Pistes de recomposition unitaire droite extrême droite

mercredi 22 août 2018.
 

C) Gironde « Pour la France, la France unie » Juin 2018

L’opération girondine « Pour la France, la France unie » n’est pas un épiphénomène  : le Rassemblement national l’appuie et espère l’étendre.

« L’unité de la droite ne viendra pas de la connivence des “chefs” mais de l’aspiration du peuple de droite à l’adoption d’une plateforme commune. Si les chefs ne suivent pas, la base n’aura pas d’autre solution que de se passer d’eux. » En 2016, dans La guerre à droite aura bien lieu. Le mouvement dextrogyre, l’essayiste Guillaume Bernard, organisateur de l’Appel d’Angers pour l’unité de la droite, précédait une expérience récente.

En Gironde, des cadres locaux du Front national (depuis Rassemblement national), de Debout la France et des « Républicains » se regroupaient, fin mars, dans une association, « Pour la France, la France unie » (PLF), ouverte à « des gens qui ont un même mode de pensée », expliquait récemment à Libération le maire de Cavignac, Jean-Jacques Edard. Son parti l’a depuis exclu, mais d’autres, encartés LR comme lui, n’ont pas eu ce souci. Au Rassemblement national (RN), on n’a pas ces pudeurs…

Pour reconquérir un électorat « perdu et désabusé »

Edwige Diaz est la vraie cheville ouvrière de ce rassemblement inédit. Présentée avant l’affaire comme « ambassadrice de Marine Le Pen pour la refondation du Front national », celle que Sud Ouest présente comme une « sarkozyste déçue » est la seule de PLF à avoir reçu le soutien de son parti pour mener à bien cette opération. Durant son tour de France des fédérations, elle a pu consulter, et mesurer les attentes. D’ailleurs, pour reconquérir un électorat « perdu et désabusé », et hâter le « désenclavement » entre les droites, disait-elle dans Libération, elle devrait, avec l’imprimatur de Marine Le Pen, exporter ses méthodes – somme toute basiques (« donner la parole à la base, remonter les thèmes qui intéressent les citoyens ») – dans un prochain tour des régions…

Si l’intérêt de RN tient du calcul électoral (dans cette circonscription girondine, 48 % de votes pour Marine Le Pen, le 7 mai 2017), il n’en constitue pas moins un indicateur qu’une passerelle entre les électorats existe, que le tract des « Républicains », « Pour que la France reste la France », aura consolidée.

Grégory Marin, L’Humanité

B) LR-FN : l’union par la base (Le Point avril 2018)

Source : http://www.lepoint.fr/politique/lr-...

Les discours entre les deux partis se multiplient, mais les dirigeants nient toute possibilité d’alliance alors que certains élus prennent des initiatives. Par Marylou Magal

« La droite et l’extrême droite se sont montrées assez homogènes dans leurs argumentations. Je n’ai repéré aucun cordon sanitaire ou aucune précaution de la part de la droite vis-à-vis de l’extrême droite… » Cette députée Insoumise fait référence aux débats qui ont secoué l’hémicycle, la semaine dernière, à propos du projet de loi asile et immigration. Une occasion pour Les Républicains de consolider leur position durcie sur cette question, portée par Laurent Wauquiez depuis quelques semaines. Il y a quelques jours, le président LR s’est prononcé en faveur de la tenue d’un référendum sur l’immigration, et a revendiqué, entre autres, la remise en cause du droit du sol. Des propositions phares du Front national depuis plusieurs années.

Les deux partis se dirigeraient-ils vers une alliance ? Dans les hautes sphères, on nie en bloc. Geoffroy Didier, secrétaire général délégué des Républicains, qualifie l’hypothèse de « fantasme ». « Les choses sont très claires chez LR, déclare-t-il. Nous sommes résolument opposés à toute alliance avec l’appareil du Front national, qui est très loin de notre histoire gaulliste. » La proximité idéologique grandissante entre frontistes et Républicains ? Elle se justifie par le contexte migratoire, qui « réclame une plus forte fermeté », et « l’évolution de la demande des citoyens, qui attendent une protection plus forte, déçus par une politique migratoire laxiste ». « On ne durcit pas notre discours, se défend le député européen. On voit la réalité en face ! Sur certains défis de société, les attentes de protection des citoyens sont plus fortes qu’il y a quelques années. »

Wauquiez et Ciotti manquent de courage.

Chez les frontistes, la simple mention d’« union des droites » irrite Sébastien Chenu, le porte-parole, qui reprend le lexique politique du « nouveau monde ». « Le concept d’union des droites est obsolète depuis qu’Emmanuel Macron a montré qu’on pouvait rassembler au-delà de la gauche et de la droite, explique-t-il. Je crois que le FN peut rassembler en miroir à En marche !, au-delà des clivages, sur le sujet de la défense nationale. » Les mots ne sont pas tendres pour les dirigeants Républicains. Pour le député frontiste, Laurent Wauquiez et Éric Ciotti sont « cyniques » et « manquent de sincérité ». « Ils veulent simplement capter notre électorat, s’emporte le porte-parole. On ne fera rien avec LR tant qu’ils seront dans cette logique absolue de manque de courage : avoir un discours similaire au FN, parce qu’ils se rendent compte que c’est ce qu’attend le peuple, et agir ensuite en décalé. » Il pointe du doigt l’amendement sur le droit du sol, porté par les députés du Front national, pour lequel aucun parlementaire Républicain n’a voté.

« De temps en temps, on peut avoir les mêmes idées que certains partis politiques, tempère Éric Woerth (LR). Cela ne signifie pas que nous nous allierons. » Le président de la commission des Finances reconnaît toutefois que LR peut draguer sur les terres du FN. « On peut parler aux électeurs du Front national, ce n’est pas un problème. Mais c’est pour mieux les amener à nos propres idées. » « Notre devoir est de nous adresser à tous les Français, renchérit Geoffroy Didier. Même ceux qui se sont tournés vers Marine Le Pen. »

Une porosité entre les deux partis

De même, au Front, on ne va pas jusqu’à renoncer à des militants supplémentaires, quand bien même ils viendraient des Républicains. « Mis à part les dirigeants, il y a des gens pleins de sincérité chez Les Républicains, concède Sébastien Chenu. Ils sont les bienvenus, on ne fait pas le tri dans nos militants. » En clair : ni discussion ni alliance officielle, mais on accepte l’électorat de l’un et les militants de l’autre. Et si un tel échange de flux est possible, c’est bien parce que les frontières idéologiques entre les deux formations sont de moins en moins visibles, sur les questions sociétales notamment.

La porosité entre les deux formations politiques dépasse d’ailleurs le cadre idéologique. Jeudi 12 avril, Thierry Mariani, ancien ministre de Nicolas Sarkozy, a signé, dans Valeurs actuelles, une tribune avec plusieurs élus frontistes revendiquant « l’union des droites ». Des initiatives locales se mettent aussi en place, comme en Gironde où le maire LR Jean-Jacques Edard a décidé de rendre concrète cette idée d’union des droites en travaillant main dans la main avec Edwige Diaz, secrétaire départementale du FN, et Martine Hoster, représentante de Debout la France, le parti de Nicolas Dupont-Aignan. Si les dirigeants s’écharpent dans les hautes sphères, la base, elle, commence à abattre les frontières. Partager sur

A) Le club de l’horloge, une des racines de la contamination Avril 2018

Dans la lettre d’information de l’automne 1982 du Club de l’horloge, Michel Leroy (qui intégrera le cabinet du ministre Alain Madelin en 1986) estime que « la ‘‘bataille des mots’’ devient prioritaire ». « Ce document contient en germe tous les principes que les Horlogers (particulièrement les ‘‘ethno-différentialistes’’ Bruno Mégret et Jean-Yves Le Gallou – ndlr) vont tenter d’inculquer à la droite, puis qu’ils vont appliquer méthodiquement au FN quand ils en prendront la direction », expliquait l’historien Nicolas Lebourg à Slate en 2017.

Selon Michel Leroy, « les mots sont une arme essentielle dans le combat politique » car « porteurs d’un projet et qu’ils prennent leur signification réelle dans une structure doctrinale ». En clair, l’utilisation du vocabulaire habitue à l’idée, et précède son application.


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