Quand l’État laisse tomber la neige...

jeudi 30 décembre 2010.
 

La neige revient tous les ans, la casse des services publics imposée par l’État reste – via la révision générale des politiques publiques (RGPP) visant, nous dit-on, à faire toujours mieux avec toujours moins de moyens budgétaires 
et humains. 
Le privé, lui, se frotte les mains.

Les chutes de neige de la semaine dernière ont surpris tout le monde par leur intensité. Elles laisseront des traces dans les souvenirs des automobilistes forcés de passer la nuit dans leur véhicule ou dans des hébergements d’urgence. On a beaucoup parlé de la région parisienne, mais la province ne fut pas épargnée. L’État a d’abord minimisé. Mais l’épisode neigeux dure et devient saga. Transports en commun paralysés, poids lourds bloqués sur les parkings, trains ralentis, vols annulés dans les aéroports, axes secondaires impraticables… Une situation qui a de quoi mettre en boule, tant elle souligne les conséquences des politiques mises en œuvre depuis trois ans dans le cadre de la révision générale des politiques publiques.

Vers une privatisation totale du Réseau routier

La fameuse RGPP et son refrain  : « Faire mieux en dépensant moins. » Un leitmotiv repris en toutes lettres par François Fillon lui-même, dans une lettre adressée le 28 octobre 2009 au chef de l’inspection des finances à Bercy. Entre autres préconisations, le premier ministre invitait alors à avancer sur l’idée de création d’un « opérateur routier national ». Autrement dit, comme l’ont dénoncé alors les syndicats et notamment la CGT, d’avancer sur la mise en place d’une privatisation totale du réseau routier français, déjà très morcelé. Sur le million de kilomètres de routes du pays, l’État n’en a plus en charge que 20 000. Soit seulement 2 %  ! Dont 8 200 kilomètres sont déjà entretenus par des concessionnaires privés sous contrat avec l’État. Les agents des onze directions interdépartementales des routes (DIR), issues du regroupement de la centaine de directions départementales de l’équipement, n’interviennent que sur les 11 800 kilomètres de routes nationales restants. L’entretien des départementales et des axes secondaires a été transféré aux départements. Ces collectivités locales, déjà asphyxiées budgétairement, ont notamment en charge la maintenance de la flottille des véhicules de l’ex-DDE et une partie des personnels d’entretien de ces véhicules qui ont accepté leur transfert. L’entretien, des déneigeuses notamment, est confié au privé, via une plate-forme téléphonique du groupe ALD à appeler pour les besoins courants et en cas de problème  !

Des « consommateurs de la route »

Selon la CGT, le projet de loi de finances 2011 fait figurer une baisse de 10% des budgets de fonctionnement des DIR et une baisse de 27% des budgets directement affectés à l’entretien des routes. Le privé, s’il se trouvait complètement propriétaire du réseau d’infrastructures de transport routier, aurait, en toute logique, à dégager des bénéfices. Parmi les pistes déjà évoquées, l’instauration de péages à l’entrée des grandes villes. Les « usagers de la route » deviendraient des « consommateurs de la route », supportant tous les coûts  : des inégalités d’accès liés aux tarifs, une différence de qualité des réseaux selon que les secteurs sont très fréquentés ou pas. Et quid du statut et des conditions de travail des personnels déjà mis à rude épreuve  ?

Laurence Mauriaucourt


Signatures: 0

Forum

Date Nom Message