Ça se grippe (éditorial national du Parti de Gauche)

jeudi 6 décembre 2012.
 

Faute de renégociation du traité Merkozy, François Hollande s’était vanté au retour de son premier sommet européen d’avoir engagé un processus de réorientation de la construction européenne. On sait ce que nous avions pensé de cette fable. Osera-t-il réitérer ce bobard au lendemain du dernier sommet européen qui a échoué à adopter l’enveloppe budgétaire de l’Union pour la période 2014-2020 ? Car la discussion a tourné exclusivement autour de deux questions. De combien couper ? De 10% comme l’a défendu Hollande ou de 15% comme le voulait Cameron ? Et où couper ? Le concours de ciseaux tourne vite au dépeçage s’agissant d’un budget qui plafonne à l’origine à 1% du PIB européen. En tout cas il aura réduit en lambeaux l’illusion selon laquelle l’Union européenne pourrait mener des politiques de relance au niveau global tout en prônant l’austérité pour chacun de ces membres. L’ultime pirouette de Hollande, qui prétendait que la relance européenne ferait contrepoids à la rigueur en France, est au tapis.

Les tailles dans les dépenses publiques à tous les niveaux convergent donc pour provoquer une austérité généralisée. C’est la tendance de fond sur laquelle la crise va prospérer et s’approfondir. Mais ce processus n’est pas stable. Des événements accélèreront son cours. Viendra par exemple la défaillance de la Grèce, inéluctable depuis le premier jour où Papandreou capitula devant les financiers. La dernière tranche « d’aide » (majoritairement consacrée au renflouage des banques) a été décidée dans la nuit de lundi à mardi au terme d’un processus encore plus laborieux que les précédents. À chaque fois plusieurs semaines d’asphyxie financière étranglent le pays. Et l’engagement croissant des États dans le fonds européen de stabilisation financière est désormais utilisé par les agences de notation pour dégrader leurs dettes souveraines, notamment celle de la France. La Grèce est donc le cheval de Troie de la finance dans l’Union européenne visée par une attaque globale.

Pendant que la situation économique échappe aux dirigeants en place, notre système politique continue à partir en morceaux. Le rapport Jospin y changera autant qu’un sommet européen « de la dernière chance ». Goûteux paradoxe, il s’inscrit dans la présidentialisation du régime au moment où les primaires qui en sont l’expression emportent l’UMP au fond du gouffre. La débâcle du parti de l’ancien président, incapable de remettre de l’ordre et visé par une enquête judiciaire, est une marche de plus vers le « qu’ils s’en aillent tous ». Tant mieux ! L’alternance de droite n’est pas la seule issue à l’échec de ce gouvernement. Faute de solution préservant l’UMP, elle deviendrait même hautement improbable. Du coup le changement peut venir d’autant plus de la gauche !

La majorité gouvernementale a aussi du plomb dans l’aile. Pétri de productivisme et de localisme notabilaire, le Premier Ministre s’accroche à son aéroport avec une étroitesse de vue sidérante. Il semble croire que les CRS peuvent régler le problème militairement dans les boues du bocage nantais ! C’est au contraire pour lui l’enlisement assuré tant que la mobilisation ne faiblit pas et entraîne les Verts, à peine terminée la grève de la faim de leur maire Gatignon, vers une nouvelle confrontation tout aussi brutale avec le gouvernement auquel ils appartiennent.

Une politique qui ne marche pas, une majorité parlementaire qui renâcle à l’appliquer, le tout dans des institutions européennes de plus en plus brinquebalantes. Le haut se grippe chaque jour davantage. Comment fera-t-il quand le bas refusera de suivre ?


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