Assaut d’Israël sur Gaza : un énorme crime contre l’humanité

samedi 19 juillet 2014.
 

A Khan Younes et à Rafah, au sud, à Beit Lahiya et Beit Hanoun, au nord, à Zeitoun, à l’est tout comme à Gaza city, la nuit a été particulièrement dure. Dans cette dernière ville, les rues étaient désertes. Personne, à l’exception de quelques rares voitures, n’osaient s’aventurer dehors. Ce n’est qu’en milieu de matinée que de nombreux habitants ont bravé le danger en ce vendredi de Grande prière pour se rendre à la mosquée la plus proche. Les imams ont prononcé des discours enflammés, appelant notamment les Palestiniens à soutenir la résistance.

L’armée israélienne s’est déchaînée. Jeudi soir, elle a pénétré en territoire palestinien avec son infanterie, ses tanks et son artillerie alors que dans le ciel tournoyaient les oiseaux de mort, hélicoptères Apaches, avions de chasse F-16 et drones sournois lâchant leurs déjections meurtrières et que dans la mer les navires militaires faisaient rouler un tonnerre de feu.

Au tapis de bombes qui se déverse sur la bande de Gaza depuis le 8 juillet se sont donc ajoutés les obus de chars. Au moins 23 Palestiniens ont été tués en quelques heures, portant à 265 le nombre de Palestiniens ayant perdu la vie depuis le déclenchement de l’opération israélienne, il y a onze jours. Il y aurait au moins 1.770 blessés, des civils, pour 75% d’entre eux, d’après l’Onu. Les troupes israéliennes rencontrent néanmoins une résistance de la part des Palestiniens. Un soldat aurait été tué et deux autres blessés de source militaire officielle. Qui s’ajoutent au seul civil israélien tué, un colon de Cisjordanie venu apporter de la nourriture aux soldats.

Quelque 70% des secteurs de la bande de Gaza sont privés d’électricité à la suite de l’assaut terrestre. « Toutes les lignes avec Israël ont été coupées. Nous ne recevons aucune électricité d’Israël. D’habitude nous recevons 120 MW. Aujourd’hui, c’est zéro », affirme Fathi Cheikh Khalil, le directeur de l’Office de l’électricité à Gaza. « Nous avons demandé à la Croix-Rouge de coopérer avec nos équipes pour réparer certaines des lignes coupées à Gaza. Nous avons aussi demandé aux services de l’électricité israéliens de réparer des lignes de leur côté, mais ils ont répondu que c’était trop dangereux, a-t-il expliqué. La pire situation est dans le nord, où il n’y a plus de courant du tout » Le Programme alimentaire mondial (PAM) de l’Onu a pu distribuer une aide d’urgence à 20.000 personnes à Gaza depuis que le début de le 11 juillet et espère atteindre 85.000 personnes ces prochains jours. De son côté, une porte-parole de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Fadela Chaïb, a indiqué que l’organisation craignait l’apparition de maladies transmises par l’eau, comme les diarrhées, alors qu’une grande partie de la population n’a pas accès à l’eau potable.

A l’hôpital Shifa de Gaza city, la morgue se remplit. Les ambulances se succèdent, toute sirène hurlante, amenant les blessés de la nuit et du matin. Un homme sort avec son fils, Mohammed, 3 ans, la joue droite criblée par des impacts et la tête bandée. Il est totalement hagard, la moue de sa bouche renvoie à la tristesse de son regard. Abou Marzouk, son père, raconte qu’ils n’ont rien, terré qu’ils étaient dans la maison, quand soudain un missile s’est abattu, blessant plusieurs personnes, dont le petit Mohammed. Dans l’hôpital, les traits tirés des médecins disent les journées de 24H et les nuits toutes aussi longues. Le docteur Smaïn Sehran est de ceux-là. Il est au chevet d’un homme entre la vie et la mort. Raied B’saily, 20 ans, blessé à Deir el Ballah, a été transporté à Gaza après un passage par l’hôpital local incapable de lui prodiguer les soins nécessaires. « Lorsqu’il est arrivé, son cerveau sortait de la boite crânienne, nous l’avons opéré. Son pronostic vital est engagé », dit Smaïn Sehran.

« Le plus terrible c’est pour les populations civiles, celles aux frontières », dénonce Samantha Maurin, porte-parole à Gaza de l’équipe de Médecins sans frontière (MSF), venue apporter son aide aux personnel médical palestinien. Un anesthésiste, un médecin urgentiste et une infirmière sont arrivés. Mais un chirurgien de MSF a été bloqué par les Israéliens à la frontière d’Erez. « L’intensité et la fréquence des bombardements restreint nos mouvements », souligne Samantha Maurin malgré les contacts avec les deux parties pour avoir des garanties.

Alors que des milliers de familles cherchent refuge dans les établissements de l’Onu pour échapper au déluge de feu, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou a justifié le lancement de l’assaut par le « refus du Hamas d’accepter le plan égyptien pour un cessez-le-feu et la poursuite des tirs de roquettes sur Israël ». Un mensonge grossier puisque, comme l’a déjà indiqué l’Humanité, des discussions étaient en cours, au Caire, entre les Palestiniens et les Israéliens, sous l’égide de l’Egypte. Les Palestiniens demandent notamment la levée du blocus imposée par Israël depuis plus de sept ans maintenant.

Tel Aviv affirme que son opération est « limitée » sans que l’on sache ce que « limitée » signifie dans la bouche des responsables israéliens. Selon le ministre de la Communication, Gilad Erdan, l’opération vise avant tout à « détruire les tunnels » du Hamas. Interrogé sur une éventuelle réoccupation de la bande de Gaza il a dit que ce n’était « pas l’objectif ». Mais, hier, des roquettes continuaient à être tirées non plus vers le nord d’Israël mais vers les zones où l’armée israélienne poursuit son incursion. Preuve que la résistance palestinienne est encore debout.

Pierre Barbacey, envoyé spécial de l’Humanité à Gaza


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