Débat entre militants PCF PRS et inorganisés à Corbeil

mercredi 4 juillet 2007.
 

Une initiative de section a permis de réunir près de 80 personnes - membres du PCF, de PRS et des citoyen-nes engagé-es non organisé-es - pour un débat sur les enjeux, de quelle - éventuellement nouvelle - force politique pour la transformation sociale. Jean Luc Melenchon, auteur d’une tribune intitulée « Devoir d’audace » et Michel Laurent, responsable de « La vie du parti » à la direction du PCF ont été invités à ce débat animé par Elisabeth Gauthier, membre de la direction du PCF et chargée de « L’Atelier national ; quelle organisation communiste du 21ème siècle ? ».

Ce fut une véritable soirée de travail. Pas de grands discours, mais des questions, des interrogations, une recherche collective. Une conscience partagée que dans la confrontation politique aujourd’hui, face au capitalisme financier et brutal, pas de salut hors d’une grande ambition de réinventer la politique, et surtout de la construire avec le peuple. L’aller-retour dans la discussion est permanent entre projet politique, projet de société et force politique. La discussion ne part pas d’abord de la question : quelle organisation voulons-nous. Mais sur quel est le projet sur lequel nous voulons nous engager. Peut-il devenir bien commun ? Pouvons-nous nous retrouver et y travailler ensemble ? C’est le point de départ. Vient ensuite le souci de trouver les moyens de reconstituer la pleine souveraineté politique du peuple, et par conséquent l’enjeu des moyens de faire vivre le projet. Besoin d’un parti politique ? C’est oui, Mais exigence d’inventer une nouvelle forme parti permettant une toute autre capacité de transformation. Un des axes majeurs souvent abordé durant cette soirée, c’est la nécessité de mener la bataille idéologique, culturelle face aux forces de domination. Les interrogations se précisent : Est-il nécessaire, et envisageable de construire une force politique nouvelle, rassemblant différents courants et traditions à gauche ? Comment réussir à faire du commun, sans se dissoudre, sans étouffer l’autre, sans se renier ? quelle forme serait de nature à dépasser une simple addition de forces : fusion ? confédération ? front commun ? pourquoi pas en installant un SAS dans un premier temps ? Le Linkspartei a fait partie de la discussion. Est venue l’idée d’une articulation des forces transformatrices au niveau européen comme priorité politique. La demande de créer des espaces communs est forte. Et l’idée du PCF de tenir un congrès ouvert, avec participation de non membres du PCF au débat est accueillie avec beaucoup d’intérêt.

Elisabeth Gauthier pense nécessaire de poser trois grandes problématiques. La distance que les milieux populaires ont pris avec toute la gauche dite gouvernementale, à partir du tournant de 83 et qui n‘a cessé de s’aggraver. L’émergence, depuis les années 90, d’une sphère de forces antilibérales, de mouvements divers et de traditions fort différentes qui constitue un facteur politique nouveau mais dont les rapports au politique sont fort contrastés. Et enfin les clivages qui s’opèrent au sein de la social-démocratie dans la mesure où personne ne peut échapper aux choix entre l’acceptation du néolibéralisme ou de sa contestation. Il n’est pas exagéré de dire que se pose aujourd’hui, et non seulement en France, la question de la ré-invention de la gauche, et donc pour le PCF aussi un devoir d’audace ! Cela paraît inacceptable, irresponsable de rester isolés, face à la dureté du capitalisme, entre ceux qui partagent les mêmes objectifs. L’urgence sociale et politique, l’intensité des recherches, la multiplication d’initiatives rend nécessaire de mettre en débat dès maintenant toutes les hypothèses du débat. Rénovation du PCF, le PCF comme moteur pour réinventer la gauche ? De nombreux militants qui ressentent que les défis se posent aujourd’hui avec une nouvelle ampleur. Qu’il s’agit en fait de travailler en même temps à la rénovation de deux « espaces » , l’espace du communisme, l’espace de la gauche. Les deux sont confrontés à la question : quel sens de la transformation sociale aujourd’hui, comment poser les enjeux de l’émancipation face au systèmes de domination, au capitalisme contemporain. Toute construction d’une nouvelle force demande un processus de travail, avec reconnaissance et valorisation de chacun, et donc à égalité. Une méthode pourrait être la construction par cercles concentriques, en progressant à partir d’un début de d’une dynamique.

Jean Luc Melenchon présente d’abord l’association ‘Pour une République sociale’ (PRS). Il étaie ensuite son appel au « Devoir d’audace » par la double crise qui frappe l’ensemble de la gauche, au terme de deux cycles, celui du ‘communisme d’Etat’, et celui de la faillite de la social-démocratie à échelle de l’Europe ainsi que de l’Internationale socialiste. Les exemples n’en manquent pas lorsque l’on regarde l’Amérique latine, par exemple. Le mythe du ‘modèle scandinave’ qui permettrait de répondre aux préoccupations sociales contemporaines ne tient pas le choc d’une analyse sérieuse. La gauche manque cruellement de projet et tend à devenir une ‘force des centre-ville’. Il fait part de son inquiétude quant aux choix que semble vouloir prendre le PS en s’alignant sur ce qui a échoué, en lorgnant vers le centre, trajectoire à laquelle il ne souhaite pas participer. La situation est telle qu’une voie originale pour réconcilier le peuple avec la République doit être trouvée. D’où la proposition - un des axes d’un projet transformateur - d’une Constituante permettant la reprise en main de la République par le peuple, la récupération de sa souveraineté. Le projet doit être conçu pour gouverner. Mais gouverner pour changer, c’est-à-dire imbriquer les citoyens au quotidien. C’est d’un ‘gouvernement d’agitation’ que nous avons besoin, dit Jean Luc Melenchon, en refusant de jeter en bloc ce qui avait fait le programme commun ou encore la gauche plurielle. Concernant le besoin de recréer la gauche, il prend appui sur le processus ayant conduit à la formation du Linkspartei. Ni absorption, ni dissolution, mais plutôt la création d’un front, de lieux permettant à la fois identité et unité et le démarrage d’un processus. Il insiste sur le besoin d’un parti, dans la mesure où des structures comme des collectifs ou réseaux ne suffisent pas pour affronter les forces adverses et créer un espace structuré, et fait de droits, de pouvoirs pour les adhérents. Réinventer la gauche, c’est pour JLMelenchon le dépassement de formes anciennes, un processus de fabrication en commun d’un objet nouveau.

Michel Laurent partage l’analyse du double échec de la socialdémocratie et du ‘communisme d’Etat’. . Il insiste sur l’analyse des résultats électoraux. La force de la droite est, selon lui, le résultat de deux données. Sarkozy a réussi à donner force à l’idée que la politique peut changer le cours des choses et a porté un projet de changement. La n’a pas présenté de projet de changement, a fait d’abord de l’anti-Sarkozy et tant qu’elle en sera là, elle ne sera pas en mesure de battre Sarkozy. Face à l’enjeu de construire du neuf à gauche, il insiste sur la nécessité d’analyser avec lucidité les expériences qui n’ont pas marché. Et de partir, dès lors qu’il s’agit de travailler à des rapprochements, de ce qui fâche, pour affronter sans détours les obstacles. L’actualité, y compris le renforcement d’autres partis montre que les partis ne sont pas une forme politique dépassée. Mais pour une force de transformation, la rénovation est à l’ordre du jour. Le PCF a besoin d’un congrès extraordinaire, pour travailler sur son projet, pour voir s’il y a la possibilité d’un nouveau type d’organisation, pour reconstruire la volonté d’un travail commun avec d’autres forces, sur des bases nouvelles. Quant à la question de la création d’une nouvelle force politique, elle n’est pas taboue. Le PCF doit discuter à l’occasion de la préparation de son congrès extraordinaire. Ce congrès véritablement exceptionnel doit permettre aux communistes de construire leurs décisions à partir des discussions avec d’autres, en connaissance de ce que d’autres pensent possible et souhaitent réaliser. Les communistes donnent les signes d’être prêts à construire du neuf si quelque chose de mieux qu’un PCF amélioré se présente comme possibilité réelle. Différentes étapes sont envisagées, avec les congrès en 2007 et 2008 dont la première pourrait déboucher sur un « programme de travail commun » à engager avec d’autres, sans raccourci, pour élaborer un projet qui permette de gouverner pour changer, pour réfléchir à l’outil, le parti, qui peut porter de tels objectifs, et pour voir avec qui il serait possible de le construire.

Conclusion provisoire : cette soirée d’un « atelier décentralisé » laisse entrevoir la possibilité concrète d’organiser un grand débat public national sur l’ensemble des enjeux que révèle le défi de la refondation d’un projet et d’une force politique d’émancipation.


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