Le Parti de Gauche s’oppose à l’extension des frappes en Syrie

vendredi 11 septembre 2015.
 

François Hollande vient d’annoncer que la France mènera des « vols de reconnaissance » en vue de « permettre des frappes contre Daesh » en Syrie. Décidant ainsi d’élargir, sans débat à l’Assemblée nationale, le champ de la participation militaire française dans une guerre sans fin, le monarque ne tire aucune leçon des réalités sur le terrain.

Cela fait déjà plus d’un an que la coalition entre les pays occidentaux et les monarchies du Golfe bombarde les positions de l’Etat Islamique en Irak et en Syrie, sans succès. Les résultats de cet attelage hétéroclite d’acteurs aux objectifs contradictoires sont si mauvais que les responsables militaires étasuniens de la coalition ont produit de faux documents en direction de leur hiérarchie pour enjoliver la situation.

De fait, les djihadistes ont su se mélanger aux populations civiles. La stratégie de bombardements aériens est totalement inopérante puisque soit on s’interdit de bombarder, soit on se condamne à tuer des non-combattants, ce qui reviendrait à renforcer les soutiens de Daesh, et à obliger encore plus de syriens à fuir leur foyer (déjà plus de 12 millions de déplacés sur 22 millions d’habitants…). Daesh dispose par ailleurs toujours d’un milliard de dollars de réserves de changes et continue de percevoir 500 millions de dollars de revenus annuels via la vente de pétrole sur le marché noir.

Enfin, né dans le sillage de la seconde guerre d’Irak menée par les États-Unis, et de la déstabilisation générale de la région qu’elle a favorisée, Daesh est le produit d’une crise politique de l’ensemble de la zone, que la multiplication des ingérences militaires sans réflexion politique autre que des arrière-pensées impérialistes ne fait qu’aggraver.

L’imposition du départ de Bachar El Assad comme préalable à toute discussion, qu’annone F Hollande depuis 3 ans, laisse à Daesh de beaux jours devant lui. F. Hollande prétend en outre garantir à la France dans cette affaire une « autonomie de décision et d’action », alors même que son absence de vision stratégique s’inscrit dans l’aventurisme militaire de l’OTAN. Est-ce un hasard si cette annonce intervient conjointement avec le choix fait par les Etats-Unis de bloquer les propositions russes à l’ONU ? Quoi qu’il en soit, une opération militaire unilatérale de la France et de ses alliés de l’OTAN sans coordination avec l’armée syrienne et les forces kurdes du nord de la Syrie ne ferait qu’empirer une situation déjà désastreuse.

Il existe pourtant de véritables solutions pour détruire Daesh : saper ses bases politiques en Irak et en Syrie en répondant à certaines revendications de soutiens purement opportunistes à cette organisation ; tarir ses ressources économiques, en cessant d’acheter son pétrole et en demandant des comptes aux états parrains du wahhabisme (Arabie Saoudite et Qatar notamment) ; cesser de s’appuyer sur les rebelles syriens dits « modérés », soit alliés de fait à la branche syrienne d’Al Qaida, soit inaptes au combat, et dont les armes finissent régulièrement dans l’escarcelle des djihadistes ; en définitive, renoncer à renverser le régime de Bachar Al-Assad par la force, et favoriser la reprise des négociations en Syrie entre le régime syrien et son opposition afin de rendre possible une transition politique. A moyen terme, seule une armée syrienne agrégeant les éléments fréquentables du régime actuel et de l’opposition, renforcée dans sa légitimité et appuyée par l’ensemble de la communauté internationale, serait à même de combattre efficacement Daech au sol.

Ce n’est qu’à ces conditions que Daesh pourra être efficacement combattue. Mais François Hollande le veut-il vraiment ? Il est permis d’en douter, tant ce « monstre providentiel » représente un épouvantail bien commode pour justifier à la fois des ingérences militaires au Moyen-Orient, et une dérive sécuritaire sur le plan intérieur.

Djordje Kuzmanovic, Théophile Malo et Ramzi Kébaïli


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