Chômage – Zéro chômeurs ? Une volonté politique

vendredi 7 février 2020.
 

Depuis trois ans de associations et des territoires œuvrent pour que « le droit à l’emploi » inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 devienne réalité. Une expérimentation permise par le dispositif « Territoires zéro chômeurs de longue durée » voté par l’Assemblée nationale le 29 février 2016. Porté par une myriade d’organisations associatives (ATD Quart Monde, Fédération des acteurs de la solidarité, Emmaüs…), ce dispositif embauche directement des chômeurs de longue durée volontaires. Pour le moment, il n’est testé que sur un nombre restreint de dix territoires, mais 105 projets locaux sont en cours d’étude.

En quoi consiste-t-il ? Il s’agit de coordonner tous les acteurs qui assurent ou accompagnent financièrement les chômeurs, afin de mutualiser les fonds qu’ils versent et les transformer en salaire. En somme, cela repose sur l’idée qu’il est moins cher d’embaucher les chômeurs de longue durée que d’assurer tous les coûts sociaux du chômage. Dit autrement, le marché de l’emploi capitaliste est incapable de mobiliser toutes celles et tous ceux qui veulent contribuer à l’intérêt général, il les détruit à petit feu… alors que l’argent est déjà là, mais mal distribué ! Sur les dix territoires d’expérimentation retenus, ce sont actuellement 780 ex-chômeurs de longue durée qui travaillent – dans une zone qui regroupe 70 000 habitants, soit 1%.

Trois organismes ont été créés spécifiquement. Un fonds central (« Fonds d’expérimentation territoriale ») sert à coordonner toutes les institutions qui indemnisent les chômeurs. Il reçoit une dotation publique, versée à des EBE (« Entreprises à but d’emploi »), employeuses de chômeurs de longue durée. Au niveau de chaque territoire d’expérimentation, un « comité local » met en lien les chômeurs de longue durée volontaire avec les besoins sociaux insatisfaits du secteur. Il réunit de nombreux protagonistes issus du monde administratif, syndical, patronal ou privés d’emploi. Ceux-ci identifient donc des tâches nécessaires qui ne rentrent pas en concurrence avec des activités lucratives existantes : recyclage de portes et fenêtres à Mauléon, lavage écologique de voitures à Thiers, retouches et couture à Villeurbanne Saint Jean… Non seulement cela crée de l’emploi, mais cela élève les qualifications et innove sans coût social.

Malgré ses limites, notamment le faible nombre de territoires d’expérimentation et la concentration uniquement sur les chômeurs de longue durée, cette initiative apporte trois leçons politiques. D’abord, personne n’est inemployable : le marché capitaliste est juste incapable d’embaucher les individus volontaires. Ensuite, les besoins sociaux sont légions : ils suffiraient largement à occuper tous les chômeurs. Finalement, le chômage est une décision politique : on peut donner des emplois aux chômeurs à condition d’organiser rationnellement l’allocation. À l’heure de la transition écologique pressante, la France ne peut se passer de six millions de cerveaux et de paires de bras.

Hadrien Toucel


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message