Plus de 250 000 routiers américains bientôt ruinés par un fonds de pension

mardi 24 décembre 2019.
 

La caisse de retraite Central States Pension Fund (ou CSPF en version originale), qui gère les prestations de retraite pour les conducteurs de camions Teamster, a annoncé qu’elle deviendra officiellement insolvable en 2025 et que, d’ici là, elle sera contrainte de diminuer progressivement les versements à ses bénéficiaires.

La CSPF est le principal fonds de retraite pour plus de 250 000 conducteurs de camions travaillant notamment au Texas, dans le Michigan, le Wisconsin, le Missouri, le Minnesota et à New York. C’est donc l’un des acteurs importants du marché des pensions aux États-Unis. Et pourtant, dès le 1er juillet prochain, il devrait servir des pensions de moins en moins élevées à ses affiliés retraités pour éviter une faillite qui apparaît pourtant comme inéluctable.

Les pensions ne sont plus garanties depuis 2014

Jusqu’ici, un tel cas de figure était impossible en raison de plusieurs règlementaires fédéraux interdisant la réduction des pensions de retraite. Mais tout cela a changé en décembre 2014, avec l’adoption d’une loi dite Multiemployer Pension Reform Act qui permet désormais aux organismes de retraite de diminuer leurs prestations à condition de démontrer un risque d’insolvabilité à une échéance de 10 ou 20 ans à venir. C’est donc exactement ce qu’a fait la CSPF en expliquant que sa situation était intenable à moyen terme, à cause notamment de la crise financière mondiale. En effet, pour rappel, les fonds de pension américains font fructifier l’argent de leurs adhérents sur les marchés financiers, et ils courent donc le risque de perdre tout ou partie des sommes investies en cas de crise boursière par exemple.

Mais la CSPF souffre d’un autre problème bien plus préoccupant, et qui justifie à lui seul les prévisions de faillite prochaine : du fait d’un désengagement progressif d’un nombre sans cesse croissant d’employeurs, alors que le nombre de retraités, lui, ne cesse de progresser, la caisse de retraite est aujourd’hui contrainte de payer 3,46 $ au titre des pensions pour chaque dollar qu’il reçoit des employeurs. En 2015, la CSPF a ainsi reversé à ses adhérents 2 milliards de dollars de plus que le total des cotisations patronales qu’il a reçues. À ce rythme-là, Thomas Nyhan, le directeur exécutif de la Central States Pension Fund pense même que la caisse pourrait devenir insolvable bien avant 2025. Seule solution de sauvetage provisoire : faire passer le montant moyen de versement annuel de 40 000 à 16 000 dollars, soit une réduction de 60% !

Un modèle qui ne fonctionne plus

Certes, il est possible que les pensions des retraités affiliés à la CSPF soit reprises par le Pension Benefit Guaranty Corporation, un programme gouvernemental mis en place il y a une quarantaine d’années pour justement pallier les éventuelles défaillances des fonds de pension. Mais avec un actif disponible d’environ 1,9 milliards de dollars à la fin de l’exercice 2015, il y a peu de chance que ce programme suffise à couvrir les quelque 2,8 milliards de pensions versées pour l’instant aux anciens routiers de la CSPF.

Au final, ce sont 272 600 retraités et actifs qui risquent de voir disparaître leur seule et unique source de revenus pour leurs vieux jours. Mais le mal dont souffre la CSPF semble commun à toutes les caisses de retraite pour les salariés travaillant pour plusieurs employeurs (les multiemployer workers dont font partie un grand nombre de conducteurs routiers aux États-Unis). Par conséquent, si les difficultés rencontrées par la Central States Pension Fund devaient toucher également ses homologues, ce serait alors plus de 10 millions de travailleurs et retraités américains qui pourraient être ruinés.

À l’heure où l’on propose aux Français de convertir leurs caisses de retraite traditionnelles en fonds de pensions à l’américaine, autant dire que le modèle manque brusquement et singulièrement d’attrait…


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