De quoi Alstom est le nom

mercredi 7 mai 2014.
 

Le pillage en cours d’Alstom révèle une double impasse : celle du capitalisme financier et celle de l’Europe de l’austérité et de la concurrence. Avant d’entrer dans le détail des causes de ce désastre, rappelons le caractère stratégique de ce groupe.

Pour notre pays et pour nous, du point de vue de la mise en œuvre de notre programme. Alstom permet à la France d’être leader mondial dans deux domaines essentiels pour l’avenir : le train à grande vitesse et les équipements hydro-électriques. Deux activités directement liées à la mise en œuvre de notre politique écologique du transport et de l’énergie. Alstom permet aussi à la France d’avoir une autonomie technologique et productive en matière d’éoliennes et d’hydroliennes mais également dans la maintenance de toutes les centrales électriques, qu’elles soient thermiques ou nucléaires. En janvier 2012, j’ai visité, à l’invitation des syndicalistes d’Alstom, l’atelier des ailettes qui produit à Belfort les pièces les plus délicates des turbines. Un savoir-faire décisif pour l’avancée technologique de la France en matière d’énergies renouvelables, qu’elles soient éoliennes ou marines. Pas de transition écologique de la production d’énergie sans ces outils. Ce n’est donc pas rien que d’envisager de démanteler ce groupe pour en vendre l’essentiel à l’un ou l’autre de ses principaux concurrents mondiaux : General Electric ou Siemens. Outre l’enjeu de maîtrise technologique, se pose aussi un enjeu géopolitique quand il s’agit de maintenance de centrales nucléaires ou de barrages.

A court terme, Alstom est confronté à une double impasse en forme de cercle vicieux. Son carnet de commandes n’est pas assez rempli. Ses investissements sont insuffisants. Dans les deux cas la situation n’est aucunement imputable aux refrains du gouvernement et du MEDEF sur les difficultés des entreprises. Au contraire, on y trouve une validation quasi chimiquement pure de nos diagnostics économiques.

La faiblesse du carnet de commandes résulte directement des choix de l’Europe en faveur de l’austérité, de l’euro fort et de la libéralisation du marché de l’énergie. Tout ce que nous avons dénoncé sans relâche. Les plans d’austérité ont fait chuter les commandes publiques de trains, tramways et bus fabriqués par Alstom. Ils ont aussi ralenti les plans d’équipements en énergies renouvelables, et en particulier les installations de parcs éoliens et hydroliens. Quant aux exportations de tous ces matériels à l’étranger, elles ont été plombées, en particulier dans les pays émergents, par la hausse de 10 % de l’euro depuis un an. Le résultat de ce cocktail explosif de concurrence, d’austérité et d’euro fort est une chute du chiffre d’affaires d’Alstom. La libéralisation du marché de l’électricité a aggravé la baisse des investissements faute de planification écologique. C’est exactement au même sous-investissement que conduira dans le rail la poursuite de la libéralisation avec le 4ème paquet de directives ferroviaires européennes.

Principal concurrent mondial d’Alstom et surtout de Siemens, General Electric ne connaît pas les mêmes difficultés car il bénéficie de conditions politiques et économiques totalement différentes : il s’appuie sur un protectionnisme commercial qui lui garantit les commandes des Etats-Unis. Et il bénéficie de larges soutiens financiers grâce à la banque qu’il a créée et qui est massivement refinancée par la Réserve fédérale. C’est exactement ce que nous disons et expliquons à longueur d’année pendant que les pédants bavardent sur le « coût du travail », le nécessaire « choc de compétitivité » et ainsi de suite.


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