #Macron a-t-il crié "montjoie st Denis" par nostalgie monarchiste ? En tout cas, si maintenant des royalistes en viennent à se comporter comme de vulgaires sans culottes, c’est que tout part vraiment à la dérive dans ce pays…. »

Mais au-delà de l’extrême droite, plusieurs médias « modérés » ont aussi mis leurs habits de relativistes. « Macron giflé dans la Drôme : que risque le suspect, un jeune homme fan du Moyen-Age ? », titre l’Opinion ; « Des geeks fans du Moyen Âge : l’improbable profil des deux gardés à vue », affiche pour sa part Le Figaro.

Pour rappel, tous les « geeks », ni les « fans du Moyen-Âge » ne sont pas des fachos en puissance. Par contre, il est plus probable que ce soit le cas pour les gens qui possèdent des armes et des exemplaires de Mein Kampf à la maison. Mais il faut croire que c’est moins « rigolo »…

C’est vrai qu’entre les apprentis-putschistes de l’armée, les factieux aux petits pieds de la police, les youtubeurs daecho-compatibles qui menacent de tuer des électeurs, on a de quoi rigoler en ce moment !

Loïc Le Clerc


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