Après les Départements, les communes

mercredi 21 mai 2014.
 

Invitée De France-Info ce jeudi 15 mai, la ministre de la Fonction Publique et de la réforme territoriale Marylise Lebranchu ne s’est pas contentée de claquer la porte au nez des fonctionnaires en congelant le point d’indice. Elle est aussi revenue sur la réforme territoriale…pour étendre son champ d’application aux communes. Ces dernières sont désormais les prochaines visées par le grand mouvement présidentiel pour rayer de la carte de France tous les cadres institutionnels où pouvait s’exprimer la souveraineté populaire.

Bien sûr, il faut dire un mot préalable en ce jour de grève et de mobilisation de la fonction publique sur la fin de non-recevoir cinglante jetée par l’exécutif à la tête des syndicats et des agents. Pour la 8ème année consécutive, le point d’indice qui définit les rémunérations dans la fonction publique est gelé. Sous François Hollande comme sous Nicolas Sarkozy, l’Etat patron se comporte comme le plus vulgaire et méprisant des chefs d’entreprise en refusant même toute discussion sur les salaires sinon par des mesures cosmétiques pour certaines catégories : 46 € par mois pour les agents au niveau du SMIC, dont la ministre reconnait elle-même, sans que cela semble la déranger, qu’ils représentent le grand nombre. Et augmenter le SMIC ? La mesure semble-t-elle si incongrue à la ministre ? Apparemment oui puisque non seulement son gouvernement s’y refuse mais préfère le rapiéçage tout en tirant de l’autre main la maille pour défaire l’habit de l’intérêt général !

Pire : non seulement la ministre a confirmé le gel du point d’indice, mais elle a également entériné l’idée selon laquelle il n’y aurait de « revoyure » qu’en cas de modification de la situation économique. Le jour même où la prévision de croissance du gouvernement a été contredite par l’Insee qui annonce une croissance 0 au premier trimestre, Marylise Lebranchu ose confirmer cette conditionnalité qui vaut abandon. Il est beau l’acquis des parlementaires qui s’enorgueillissaient d’avoir obtenu de Manuel Valls cette clause de revoyure pour mieux justifier leur vote pour la trajectoire économique qui a été présentée à Bruxelles ! Tout cela est du vent. D’ailleurs, Manuel Valls fait bien peu de cas des fonctionnaires. Mettant presque un mois pour répondre au courrier qui lui a été adressé le 23 avril par les fédérations de fonctionnaires, le Premier ministre vient de rejeter par le mépris leur demande d’audience et leur confirme qu’eux aussi devront se serrer la ceinture pour participer à « l’effort collectif de redressement »…du Medef. François Hollande avait prévenu en évoquant le 6 mai 2014 sur RMC-BFM « l’entreprise France » et en prenant de fait la posture du PDG. Comme DRH, Valls et Lebranchu ne valent guère mieux.

Après ces réjouissances, la ministre est venue sur le terrain de la réforme territoriale. Pas de grandes annonces a priori puisque le Président reçoit actuellement l’ensemble des formations politiques et qu’il se réserve la primeur des annonces pour la semaine prochaine. Sauf qu’au détour d’une phrase, Marylise Lebranchu lâche que pour l’exécutif, derrière les « consultations » d’apparat, l’affaire est bien pliée. Ainsi, selon elle, François Hollande reçoit les responsables des différents formations « pour leur dire, je veux supprimer les départements, je veux trouver une solution pour les départements ruraux ». Non seulement la question de la suppression (ou non) des départements ne serait pas posée mais actée, mais celle des départements sur les aires métropolitaines serait même dès à présent effective (dès le 1er janvier 2016 donc) puisque la seule chose qui resterait à discuter serait le cas des départements ruraux ! C’est un putsch contre le peuple ! Le Président lui dénie ainsi la possibilité de s’exprimer sur le sujet et avoue même chercher les formes pour éviter toute réforme constitutionnelle qui lui permettrait de poursuivre sournoisement et en catimini ses basses oeuvres !

Mais, et c’était prévisible, le gouvernement n’entend pas en rester là. Après avoir sabordé la souveraineté populaire nationale en offrant la tutelle budgétaire à Bruxelles, après avoir prévu de rayer de la carte les départements, François Hollande s’en prend au troisième échelon du triptyque Nation/Département/Commune. La commune elle-aussi est amener sinon à disparaître du moins à être vidée de sa substance par des transferts de compétences auprès des intercommunalités et des métropoles. Marylise Lebranchu vient de l’avouer pour la première fois au micro : « Vous savez que les communes vivront grâce à l’intercommunalité ». Voilà donc une tutelle effective désormais attachée aux communes. Leur existence en propre, leurs compétences en propre, leur fiscalité en propre, seront donc transférées subrepticement aux intercommunalités. Parce qu’il ne peut pas les éliminer physiquement, François Hollande fait le choix de vider les communes de leur substance. Le dernier lien entre le peuple et ses représentants disparait pour laisser la place à une technocratie désincarnée qui pourra continuer à répondre aux injonctions de l’oligarchie pour mieux la servir. Le vieux rêve libéral d’une technostructure indépendante du peuple à tous les étages, c’est bel et bien François Hollande qui le réalise en Europe, dans les régions et avec les intercommunalités.

Je me dépêche car après avoir entendu tout ça, je pars manifester. Et plutôt deux fois qu’une !


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