Racisme et refus des lois de la République au programme de l’académie de Créteil ?

mardi 16 mai 2017.
 

L’ESPE (école supérieure du professorat et de l’éducation) de l’Académie de Créteil organise les 18 et 19 mai un bien étrange colloque. Sous couleur de recherches en sciences humaines, il s’agit, une fois de plus, d’instrumentaliser la sociologie contre la laïcité.

Pour faire court, la laïcité serait une arme de guerre de la domination blanche postcoloniale contre les femmes des groupes minoritaires anciennement colonisés. Ainsi, la loi du 15 mars 2004 réglementant le port des signes religieux par les élèves de l’école publique viserait en réalité à discriminer les jeunes filles musulmanes. L’école de la République serait ainsi structurellement raciste… Mieux, le dominateur est explicitement caractérisé comme mâle et surtout blanc : véritable « racisme à l’envers », selon les mots de Gilles Clavreul, délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme.

Il n’est plus ici question de « recherche en sciences sociales » -ce qui justifierait l’intérêt d’un ESPE- mais bien de propagation d’une idéologie néo-raciste, antirépublicaine et anti-laïque. Quelques sociologues (Christine Delphy, Raphaël Liogier…) servent d’alibis aux militant.e.s dénonciateur.trice.s de « la république blanche postcoloniale », de « l’islamophobie », ou aux propagandistes du « féminisme identitaire », défendant « le voile, c’est mon choix » contre les « féministes blanches postcoloniales » de la « population majoritaire ».

Caricatures ? Hélas, non, comme le prouve l’affiche du colloque de l’Académie de Créteil publiée sur le site du « réseau national des ESPE », à l’appui de « l’appel à communications » (donc, comme cadrage idéologique). Elle mérite quelques commentaires.

Pour ceux que le jargon rebute, précisons que « l’intersectionnalité » est, en sociologie, l’étude de la combinaison des diverses discriminations dont un individu est victime : comment elles se renforcent, ou au contraire neutralisent leurs caractérisations respectives…

Ainsi, la discrimination principale visée par le dessin est celle qui frappe les femmes. La réponse, le féminisme, est symbolisée par le poing fermé et le biceps saillant. Mais l’intersectionnalité vient des deux autres discriminations évoquées : celle de la race, signifiée par la couleur des peaux, et celle de la religion et/ou la culture, manifestée par le voile de la femme de droite.

Le traitement graphique de ces « discriminations secondes » est significatif. Le « racisme à l’envers », ici à l’œuvre, consiste à essentialiser la couleur de peau pour y assigner les individus –définition même du racisme ! Ainsi, la blancheur de la femme de gauche a été manifestement accentuée pour en faire un stéréotype de la « blanchitude » : par opposition, celle de droite, portant foulard, que le racisme traditionnel considèrerait pourtant comme « de race blanche », est artificiellement représentée « moins claire » (« bronzée »), de façon à la distinguer à tout prix de la « blanche ». C’est que la discrimination a priori que postule cette idéologie oppose exclusivement « les blancs » à tous les autres ! A la limite, la « race blanche » serait la seule oppressive par essence…

Quant à la discrimination par la religion, ou la « culture », elle ne paraît concerner qu’une seule femme de l’image, celle qui porte le voile : les deux autres ne manifestent pas leur appartenance. Et pourtant… Ainsi, le fichu couvrant les cheveux de la « blanche », accessoire stéréotypique de la « ménagère » repris ironiquement par le féminisme traditionnel (« blanc »…), se trouve recyclé de curieuse façon, comme coiffure ordinaire. Car la « noire » porte de son côté un bandana, étonnamment du même tissu que le voile musulman de la troisième femme. Il s’agit bien de suggérer que le port d’un tissu sur les cheveux est un « universel » féminin, afin de banaliser la signification du voile –qui est pourtant, tout non-sociologue le sait, un signe ostensible d’appartenance religieuse dont personne ne peut prétendre qu’il n’ait rien à voir avec la « domination masculine »…

Sont annoncées à ce (très long) colloque quelques communications édifiantes. Par exemple : « L’institution scolaire au risque de l’islamophobie : pistes de réflexion à partir de la question du devoir de neutralité ». L’intervenant, Marwan Mohammed, est un sociologue militant, pourfendeur de « l’islamophobie (1) », qui sert ici à remettre en question la laïcité scolaire. Autrement dit, un principe constitutionnel, excusez du peu ! Par ailleurs, un « panel » proposera trois interventions sur le thème : « Comment l’institution scolaire fabrique le « problème musulman », la discussion étant animée par Hanane Karimi, qui milite pour l’abrogation de la loi du 15 mars 2004 ! Plus direct encore, dans le « panel » « Discipliner les minoré·e·s » (ah, l’école post-coloniale !) est prévue la communication : « Surveiller et sanctionner au nom de la loi du 15 mars 2004 ». On ne peut être plus clair : prôner la contestation des lois de la République dans un ESPE, voilà une propagande qui n’a plus rien à voir avec « la recherche en sciences humaines », et tout avec la lutte sournoise contre la laïcité et la République elle-même. L’islamo-gauchisme serait-il devenu la doctrine officielle de l’éducation nationale ? On attend avec intérêt la réponse de Mme la rectrice de l’Académie de Créteil.

En attendant, l’UFAL appelle les laïques à la plus extrême vigilance contre toutes les formes d’infiltration de ces idéologies nauséabondes, sous couleur de colloques, formations, cours, etc. Il serait temps de décoloniser les sciences humaines : la sociologie ne saurait servir de cheval de Troie aux complices de l’islamisme politique et de l’apartheid identitaire.

Par Charles Arambourou

Note(s)

1. Islamophobie : anathème dépourvu de rigueur (critique une religion n’est pas un délit !), qui sert à imposer silence aux laïques, comme l’ont montré Caroline Fourest, et plus récemment Elisabeth Badinter.


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